Chapitre 6 : L'ombre d’un doute

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Les jours se suivaient, ternes et sans éclat, comme si l’université elle-même avait revêtu un manteau de silence complice des tourments d’Émeric. Depuis la lecture de cette mystérieuse lettre trouvée sous son pupitre, son esprit était comme un champ de bataille. Chaque mot qu’il y avait lu résonnait dans sa tête avec l’intensité d’un cri retenu : « Je t’aime, mais je ne sais comment te le dire. » Il s’était demandé mille fois qui en était l’auteur. Il avait d'abord pensé à Juliette, espérant au fond de lui qu'elle ait enfin brisé la distance glacée entre eux. Mais son regard froid et distant ces derniers temps lui soufflait une vérité bien différente.

Alors, il pensa à Esmeralda. Douce, présente, toujours à l’écart mais jamais vraiment loin. Il revit leurs discussions, ses regards voilés, ses silences lourds de mots non dits. Et si c’était elle ? Si cette lettre était son dernier cri, une tentative désespérée de se faire voir, d’exister dans le cœur d’un garçon aveuglé par un amour à sens unique ?

Mais un doute persistait. Pourquoi l’avoir laissée là, dans un lieu aussi impersonnel qu’un pupitre de salle de classe ? Pourquoi ne pas la lui avoir remise en main propre ? Était-ce de la timidité ou un simple hasard ?

Un matin, Émeric s’installa seul sous l’acacia qui dominait la cour principale. Les feuilles tombaient lentement, emportant avec elles des fragments de ses illusions. Il sortit la lettre de son sac, la relut une énième fois, comme s’il espérait qu’une vérité cachée y apparaisse, entre les lignes.

Esmeralda l’aperçut de loin, assis, plongé dans ses pensées. Son cœur se serra. Elle hésita à l’aborder, mais quelque chose en elle l'y poussa. Elle s’approcha doucement, ses pas étouffés par le tapis de feuilles mortes.

— Tu sembles bien pensif, dit-elle doucement.

Émeric leva les yeux, surpris mais apaisé par la voix familière.

— Je me pose des questions, murmura-t-il. Sur les gens. Sur leurs silences… et leurs secrets.

Esmeralda sentit son cœur se mettre à battre plus vite. Il savait quelque chose. Ou du moins, il devinait.

— Les silences, parfois, crient plus fort que les mots, répondit-elle dans un souffle.

— Et les lettres ? ajouta-t-il. Quand elles ne sont signées que par le cœur ?

Un silence s’installa. Esmeralda détourna le regard, incapable de soutenir celui d’Émeric.

— Peut-être qu’elles sont laissées là où le cœur a trop peur d’aller, dit-elle, presque pour elle-même.

Émeric la regarda intensément. Il sentait qu’un voile allait tomber. Mais avant qu’il n’ose poser la question, Juliette passa devant eux, sans un mot, sans un regard. Elle semblait pressée, agacée peut-être, ou simplement absente.

Cette apparition brisa le moment. Esmeralda fit un pas en arrière.

— Je dois aller en cours… À plus tard, Émeric.

Et elle s’éloigna rapidement, laissant derrière elle un parfum de mystère et une vérité toujours dissimulée.

Émeric resta là, seul, l’ombre d’un doute grandissant dans le cœur. Il savait désormais que quelque chose lui échappait… et que tout allait bientôt changer.

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