N : Du coup, t'as un gage !

L : Depuis quand ?

N : Le dernier à la piscine, ça te rappelle rien ?

L : Ah mais c’était vraiment sérieux ? Je croyais que c’était juste un prétexte.

N : Ça l’était, mais plus maintenant !

L : T’es vache ! Allez, si tu veux je suis joueuse, mais sois pas trop méchant.

N : Alors, ça veut dire que je peux te demander des trucs coquins ?

L : Tu peux toujours rêver !

Je fais semblant de bouder, mais je suis quand même légèrement déçu. C’était juste pour la taquiner, je ne lui aurais jamais demandé quelque chose d’osé. Mais indirectement, le fait qu’elle refuse touche un peu mon égo.

N : Bon, bah du coup j’ai plus d’idée, c’est malin !

L : Va falloir creuser alors !

Je réfléchis un long instant, c’est vrai ça je lui propose un gage mais je n’ai aucune idée de ce que je pourrais lui demander de faire. Soudain, une idée me vient en tête comme une évidence.

N : Ah je sais ! C’est très simple, tu devras rester dans cette tenue jusqu’à ce soir.

L : Ok, je trouve ça marrant ! Mais à une condition, toi aussi tu devras rester comme ça !

N : Et depuis quand celui qui reçoit un gage peut se permettre de poser des conditions ?

L : Parce que cette condition te dérange ?

Sur ce coup-là elle m’a eu, je n’ai en aucun cas envie de me vêtir plus que je ne le suis déjà.

N : Ok, ça va t’as gagné...

L : D’ailleurs, j’aurais une question à te poser.

N : De quoi ?

L : Comment tu as fait pour acheter mon maillot de bain ?

N : Je l’ai acheté au centre-ville pourquoi ?

L : Mais… tu as pas dit que c’était pour toi je me trompe ?

N : Non, j’ai dit que c’était ma sœur qui m’avait demandé d’aller lui chercher.

L : Mais, t’as pas de sœur ?

N : Bah non justement !

L : T’es vraiment fou. Et pour les mensurations ?

N : A la main, à force de te tripoter quand on s’embrasse.

Nous nous mettons à rire de plus belle. Je vous l’avais dit que nous avions du mal à garder une conversation sérieuse bien longtemps. Pendant de nombreuses heures, on nage, on rit, on s’embrasse surtout, mais nos ventres commencent à gargouiller.

L : Ça te dirait de sortir ? Je commence à avoir un peu faim.

N : Oh oui, pas de problème, j’ai complètement perdu la notion du temps avec toi.

L : Mieux vaut ça plutôt que de trouver le temps long.

N : C’est clair !

Nous sortons puis nous nous essuyons. Je lui aurais bien rendu service en l’essuyant, mais je ne me suis pas permis de lui demander. Une autre fois peut-être.

Nous étendons chacun notre serviette de bain et nous nous rendons dans la cuisine, toujours en maillot de bain. Je lui propose d’aller s’installer sur mon lit, le temps que je prépare les sandwichs et que je lui emmène le plateau repas pour manger devant la télé. L’idée lui plaît plutôt pas mal.

Je l’entends se diriger vers ma chambre. J’ouvre le frigo et je sors tous les ingrédients nécessaires pour la confection de mes sandwichs : beurre, jambon, cheddar en tranche. Le plus classique possible, mais une valeur sûre. Je prends un couteau et le sachet de pain de mie. Je réalise mes sandwichs que je coupe en deux dans la diagonale pour faire des sandwichs triangles. Un plateau, une assiette chacun, des serviettes pour pas faire de miettes, deux cannettes de Cola et des tablettes de chocolat au lait. Je crois que j’ai tout ! Je range tout ce dont je n’ai plus besoin et je m’en vais de ce pas rejoindre ma belle.

En la rejoignant, je la vois allongée sur mon lit avec une jambe repliée. Les quelques rayons lunaires présents dans le ciel viennent tous finir leur route sur elle, comme si elle attirait la lumière. Je reste béat avec le plateau dans les mains. Laurène me regarde amusée.

L : Qu’est-ce qui te rend si heureux tout à coup ?

N : Sûrement le fait d’apercevoir la plus magnifique des créatures que Dieu n’ait jamais créé.

L : On ne peut plus t’arrêter ! Et à chaque fois, c’est toujours plus gros !

N : Ah bon je t’ai déjà dit que je te trouvais belle aujourd’hui ?

L : Oh pas tant que ça, environ 186 fois seulement.

N : Ah mais la 187ème, c’est toujours la plus importante.

L : Et en quel honneur ?

N : Je vais te montrer.

Je pose le plateau repas sur ma table de chevet, je m’allonge à côté d’elle et je l’embrasse goulûment. Je reprends le plateau repas et le place sur nos genoux. Je lui laisse la télécommande, elle est libre de choisir le film qu’elle souhaite. Je la vois chercher dans les films qu’il y a sur le site de streaming, et puis finalement son choix s’arrête sur Top Gun avec Tom Cruise.

N : Ah, je crois que j’en ai entendu parler de ce film. Il est assez vieux non ?

L : Ouais, mais il paraît qu’il est super bien.

N : Je te fais confiance.

Nous regardons attentivement le film en mangeant notre repas. De temps à autre, nous nous embrassons et nous nous caressons également mais très subtilement, comme des frôlements. Puis viens une scène torride où Tom Cruise et Kelly McGillis s’embrassent fougueusement dans un lit. Je regarde Laurène et je la vois sourire en coin, et je sais très bien ce que veut dire ce sourire.

N : Toi, tu m’as menti !

L : Qui ça, moi ?

N : Tu as dit que tu n’avais pas vu le film, mais je commence à croire que c’était prémédité non ?

L : Mais qui t’as dit que je n’avais pas vu le film ?

N : T’as dit qu’il paraissait super bien.

L : Et alors ? J’ai pas menti non ?

N : T’es pas croyable…

Je décale à nouveau le plateau repas sur la table de chevet et cette fois il y restera. Inspirés par le film qui continue de tourner en fond, nos deux corps se rapprochent et nos lèvres fusionnent. Enivrés par ce moment onirique, nos mains partent à la découverte de ces corps que nous convoitons chacun de notre côté.

Nous nous livrons corps et âme à l'autre. Nous partageons nos sensations, nos émotions, nos êtres tout entier. Toute l'appréhension, tous les doutes qui m'ont assailli se sont évaporés. Jamais je n'ai éprouvé une telle euphorie, jamais je n'ai ressenti autant de picotements, de fourmillements dans toute ma chair.

Dans l'intimité de cette nuit silencieuse, pour la toute première fois de ma vie, j'ai fait l'amour à la personne que j'aime. Endormie, nichée dans mes bras, je la contemple, n'arrivant pas à trouver le sommeil. Pourquoi je ne parviens pas à fermer les yeux ? Parce que je me questionne.

J'ai sûrement vécu le moment le plus intense de toute ma vie. Il y a quelques minutes de cela, c'est ici même que je suis devenu un homme. Enfin c'est ce qu'ils disent tous, bien que j'ai toujours l'impression d'être le même, quoique peut-être plus heureux, plus comblé qu'auparavant. Mais une pensée furtive, unique tâche à ce tableau pourtant si parfait, vient obscurcir ce rêve éveillé.

Pourquoi l'image d'Aleksy n'a-t-elle jamais pu quitter mon esprit ?