4a. L'idée : Lana
Après une nuit fort agitée, je me lève, pressée de poursuivre ma formation et d’exposer ma théorie à mon entraineur.
Sur le chemin du salon, je peine encore à me repérer, certaine que la veille, aucune porte ne se trouvait près des escaliers ! Je les emprunte et prends le temps d’examiner les tableaux accrochés au mur. Ils représentent tous des portraits. Des gens de la famille ? Ils me paraissent hostiles. Après tout, ce ne sont que des peintures. Il y a plus grave dehors que l’expression de ces gens qui posaient.
Mes amies sont en pleine préparation du repas. Elles sont silencieuses, concentrées sur leur tâche ou perdues dans leurs pensées remplies de souvenirs et d’espoirs. Je prête main-forte à Shana qui épluche des légumes, une moue boudeuse sur les lèvres.
— Vous n’avez pas trouvé d’indices, hier ? m’interroge Valérie.
— On n’a pas attaqué les recherches. Je ne suis pas prête, nous nous en sommes rendus compte hier. Où sont les autres ?
— Partis chercher des provisions. Nous sommes nombreux, nous allons vite en manquer.
Ils reviennent avec deux voitures chargées de nourriture, et expliquent devant nos airs effarés que les magasins seront bientôt vides. C’est angoissant, mais ça prouve qu’il y a d’autres survivants. Nos familles sont peut-être passées dans ces boutiques.
Matt ne les a pas accompagnés.
— Il a refusé de nous dire ce qui l’a mis dans une telle rage après votre virée. Il est partit tôt ce matin sans explications. Tu nous racontes ? m’ordonne plus qu’elle ne me demande sa sœur lorsqu'elle vient se planter devant moi.
Surprises par ce ton froid et dur, mes amies se tournent vers nous, tandis que Jonathan poursuit, sans cesser de vider son cabas et de déposer les denrées sur la table :
— Ça lui est arrivé une fois, une telle colère. Il a été obligé de s’absenter plusieurs jours pour sortir toute la violence qu’il ressentait. C’était il y a très longtemps.
Ma curiosité l'emporte :
— Qu’est-ce-qui l’avait mis si en colère ? Comment s’est-il calmer ?
— C’est nous qui posons les questions, aboie Carol, avec un regard assassin. Que s’est-t-il passé hier ?
Cette fois, je capitule devant ce rappel à l'ordre chargé de menaces et je leur fais un bref récit du triste épisode de la veille.
Je ne suis pas tranquille. Je m’en veux d’avoir faiblit quand la seule personne à me soutenir avait besoin de moi. Je dois lui prouver que je suis digne de sa confiance. Je choisis de m’isoler dans l’armurerie pour réfléchir à la nouvelle stratégie que j’ai à lui proposer.
Je suis contente de retrouver l’escalier là où je l’avais laissé. Un petit coup d’œil aux peintures et, oh ! C’est impossible, les personnages ne me dévisagent plus avec hostilité, mais avec agressivité ! Mon imagination se laisse entraîner par mon mal être.
Je retrouve avec difficultés la grande salle et examine les armes une par une, même si je sais déjà laquelle me conviendra le mieux. Les revolvers, pas la peine, je n’ai rien sur quoi m’exercer. Mitraillettes : trop embarrassant, trop bruyant. Un arc peut-être ? C’est volumineux aussi et il faut trimballer des flèches. À méditer cependant, car on n’est pas obligé d’être collé à la cible. Les couteaux sont petits et légers mais nécessite une certaine proximité avec les grogneurs. Une épée. Ou un sabre. C’est long, fin, léger, peu encombrant. Bon question distance, rien ne vaut les armes à feu. Je m’en approche et les observe sans oser y toucher.
— Tu as déjà pratiqué l’escrime ?
Je sursaute violemment. Matt est appuyé au cadre de la porte et me sourit ! Il n’est donc plus en colère ?
— Non. Tu m’en veux toujours ?
— Ce n’était pas ta faute. J’aurais dû savoir qu’ils pouvaient être cachés n’importe où. Et je n’aurais pas pu te défendre si tu t’étais approchée, ils étaient trop nombreux.
— Comment peuvent-ils se cacher ? Les zombies n’ont aucune intelligence, si ?
— Ce sont des malaformes, je te l’ai déjà dit. Quelqu’un les a enfermés là, s'impatiente-t-il.
— Tu as dit aussi que c’est une autre forme de zombies. En quoi sont-ils différents ?
— Un zombie se nourrit de chair humaine. Pas un malaforme.
- Et… ?
Son visage s'assombrit, il trépigne.
— Je n’aurai pas dû en parler. Considère que ce sont des zombies. Le résultat est le même.
— Pourquoi ? J’ai eu l’occasion d’en voir de près, je te rappelle ! J’ai aussi vu leurs…
— Stop ! C’est un terrain trop dangereux. On en parlera au moment opportun. Il y a des oreilles indiscrètes qui trainent parfois et qui n’ont pas besoin de savoir. Toi non plus d’ailleurs ! Pour l’instant.
Mes questions l’agacent. Pourquoi refuse-t-il de m’expliquer ? Croit-il que je ne supporterai pas ses révélations ? Depuis que ce fléau est apparu, j’ai vu bien des choses intolérables.
Je préfère néanmoins ne pas le harceler. Il finira peut-être par parler. Quand il sera prêt. Ou pas.
— Serait-il possible que je t’expose mon idée sans que tu m’interrompes et surtout sans que tu te fâches ? S’il te plait, imploré-je, les mains jointes en prière un sourire sur les lèvres.
— Pas ici. Viens.
Je le suis dans son étrange et immense maison aux multiples apparences. De l’extérieur, elle ne parait pas contenir plus de cinq chambres pourtant ! Nous finissons par atteindre un étage qui normalement devrait se trouver sous le toit. J’ai compté quatre étage alors que dehors je n’en ai vu que deux…
J’entre dans une chambre dont il referme la porte, sans bruit, derrière moi. Mon cœur cogne à en faire exploser ma poitrine. Pourquoi cette pièce ?
— Ma chambre, se croit-il obligé de préciser.
Je recule, prise de panique, sans cesser de le surveiller alors qu'il s’éloigne vers une autre porte.
Je suis prise au piège ! Je réfléchis à toute vitesse, des centaines d’images me traversent l’esprit. Il ne va pas me violer, pas le genre. Il est l’un d’eux ! Un zombie ! Non un mala… un malaforme ! Et s'il était leur chef ?
Je respire à nouveau quand il ouvre l’autre passage, et me fait signe d’approcher, d’un air amusé. Je pénètre dans la pièce avec méfiance.
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