Sur les Mers de Paris 3
L’astéroïde ne bougeait plus, la tempête avait rendu le navire si instable que chacune des vaguelettes heurtant la coque agissaient tels des coups de fouet sur toute la structure. Le vent était maintenant presque inéxistant et, de toute façon, les voiles trouées de toutes parts laissaient passer le moindre souffle téméraire.
Tout l’équipage était sonné, le moindre effort alors qu’ils étaient affamés s’avérait déjà être une souffrance en soi, la tempête avait, pour la plupart, fini de les achever. Le capitaine, en revanche, loin d’avoir été secoué par ce maelstrom, se trouvait déjà debout, il avait un trésor à aller chercher.
Par chance, l’ouragan les avait rapprochés de leur objectif. À première vue, il estimait avoir parcouru la moitié du chemin, rien qu’à la force du vent. Le soleil était maintenant à peine plus haut que la ligne d’horizon ,et le peu de luminosité qu’il donnait, laissait apercevoir la tour de fer en ombre chinoise. Le sommet de la pyramide quant à lui, n’était plus visible, mais avec le soleil et la tour, le capitaine savait quand même dans quelle direction ils devaient aller. Si seulement ils possédaient un moyen d’avancer sur ces eaux devenues beaucoup trop calmes.
Le capitaine envoya l’un de ses matelots, celui qui lui semblait le moins faible, détacher la voile avant du bateau, celle qui semblait la moins abimée. Entre temps, avec deux autres, ils s’ affairèrent à démonter une partie du pont suffisamment grande pour leur servir de radeau de fortune. Ils prirent quelques planches supplémentaires qui feraient office de rames. Sur un mat improvisé, ils placèrent le morceau de voile, le plus grand possible sans le moindre trou. Le résultat n’était pas terrible, mais suffisant selon le capitaine pour atteindre la pyramide. Le radeau, rapidement rebaptisé « la tortue » à cause de sa forme, ne pourrait tout au plus supporter que quatre personnes. Le capitaine faisait naturellement partie de ce nouvel équipage restreint et choisit les trois matelots les plus vaillants, ceux qui l’avaient aidé pour la construction de leur nouveau bâtiment : Floyd, Piers et Conrad.
Le soleil avait depuis longtemps quitté l’horizon et le faible croissant de lune ne permettait pas de voir très loin. Le choix ne fut pas facile à prendre, mais la raison l’emporta, il allait falloir attendre le lendemain pour mettre le radeau à flot.
Le lendemain, le soleil à peine sortit de l’eau, le capitaine s’affairait déjà sur le pont, ses trois compagnons, un peu moins motivés et surtout très faibles, vérifiaient que leur plateforme de fortune était suffisamment solide pour leur périple.
L’embarcation flottait maintenant juste à côté du bateau, les quatre explorateurs, seulement armés de leurs rames, s’en allèrent dans la direction que leur indiqua le capitaine en toute confiance. Seul celui-ci avait eu l’occasion d’apercevoir la pyramide du haut de la Tour de Fer, les trois marins ne voyaient autour d’eux que de l’eau et l’Astéroïde devenir de plus en plus petits. Tous étaient très fatigués mais, le capitaine, par la simple motivation de trouver ce trésor, tenait le coup et encourageait ses compagnons.
Au bout de ce qui leur parut plusieurs heures, le capitaine les fit stopper tous mouvements. À quelques mètres à bâbord, un reflet avait attiré son attention, un reflet différent de ceux au sommet des vaguelettes de cette vaste mer. Après quelques minutes de pause bien méritées, le capitaine leur ordonna de virer sur la gauche et de ramer encore plus vite qu’avant.
Le choc fit trembler toute l’embarcation et manqua de faire tomber Piers dans l’eau froide. Enfin, ils y étaient, le haut de la pyramide se trouvait là, juste à côté d’eux. De ses quelques mètres au-dessus du niveau de l’eau, elle en imposait, le capitaine, la trouvait déjà majestueuse, il n’osait à peine l’imaginer du temps où ces terres n’étaient pas encore inondées.
Le monument était constitué d’une armature en acier qui supportait tout un ensemble de vitres dont les sels marins avaient eu raison de la transparence. Mis à part cela, la pyramide ne semblait pas avoir outrageusement subi les dégâts du temps.
Le capitaine, en complète admiration devant cette nouvelle île artificielle, ne pouvait s’empêcher de la regarder malgré les nombreux reflets du soleil sur sa surface lui brulant les yeux. Les trois matelots, plus pragmatiques, s’inquiétaient de la suite, ayant atteint leur objectif selon la carte de leur chef, que devaient-ils faire maintenant ?
Un nuage masqua le soleil et tous les quatres en profitèrent pour enfin admirer sans crainte le monument. Ce fut Conrad qui repéra la seule porte d’entrée: le sommet. La pointe de la pyramide était absente, laissant à sa place, un trou net, le verre et l’acier avait été coupé, et visiblement, pas de manière naturelle, seule la main de l’homme, ou éventuellement une machine, pouvait donner un tracé aussi régulier. Restait, maintenant, une seule inconnue : comment grimper là-haut? La tour de fer avait l’avantage d’être creuse, la tour de verre, elle, ne laissait aucune prise.
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