Chapitre 5
Léo et Jules quittèrent la cabane, un sentiment lourd pesant sur leurs cœurs. Le vent s'était levé, soufflant à travers les arbres de la forêt, comme un murmure pressant, un avertissement venant des profondeurs mêmes de la terre. Ils savaient maintenant que la malédiction du manoir n'était pas seulement un fantôme du passé, mais une force bien vivante, qui attendait leur retour, prête à tout pour se nourrir.
Le chemin du retour vers le manoir fut encore plus éprouvant que la première fois. La forêt semblait se refermer sur eux, les arbres se courbant et se tordant comme des bras tendus, cherchant à les retenir, à les éloigner de leur destin. Chaque pas résonnait dans le silence, et à chaque bruit, Léo et Jules sursautaient, leur regard scrutant les ombres grandissantes autour d’eux.
"Ça me fait froid dans le dos," murmura Jules en serrant sa veste autour de lui. "Je sens que quelque chose ne va pas. Ce n'est pas juste la peur... c'est comme si la forêt elle-même était contre nous."
Léo hocha la tête sans répondre. Il avait la même sensation. Une sensation que le manoir, ou quelque chose qui l’habitait, les observait déjà, les attendait. Leur sœur, Éloïse, leur avait dit de vivre pour elle, mais en y réfléchissant, Léo ne savait plus s’ils avaient encore une chance de s'échapper. Chaque second semblait les faire glisser un peu plus dans l’inconnu, un piège dont ils ne pourraient jamais sortir.
Après des heures de marche dans la forêt, le manoir se dessina enfin devant eux. Il était là, dans toute sa majesté sinistre, ses fenêtres noires comme des yeux aveugles et les murs recouverts de lierre. Une brume étrange, noire et épaisse, s’élevait du sol, comme une mer de ténèbres prête à les engloutir à tout instant. Mais ils n’avaient pas le choix. Ils devaient y entrer.
Léo se tourna vers Jules avant de franchir les portes, son regard empli de détermination. "Rien ne sera comme avant. Nous devons aller au cœur du manoir. Tout ce qu’on a vécu... ce n’était rien comparé à ce qui nous attend à l’intérieur."
Jules hocha la tête, le visage marqué par la peur, mais aussi la compréhension. Ils ne pouvaient plus reculer. Leur sœur, leur famille, les âmes piégées, tout cela les avait menés à ce moment. La confrontation était inévitable.
Ils poussèrent la porte du manoir, qui s’ouvrit dans un grincement sinistre. L’intérieur était aussi dévasté que la dernière fois, mais quelque chose avait changé. L’air était lourd, saturé d'une énergie palpable, une force noire qui semblait s’infiltrer dans chaque recoin du bâtiment. Léo et Jules avancèrent prudemment, leurs pas résonnant dans le silence oppressant.
Ils atteignirent la grande salle, là où tout avait commencé. La salle circulaire, avec ses sièges en pierre, semblait figée dans le temps. Le puits sombre au centre avait changé, mais son apparence ne faisait qu’intensifier la peur. Des formes mouvantes, des ombres qui se tordaient et se redressaient, semblaient se battre pour échapper à l’emprise du puits. Mais ce n’étaient pas des âmes perdues. C’étaient des ténèbres, pures et terrifiantes.
"Il est là," murmura Léo, les yeux rivés sur le puits. "L’entité... elle attend."
Ils s’approchèrent avec précaution, mais alors une voix profonde, rauque, se fit entendre derrière eux, brisant le silence :
"Vous êtes revenus... mais vous n'êtes pas venus pour fuir. Vous êtes venus pour mourir."
Les deux garçons se retournèrent vivement. Une silhouette sombre, dont les contours se fondaient dans l’obscurité, se tenait dans l'ombre. Une silhouette imposante, au visage flou, à la présence dévorante. L’entité elle-même, incarnée dans le manoir.
"Vous avez libéré mon pouvoir," dit-elle d'une voix qui semblait se faufiler dans leurs esprits, déformée, pleine de menace. "Mais vous avez oublié une chose, enfants : l’ombre ne meurt jamais. Elle se cache, elle attend, elle se nourrit."
Léo s'avança d'un pas, ses poings serrés. "Ce n’est pas vrai ! Nous pouvons encore te détruire. Nous pouvons arrêter tout ça."
La silhouette se mit à sourire, un sourire sans chaleur, glacial. "Tu crois que tu peux me détruire ? Tout ce que vous avez fait jusqu’à présent n'a été qu'un piège. Vous avez libéré un corps sans âme. Et maintenant... je vais prendre ce que j'ai toujours voulu."
À ces mots, la brume autour du puits se leva, formant un tourbillon de ténèbres. L’entité s’éleva lentement, ses yeux rouges brillants dans l'obscurité, fixant Léo et Jules d’une intensité terrifiante. Un froid glacial envahit l'air, comme si la température même de la pièce avait chuté à zéro.
"Fuyez, vite !" cria Léo à son frère. Mais les ténèbres se resserraient autour d’eux. Chaque pas qu'ils faisaient semblait plus lourd, plus difficile. Le manoir tout entier semblait s’ouvrir sous leurs pieds, comme une gueule béante prête à les engloutir.
Jules, dans un élan de panique, se précipita vers le puits, son regard déterminé. "Si c’est là que tout a commencé, c’est là que ça doit finir !"
Léo se tourna vers lui, les yeux remplis de terreur. "Non, Jules, attends ! C’est trop dangereux !"
Mais son frère ne l’écouta pas. Il se pencha au-dessus du puits, les bras tendus, prêt à faire ce qu’il fallait. Le vent autour de lui se haussait en bourrasques, et les ombres semblaient vouloir l’avaler tout entier.
"Jules ! Non !" Léo s’élança vers lui, mais c’était trop tard.
Une lumière intense jaillit du puits, aveuglante, et un cri perça l'air, un cri de douleur et de colère. La brume noire s’éteignit soudainement, emportée par une explosion de lumière pure, et le manoir tout entier sembla trembler. Les murs se fissurèrent, les pierres se désintégrèrent, et la voix de l’entité se fit entendre une dernière fois, emportée dans un hurlement de rage.
"Ce n’est pas fini…"
Puis tout devint calme.
Léo se retrouva seul, la pièce plongée dans un silence absolu. Il se précipita vers le puits, mais il n'y avait plus de tourbillon, plus de ténèbres. Seuls les vestiges du manoir en ruine restaient. La malédiction semblait brisée, mais à quel prix ? Il s’agenouilla au bord du puits, les larmes coulant sur ses joues. Son frère était là, avec lui, mais le silence de la pièce ne pouvait atténuer la douleur dans son cœur.
Jules était sauvé, mais ils étaient seuls. Le manoir était détruit, l’entité disparue. Mais dans la profonde solitude qui les enveloppait, Léo savait que la lutte contre les ténèbres était un combat sans fin. Un combat que leurs ancêtres avaient mené, et qu'ils avaient hérité.
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