14 Décembre, Chloé
A.R
Mon programme du jour a été concocté par Marie Noëlle, mère. Première étape, nous nous rendons dans les ateliers des lutins pour nous assurer des avancées des paquets. Les jouets sont fin prêts, dans quelques jours ils rejoindront les chaussons au pied des sapins multicolores. Avec mon père, pour rien au monde nous aurions négligé sa confection. Chaque année, une boule venait rejoindre la bande des copines dans la boîte à chaussures. Nous aimions flâner dans les allées des marchés artisanaux pour dénicher la perle rare qui la rendrait unique dans notre capharnaüm. Pour nous, hors de questions de respecter les codes. La dernière en date, nous l’avions choisie lors de notre virée à Strasbourg. Pour l’occasion, nous avions pris un congé de trois jours, fait rare pour être signalé. À un mois de la retraite, mon père voulait m’offrir cette virée. Nous avons déambulé du petit matin à la tombée de la nuit, furetant dans tous les stands. Nous avons observé la foule, questionné les marchands, goûté les produits, le vin chaud et les marrons avaient un parfum différent. D’après mon père un petit goût de reviens-y. Je le regardais avec attention, la fatigue de ses derniers mois s'était estompée avec le froid vivifiant et l’alcool avait fait peu à peu son effet. Il était heureux, tout simplement. Nous avon eu un coup de foudre pour la boule en verre, la jeune femme dessinait le décor à la demande. Nous sommes restés scotchés devant son talent.
- Chloé, récupère ton manteau, nous sommes attendus pour le déjeuner, m’annonce Marie Noëlle en appuyant sur mon épaule.
- Oh pardon, je n’ai pas vu le temps passé, m’excusé-je aussitôt.
- Rassure-toi, Gabriel semble avoir apprécié ta compagnie, selon ses dires, tu es très douée pour emballer les cadeaux.
- Je me suis bien amusée, avoué-je sentant mes joues s’empourprer, flatté du compliment.
Deux rênes et un traîneau nous attendent sur le pas de la porte, je glisse mes mèches dans mon bonnet et enfile mes gants avant de prendre place. La mère Noëlle est à son aise, experte, elle conduit d’une main de maître son équipage. Elle est l’image de la mère que j’aurai voulu connaître. Derrière son tempérament de feu se cache une femme bienveillante. Quelques soient ses exigences, elle est toujours juste. Pendant le trajet, je profite de chaque carte postale qui s’étale sous mes yeux. Nous nous éloignons de la foule qui se presse pour visiter le village du père Noël et entrons dans la forêt. La nature reprend la place qu’elle mérite, des flocons sont tombés dans la nuit et recouvrent le sol d’un manteau douillet. Les températures ont chuté, je me cale sous les couvertures aux premiers frissons. Je me demande quelle sera notre destination finale mais j’apprécie énormément le voyage.
Après une demi-heure sur les pistes vierges, nous arrivons devant un grand portail en fer forgé. Je peux apercevoir au fond de l’allée, une grande maison en bois, d’où s'échappe un doux fumet. Sur le seuil, un groupe d'enfants chantonne un petit air de fête. J’ai le sentiment d'entrer dans un de mes contes d’enfants. Depuis mon arrivée, le dépaysement est total. Que ce soit Joël, Marie Noëlle ou leur mère, chacun prend soin de ma personne.
- À table, lance la petite brunette dans sa robe de velours vert.
- Avec plaisir, je meurs de faim, réponds-je en applaudissant la chorale.
- Allez, rentrez vite vous mettre au chaud, entonnez une voix au loin.
- Chloé, je te présente Dame Tartine, notre cuisinière en chef et ses enfants.
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