Chapitre 8 (quatrième partie)

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Le lendemain…

- Allo, Jenn ? C'est Mummy.

- Bonjour, Mummy, tu vas bien ? répondit la jeune femme.

- Oui, ma fille, et toi ?

- Ca va.

- Je m'inquiétais de savoir si les garçons n'avaient pas été trop bruyants cette nuit ? demanda encore la vieille dame.

- Ah, disons que... ils ne m'ont pas réveillée, je ne peux pas le dire... mais je les ai trouvés au petit matin, pas très frais ! précisa Jenn. Mickaël est bien rentré ?

- Oui, et je n'ai pu qu'adhérer à la décision de Maureen de le renvoyer dormir, dit Mummy.

- Il a "oublié" une bouteille... de chez Meg, dit Jenn en riant légèrement.

- Grossière erreur...

- Je le pense, dit Jenn en souriant. Papa a déjà dit qu'il serait curieux d'y goûter... et que ça compenserait fort bien le fait que Sam ronfle comme une locomotive ! Pour ma part, je peux simplement dire qu'ils ont eu une bonne descente ! S'ils doivent fêter ainsi la naissance de mes bébés dans quelques mois, je saurai à quoi m'attendre !

- Ne le savais-tu pas ? demanda Mummy avec malice.

- Je dois avouer que si ! J'espère que Maureen n'en a pas pris ombrage... s'inquiéta cependant la jeune femme.

- Non. Heureusement qu'ils ne rouvrent que demain soir...

- Je suis bien d'accord. Sam dort encore, il ne s'est pas vraiment réveillé. Il n'a pas entendu Micky partir, ajouta Jenn.

- Je vois... Bien, maintenant que j'ai pris de leurs nouvelles, comment vas-tu, toi ? demanda Mummy.

- Ca va. Je tiens le coup. Je dois repasser une échographie la semaine prochaine. Je vous tiendrai au courant.

- Je veux bien, et Maureen aussi. Si le temps se met au beau, auras-tu envie de venir faire une petite promenade avec nous ? proposa Mummy. Maureen pensait qu'on aurait pu aller un peu sur le bord de mer.

- J'en serai ravie ! s'exclama Jenn. Je vous dirai ce qu'il en est, mais je me sens bien, je veux pouvoir en profiter tant que c'est possible.

Mummy parla encore un peu avec la jeune femme, puis raccrocha. Elle rejoignit Maureen dans la cuisine, qui préparait une soupe pour le soir et lui dit :

- Jenn va bien. Les garçons ne l'ont pas empêchée de dormir, m'a-t-elle assuré.

- Bon, ça va... Je le craignais un peu... Est-ce que John va bien ? demanda Maureen.

- Oui, aussi. Il n'a pas paru effrayé de trouver Mickaël endormi sur le canapé, ce matin, en se levant. Si mon beau-père avait été là, je pense que les oreilles de Mickaël auraient chauffé ! dit Mummy en levant les yeux au plafond.

Maureen sourit. Elle demanda :

- Il était si terrible que cela, Donan, Mummy ?

- Ah, ça... Il ne fallait pas lui en conter. Il avait la tête dure. Solide comme un roc... et pourtant, c'est lui qui est parti le premier. Mais il savait tenir son verre, aussi, reconnut Mummy.

- Il appréciait les bons whiskys ?

- Il n'avait pas autant de choix que ce que l'on peut trouver aujourd'hui. Disons qu'on ne bougeait pas beaucoup. Aller jusque dans la vallée de la Spey était bien le plus loin que l'on pouvait, sur une journée. Quand Steven et moi, nous nous étions rendus jusque sur Mull, une fois, tous les deux, il était très heureux qu'on ait pensé à lui ramener une bouteille de là-bas. Sûr qu'il savait apprécier le whisky, mais je pense que Mickaël pourrait le surprendre, s'il était encore là, dit Mummy en souriant.

- Surprendrait-il aussi Mémé Fine ? demanda Maureen.

Mummy sembla réfléchir un instant avant de répondre :

- Oui. Oui, vraiment. Je crois que, comme moi, elle apprécierait de goûter à ses préparations. Et elle serait très heureuse qu'il fasse toujours le flan aux œufs comme elle le faisait. Je crois vraiment que cela lui ferait très plaisir.

- Elle était plus effacée que Donan ? questionna encore Maureen, heureuse d'entendre Mummy évoquer ses beaux-parents.

- Oh, non ! s'exclama Mummy. Elle tenait bien les rênes de la maison, il ne faut pas croire. Et je pense qu'elle n'avait pas peur de lui. Autant, moi, je le craignais toujours un peu, surtout quand il se mettait en colère. Il pouvait être très impressionnant, même si je savais que ses colères ne duraient pas, et qu'une fois qu'il avait dit ce qu'il avait à dire, il redevenait calme. Mais il fallait avoir du caractère, tu sais, petite, pour tenir la ferme. Autant pour un homme que pour une femme. L'un ne pouvait tenir debout sans l'autre... Donan assurait auprès des bêtes, les menait dans la montagne, organisait la tonte, l'abattage. Il était debout dès qu'une mère allait agneler, pour veiller. Jamais je ne l'ai vu laisser une brebis faire naître son petit sans être à ses côtés. Il aimait ses animaux et en prenait soin. Mais Finella dirigeait toute la maisonnée. Elle répartissait les tâches entre les filles et moi, puis avec Elaine aussi. Elle aussi, à sa façon, veillait à ce que tout son petit monde se porte bien ! Nous avions tous besoin des uns et des autres, pour le travail de la ferme, pour nourrir les hommes, s'occuper des enfants quand ils sont arrivés. Même si Mary et Kathleen n'ont pas élevé leurs enfants ici... de temps, en temps, nous avions l'un des petits à garder.

- Il y a toujours eu des enfants dans cette maison, n'est-ce pas, Mummy ? fit Maureen avec tendresse.

- De ce que j'ai connu, oui, sauf quand Ingrid est partie... et que nous n'étions plus que nous quatre, puis nous trois, après le décès de Donan, répondit Mummy. Sauf pendant les vacances, bien entendu. Mais sinon, oui, je peux imaginer qu'il y a toujours eu des enfants. Quand Steven et ses frères et sœurs étaient petits, cela faisait une belle famille ! Les parents de Finella étaient encore avec eux, aussi. Et le père de Donan, également, bien sûr.

- J'aime cette idée que plusieurs générations ont toujours vécu sous le même toit, vous savez, dit Maureen avec douceur.

- On vivait ainsi, quand j'étais jeune, répondit Mummy. Mais quand même, aujourd'hui, ça ne se fait plus. Peut-être qu'un jour, Mickaël et toi, vous aurez envie de vous rapprocher de Fort William.

- Peut-être, répondit Maureen d'un ton vague. Mais pas pour le moment, c'est certain. Je me plais beaucoup ici, Mummy. Je ne m'ennuie pas du tout ! Même si Killian n'était pas là, je crois que je ne m'ennuierais pas !

Mummy sourit, puis se tourna vers un de ses placards.

- Bon, soyons sérieuses. Je vais préparer de quoi remettre les idées au clair à Mickaël...

Et bien vite, une bonne odeur de tarte aux pommes remplit la cuisine, et quand le jeune homme émergea enfin, il put aussi humer le parfum doux d'un thé léger.

Quelques jours plus tard…

Trois silhouettes avançaient lentement sur la grève. Cet après-midi-là, le vent s'était levé, avait chassé les nuages qui s'accrochaient encore aux pentes toujours enneigées du Ben Nevis. Petit à petit, la neige fondait, mais de grandes étendues couvraient encore les sommets alentours. Au bord du loch, cependant, le vent était doux et un franc soleil réchauffait l'air. Si les trois femmes marchaient lentement, c'était que l'une était âgée et avançait avec précaution. La deuxième portait bien en avant un ventre déjà rond, au point qu'on aurait pu la croire proche de l'accouchement. Quant à la troisième, elle tenait devant elle, dans un sac approprié, un bébé de six mois environ.

Elles avaient prévu une promenade pas trop difficile, sur le sable encore humide de la dernière pluie du petit matin. Il leur était plus aisé d'y cheminer. Après une petite heure de marche, alors qu'elles revenaient tranquillement vers la voiture, Mummy dit :

- N'es-tu pas trop fatiguée, Jenn ?

- Non, ça va, répondit la jeune femme en souriant.

- Et si nous allions de l'autre côté ? Prendre un apple-pie et un thé, dans le pub qui donne sur le quai ? proposa Mummy.

- Vous voulez qu'on traverse avec le bac, Mummy ? demanda Maureen.

- Oui, pourquoi pas ? Il est tôt encore. Tu pourras nourrir le petitou là-bas, ajouta la vieille dame.

- Hum, c'est vrai. Vous voulez que nous allions au même endroit que l'an dernier ? Quand on avait fait la balade avec vous ? demanda encore Maureen.

- Oui, exactement, répondit Mummy. J'aime bien cet endroit. On a vue sur le loch et le massif.

- Jenn ?

- Je suis partante, je me sens capable de faire la traversée. Et Mummy a raison : là-bas, ils font un apple-pie délicieux, répondit-elle.

Elles regagnèrent alors la voiture, Maureen installa Killian dans son petit siège, à l'arrière, aux côtés de Jenn. Puis elle prit le volant et conduisit jusqu'au bac. Elles n'attendirent pas longtemps qu'un bateau se présente et purent traverser l'étendue calme du Loch Linnhe. De l'autre côté, elles trouvèrent rapidement le pub et s'y installèrent. Killian regardait avec curiosité tout autour de lui, offrant quelques sourires à la ronde.

- Il est bien sage, dit Jenn. On ne l'entend pas !

- C'est un bébé calme, dit Mummy. Il est facile à garder ! Maintenant qu'il est un peu plus grand et que sa maman s'absente parfois, je n'ai aucun mal avec lui !

- Quand penses-tu cesser de l'allaiter, Maureen ? demanda Jenn.

- Durant l'été, certainement. Pour l'heure, c'est facile et cela se passe bien. Je n'ai pas de raison d'arrêter, dit Maureen.

- Je ne sais pas si je pourrai nourrir deux bébés... soupira Jenn. Ce sera certainement difficile. Enfin, c'est ce que j'imagine !

- Tout dépendra aussi dans quel état tu te trouves après l'accouchement. Si tu es fatiguée ou pas, si tu récupères vite ou pas... la rassura Maureen.

- Si j'ai une césarienne, je récupèrerai peut-être assez vite. Mais s'ils naissent par voie basse... J'aimerais les allaiter un peu, quand même. A te voir faire, je trouve que c'est très pratique ! Pas besoin de préparer des biberons ou de devoir rentrer pour une certaine heure ! Au pire, si tu es en promenade, tu peux l'allaiter à l'abri, même dans la voiture... fit remarquer la future maman.

- C'est vrai. C'est un avantage pour cela. Et maintenant, c'est devenu presque une routine ! fit Maureen.

- En tout cas, il profite bien, dit Jenn d'un ton admiratif. C'est vraiment un beau petit bébé. Je ne dis pas cela pour te faire plaisir !

- Je sais que tu le penses vraiment, sourit Maureen.

A ce moment-là, on leur apporta leurs commandes. Le thé était très bon, et Mummy savoura ses premières bouchées d'apple-pie avec un regard gourmand qui ne fut pas sans rappeler celui qu'elle avait eu au restaurant d'Harris, quand Maureen y avait dîné avec elle et les parents de Mickaël, pour son anniversaire, il y avait presque deux ans.

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