Chapitre 8 (cinquième partie)
Mai 2007
Avril avait apporté enfin douceur et belles journées ensoleillées. Les averses avaient fait fondre les dernières traces de neige et, à la fin du mois, on commença à distinguer le sommet du Ben Nevis. Seuls les versants au nord allaient garder encore durant quelques semaines traces de l'hiver. Avec la douceur revenue, Mummy se remit au jardin. Mickaël passait quelques heures, chaque jour, à l'aider en faisant le gros des travaux. Car la vieille dame avait bien l'intention de faire son potager, comme tous les ans. Maureen l'y aidait, laissant Killian dans son transat. Le petit garçon semblait observer avec beaucoup d'attention sa mère et son aïeule.
Mai confirma les bonnes dispositions printanières d'avril et, bien vite, les deux femmes et le bébé purent passer de longues heures au jardin. Elles s'installaient soit sur l'arrière de la maison, à l'abri du vent d'ouest, soit, quand il ne soufflait pas, sur le devant. Mummy veillait à ses arbustes, coupait les branches que l'hiver avait laissées mortes. Maureen l'aidait en taillant la haie, ce qui était désormais trop difficile pour la vieille dame. Les deux pommiers étaient en fleurs et Mummy raconta à Maureen que l'un d'entre eux venait de Normandie.
- Mon frère l'a greffé et, une fois, nous sommes revenus avec un jeune arbre dans la voiture. Les douaniers nous ont regardés d'un drôle d'air… Steven avait été raisonnable : il ne ramenait qu'une bouteille de Calvados, encore bien fermée. On avait le droit de la passer.
- Il n'avait pas pris de gniole ? s'étonna Maureen.
- Pas cette fois, répondit Mummy avec malice. Il préférait être prudent… A l'époque, ça ne rigolait pas ! Je suis bien contente d'avoir cet arbre, car il donne les fameuses petites pommes rouges que Steven aimait tant…
Maureen sourit à cette évocation. Elle savait pertinemment à quoi Mummy faisait allusion : les petites pommes avaient la même couleur que ses joues, selon Steven. Et c'étaient de ces pommes qu'il avait gardées précieusement durant la campagne de Belgique, à l'automne 44.
Mais déjà Mummy changeait de sujet :
- Je suis contente qu'Ingrid et Henry viennent la semaine prochaine avec la pitchoune. Et que Véra et Jimmy passent aussi pour quelques jours. Cela fait long depuis Noël !
- C'est vrai, reconnut la jeune femme. Vous savez, Mummy, maintenant que Killian est un peu plus grand, je pourrais vous emmener à Glasgow, pour quelques jours d'ici l'été, si vous voulez.
- Ca fait un long voyage... dit Mummy.
- Juste deux heures de voiture. Pas plus que la dernière promenade que nous avons faite avec Mickaël pour aller voir Al et Meg, fit remarquer Maureen qui s'attendait bien à une hésitation de la vieille dame devant sa proposition.
- Moui... On verra... Mickaël aura peut-être besoin de toi, aussi, fit encore Mummy.
- Il peut rester quelques jours sans que je fasse les comptes. Et puis, je peux vous emmener et Ingrid et Henry vous ramèneraient, à l'occasion. Cela vous permettrait de passer un peu de temps avec eux et de profiter plus de Léony, précisa Maureen.
- Tu ne t'ennuieras pas toute seule, ici ? s'inquiéta Mummy.
- J'aurai Killian. Et j'irai voir Jenn de temps en temps. Ne vous souciez pas, sourit Maureen.
**
Avec patience, mais aussi une insistance régulière, Maureen parvint ainsi à décider Mummy à se rendre pour quelques jours à Glasgow. Léony repartit avec ses parents, les deux femmes et Killian profitèrent de la voiture d'Ingrid et Henry. Elles s'installèrent chez eux pour ces quelques jours. Maureen était contente finalement de revoir Glasgow, qu'elle avait quittée un an plus tôt. Ni Mickaël, ni elle n'avaient eu l'occasion d'y revenir depuis leur installation à Fort William. Quant à Ingrid et Henry, ils étaient ravis de pouvoir profiter de leur petit-fils un peu plus longtemps et Ingrid fit plusieurs fois remarquer à sa mère que Maureen avait eu une excellente idée que de proposer ce petit séjour. Ce à quoi, Mummy répliqua qu'elle avait bien compris la manœuvre et la remarque de sa fille pour la faire revenir à l'occasion. Et Ingrid lui répondit que c'était la stricte vérité.
L'après-midi, au cours de ces quelques journées, quand le temps le permettait, Maureen sortait avec Killian et se rendit au parc de Kelvingrove, mais aussi, avec Mummy, au "palais des thés". Elles avaient constaté que certaines boîtes de thés de Mickaël étaient quasiment vides et elles refirent de larges provisions. Mark et Daisy les accueillirent avec plaisir et furent ravis de faire la connaissance de Killian. Mickaël n'avait pas manqué de leur envoyer un faire-part de naissance et, avant Noël, alors qu'elle passait à la boutique, Ingrid leur avait montré quelques photos. Mais voir le petit garçon était encore plus réjouissant.
Le mercredi soir, Maureen confia Killian à Véra - Léony était enchantée de "garder" son petit cousin - pour accompagner ses beaux-parents et Mummy au restaurant, chez Harris. Elle revit avec plaisir l'ancien patron de Mickaël et Sam, heureux lui aussi de les recevoir. Il ne manqua pas de demander de leurs nouvelles et promit de venir les voir durant l'été, sachant qu'ils ne fermeraient pas le restaurant de toute la saison touristique. Il demanda cependant à Maureen la possibilité de revenir le lendemain, car lui et sa femme étaient curieux de voir le petit Killian. Mickaël leur avait adressé à eux aussi un faire-part de naissance avec une photo et Maureen promit de repasser dans la journée, avant que l'équipe ne prenne son service. Elle se sentit touchée de l'intérêt que manifestait le couple pour elle-même et son enfant, et indirectement pour Mickaël et Sam.
Ces quelques jours à Glasgow passèrent vite et Maureen reprit la route de Fort William, avec son fils, par le train. Mummy restait un petit peu plus longtemps afin de profiter de Léony, mais Mickaël commençait à s'ennuyer de sa petite famille. Maureen ne voulait de toute façon pas s'absenter trop longtemps. Elle prit grand plaisir à voyager par le train, trouva cela très facile, même avec le bébé. Elle put aussi admirer des paysages qu'elle connaissait bien maintenant, mais de façon différente de par la route. Elle se souvint que Mummy lui avait raconté qu'elle voyageait beaucoup par le train quand Mickaël et Véra étaient petits, puis, aussi, après le décès de Steven, quand elle se rendait alors encore fréquemment à Glasgow. Maureen se dit qu'à l'occasion, elle reprendrait certainement ce moyen de transport pour permettre à Ingrid et Henry de voir plus souvent leur petit-fils.
Mickaël les attendait à la gare, pour les ramener à la maison avant de commencer sa journée, au restaurant. Il serra longuement Maureen contre lui, avant de prendre son fils dans ses bras et de le câliner.
- Vous m'avez manqué, dit-il en souriant à Maureen.
- Toi aussi, répondit-elle avec tendresse.
- Je suis content, cependant, que tu aies été à Glasgow. Mummy n'y serait pas allée, sinon… ça aurait été dommage, fit remarquer Mickaël. Il faut l'encourager à faire encore ce trajet, à l'occasion. Elle est toujours contente de s'y rendre, il faut juste la pousser un peu…
- Elle va bien. Elle a bien profité de Léony, et va en profiter encore ! sourit Maureen.
- Alors, c'est parfait.
Ils gagnèrent la voiture en devisant encore et, sur le chemin qui remontait vers la maison, Maureen demanda des nouvelles de Sam et de Jenn. Mickaël lui répondit :
- Ca va, mais Jenn fatigue vite. Elle commence à avoir du mal à se déplacer. Elle espère tenir le plus longtemps possible, mais le médecin lui a bien dit qu'elle accoucherait avant terme. Sam est sur les charbons ardents !
- Tu arrives encore à le supporter ? demanda Maureen avec malice.
- Oui ! rit Mickaël en réponse. Mais je m'attends aussi à son absence… Même si, pour l'heure, le médecin estime que la naissance n'aura pas lieu avant la fin du mois.
- Cela lui ferait accoucher avec un mois et demi d'avance... réfléchit Maureen à haute voix.
- Au plus court, oui. Un mois si... dit Mickaël en laissant sa phrase en suspens.
Maureen hocha la tête :
- Mummy sera rentrée de Glasgow. J'irai t'aider. Elle pourra garder Killian, au moins durant l'absence de Sam.
- On verra. Tout dépendra du jour de la naissance et comment ça se passe, dit Mickaël d'un ton serein.
- Jenn aura besoin d'aide aussi, après. Deux d'un coup… Déjà qu'avec un, les premières semaines, il a fallu trouver le rythme, alors deux… fit Maureen.
- C'est aussi parce que je travaille en décalé. Si j'avais eu des horaires normaux, ça aurait été plus facile, fit remarquer Mickaël.
- Pas forcément. Tu m'aidais bien, la nuit, en rentrant, lui rappela-t-elle.
Mickaël agréa. Ils arrivaient à la maison. Pendant que Maureen rangeait leurs affaires, il s'activa à réchauffer le repas qu'il avait préparé, puis il s'occupa de son fils. Ces quelques jours sans lui avaient été étranges pour Mickaël : il avait parfois l'impression de tourner en rond dans la maison toute silencieuse. A la fin du déjeuner, il le prit sur ses genoux et lui fit goûter quelques petits morceaux de fruits. Killian sembla apprécier.
- A Glasgow, je lui ai fait goûter d'autres purées, dit Maureen. J'avais mis du brocoli avec ses carottes, il a bien aimé. Et, un jour, ta mère a même trouvé des artichauts et on lui a mis les fonds, écrasés, il a adoré. S'il a autant de curiosité pour la nourriture que toi, ça promet !
- Il a intérêt à ne pas être difficile… Ce sera compliqué, sinon ! rit Mickaël alors que Killian ouvrait grand la bouche pour réclamer une nouvelle cuillérée.
- Il n'en prend pas le chemin, dit Maureen en souriant doucement. Si un jour tu peux ramener un filet de poisson, j'en mettrai aussi dans sa purée. J'aimerais bien commencer à lui en faire goûter.
- OK.
Puis Mickaël soupira :
- Bon, va falloir que j'y aille... Je dois vous abandonner, alors que je viens juste de vous retrouver... Profite bien de ton après-midi.
- Je vais terminer le rangement. Il y a des lessives à faire, non ? demanda la jeune femme.
- Heu, oui... ça, j'avoue, je n'ai pas trop mis le nez dans la panière de linge… répondit Mickaël d'un ton penaud.
- Je vais voir... Allez, file, sinon, Sam va t'attendre ! Et se plaindre d'être le seul à travailler… dit-elle en riant.
- Le pire est qu'il est vraiment capable de cela ! Tu le devines bien !
Il se leva, remit son fils dans son transat, puis enlaça Maureen et l'embrassa longuement.
- Hum... J'aimerais vraiment rester cet après-midi avec toi…
- A cette nuit, murmura Maureen contre son oreille. Ne traîne pas en route… mais sois prudent quand même !
**
Maureen fut réveillée dans la nuit par la porte de la maison s'ouvrant. Elle jeta un œil au réveil, qui indiquait près de minuit. Mickaël n'avait pas traîné ou peut-être avaient-ils eu une soirée assez calme. Elle ne tarda pas à l'entendre monter les escaliers, puis à gagner la salle de bain. Il ne la rejoignit pas tout de suite et elle devina dans un sourire qu'il s'était arrêté à la porte de la chambre de Killian, pour le regarder dormir. Le petit garçon ne se réveillait plus qu'accidentellement la nuit, surtout quand une dent le faisait souffrir, mais, pour l'heure, cela allait encore.
Enfin, il se glissa auprès d'elle et elle vint aussitôt se blottir contre lui. Un peu surpris, il dit :
- Je t'ai réveillée ?
- Non... pas vraiment. Tu arrives tôt ? s'étonna-t-elle.
- On a eu une petite soirée. En semaine, ça va encore… Hum… Tu m'as manqué, soupira-t-il en l'embrassant dans le cou.
- Toi aussi, répondit-elle en l'entourant de ses bras.
Mickaël ferma les yeux de bonheur. Il retrouvait sa douce, sa Maureen. Câline, un rien coquine cette nuit aussi, il lui avait manqué autant qu'elle lui avait manqué. Il l'embrassa doucement, alors que ses mains, déjà, cherchaient les recoins tendres et sensibles de son corps.
**
Ce fut avec un certain étonnement que Maureen constata ce matin-là que Mickaël ne se levait pas tôt pour passer au port. Elle s'en inquiéta, se demandant s'il n'avait pas oublié de se réveiller. Il grogna simplement :
- J'ai la permission de Sam de rester avec vous deux ce matin...
- Non ? fit-elle en ouvrant de grands yeux.
- Si... Il m'a dit que je devais profiter de toi et de Killian, qu'il s'occuperait de passer voir les pêcheurs et qu'il enchaînerait dans la foulée aux halles, dit-il.
- Et bien... quelle générosité ! sourit Maureen en se blottissant un peu contre Mickaël. On devrait en profiter avant que Killian ne se réveille.
- Tu n'en as pas eu assez cette nuit ? demanda-t-il d'un ton coquin en passant son bras autour de son épaule.
- Hum... non.
Et elle ponctua sa réponse d'un baiser profond et de caresses plus que suggestives.
Il fallait croire que Killian aussi était généreux avec ses parents, car il ne réclama sa tétée qu'à 8h passées. Mickaël se leva pour le sortir du lit, constatant une fois de plus que le petit garçon se tenait maintenant bien à quatre pattes. "D'ici peu, il va agripper les barreaux du lit, je sens ça… Ca va être un petit aventurier !"
- Allez, fripouille ! Debout ! Ta mère est prête, espèce de petit estomac sur pattes !
Killian lui répondit par un areuh et un grand sourire. Et Mickaël regagna leur chambre avec son fils dans les bras. Maureen les attendait, elle s'était calée contre les oreillers. Killian sourit aussi à sa mère alors qu'elle l'installait contre sa poitrine. Mickaël s'assit dans le petit fauteuil et s'appuya le menton sur une main, pensif. Les matins où il pouvait profiter de cette vision, de ce moment de partage, étaient rares et d'autant plus précieux pour lui.
- Tu vas partir pour quelle heure ? demanda Maureen.
- Seulement le début d'après-midi, répondit Mickaël. Et comme il fait beau, j'aimerais bien aller me promener un peu avec vous ce matin.
- Pas de soucis. Pour une fois que c'est possible... Tu nous prépares le petit déjeuner ? suggéra-t-elle.
- OK, répondit-il. Hum... qu'est-ce que je vais choisir pour ce matin ?
- Joyeux, répondit Maureen.
Mickaël la regarda un instant, un peu surpris, puis sourit et dit :
- Bonne idée. Cela donnera bien le ton de cette journée.
Pendant que Maureen se préparait, il s'occupa de Killian, le changea et l'habilla. Ils prirent ensuite tous les deux leur petit déjeuner, alors que le petit garçon jouait dans son parc. Puis ils sortirent et partirent se promener le long du Loch Leven. Maureen aimait beaucoup cet endroit, d'où il était possible d'admirer tout autant les contreforts de Glencoe que ceux du Ben Nevis. Pour Mickaël, l'endroit était aussi désormais très symbolique, puisque c'était là que Maureen lui avait fait ses plus secrètes confidences concernant sa vie passée, Brian et sa famille. Revenir en ces lieux était toujours pour lui l'occasion de mesurer le chemin que tous deux avaient parcouru depuis qu'il l'avait rencontrée. Cela renforçait aussi ses sentiments pour elle, sa certitude d'avoir trouvé la compagne qui lui correspondait, tout en espérant bien être un digne compagnon pour elle et, maintenant, un père aimant et présent pour Killian.
Il était encore possible pour lui de porter leur petit garçon devant lui et il ne se priva pas de ce bonheur. Tout en cheminant tranquillement bras dessus, bras dessous, et en admirant les lieux, la légère brume qui enveloppait encore les sommets, le soleil qui perçait déjà, Mickaël dit :
- Je suis heureux que chaque endroit que j'aime, par ici, me parle maintenant de toi, de nous deux. Et même de nous trois ! ajouta-t-il en souriant et en désignant Killian.
- C'est vrai ? Je veux dire... Tu m'as vraiment emmenée dans tous les endroits que tu aimes ? demanda la jeune femme.
- Oui, répondit Mickaël après un petit temps de réflexion. Bien entendu, nous pourrons toujours explorer un peu plus tel ou tel endroit, village, ou loch, mais tu en as vu déjà les plus symboliques, les plus beaux aussi. Et maintenant que nous sommes installés à Fort William, nous pourrons plus aisément aller sur les îles.
- J'avais aimé notre balade avec Lawra, John et Mummy, il y a deux ans. Mais aussi quand nous étions partis tous les deux sur les Hébrides, sourit Maureen.
- On y retournera, promit Mickaël. Mais pas cet été. En octobre, on verra… si on fait une bonne saison. Tout dépendra des touristes !
- A ce propos, il faudra que tu me donnes les notes et comptes de la semaine, que je les fasse demain, rappela la jeune femme.
- J'ai tout ramené hier soir. C'est sur la table de la salle à manger, dit-il.
- Oh, bien. Je m'en occuperai durant la sieste de Killian.
- Tout s'est vraiment bien passé à Glasgow ?
- Oui, bien sûr !
- Alors, raconte-moi...
Et Maureen raconta. Léony et Mummy, Ingrid et Henry ravis de revoir leur petit-fils, le dîner chez Harris, sa proposition de venir les voir, Mickaël et Sam, durant l'été. Elle lui dit aussi être repassée dans leur ancien quartier, avoir salué quelques voisins et connaissances, tout heureux de la revoir et de voir Killian.
- C'était lui, la petite vedette !
- Ca ne m'étonne pas… Je suis heureux que tu aies pu faire ce déplacement, aussi pour en profiter pour toi, dit-il.
- J'en ai profité, je te rassure, répondit Maureen. Et c'était vraiment gentil de la part de ta sœur de bien vouloir garder Killian pour que nous puissions aller chez Harris. Je suis repassée le lendemain, en tout début d'après-midi avec lui, pour le leur présenter, et cela leur a fait très plaisir. J'ai pu saluer Tony et Jonathan, aussi, qui arrivaient les premiers ce jour-là. Mais je ne suis pas restée après. Toute l'équipe allait bien, apparemment. Bon, je n'ai pas trop fait ma curieuse non plus, je ne voulais pas être indiscrète… surtout concernant ton remplaçant.
- Je suis content pour Jonathan, dit Mickaël. Il méritait d'avoir une bonne place, et comme il connaît toute l'équipe, c'est plus facile pour lui. Pour Harris, aussi, d'ailleurs.
- Oui. C'est ce que j'ai cru comprendre. En tout cas, on y mange toujours très bien, dit la jeune femme.
- Je ne vois pas Harris embaucher un chef qui aurait fait perdre de la valeur à son établissement, fit remarquer Mickaël. Mais c'est sûr que ça n'a pas dû être simple pour lui… Deux cuisiniers qui partent en même temps…
- Et surtout, le chef, glissa Maureen.
- Bah, le départ de Sam n'était pas simple, non plus, dit-il simplement.
- Ne fais pas ton modeste ! plaisanta Maureen.
- J'espère qu'on n'a pas fait une erreur, dit Mickaël, les sourcils froncés.
- Pourquoi penses-tu cela ? La semaine a été difficile ? s'inquiéta Maureen.
- Non, mais... parfois, j'ai des doutes, dit-il. Et j'ai peur de ne pas pouvoir assurer pour toi et Killian. Sans compter les pitchounes de Sam...
- Moi, je pense que vous y arriverez, dit-elle avec confiance. Il n'y a pas de raison. Vous avez déjà gagné le plus dur : vous faire reconnaître et apprécier par les gens d'ici. L'été, je suis certaine que cela marchera bien. Il y a toujours du monde à passer à Fort William, pour aller vers les îles, vers le Loch Ness… Tu me l'as dit souvent, que c'était la porte d'entrée des Highlands ! Regarde cet hiver, les touristes et vacanciers sont venus faire du ski, et vous avez bien tourné. Ce sera pareil cet été.
- Oui, logiquement, mais... Enfin, c'est sans doute parce que je ne me fais toujours pas à l'idée d'être mon propre patron, soupira Mickaël.
- C'est un changement important, aussi, dit Maureen. Au début, ça m'avait fait bizarre aussi quand je me suis lancée avec ma boutique. Ou plutôt, avant… J'avais des doutes sur mes capacités à m'en sortir. Mais en même temps, je n'avais pas le choix.
- Ton expérience en cela m'aide beaucoup, tu sais, dit Mickaël en la regardant un instant. Sans compter ton aide pour la comptabilité ! On n'y arriverait pas sinon, Sam et moi, on est des billes pour faire les comptes…
Maureen regarda sa montre et dit :
- Il ne faut pas qu'on tarde à revenir sur nos pas. Ton fils aura faim…
- Et c'est vrai que maintenant, il ne se contente plus d'une tétée ! C'est un sacré petit gourmand !
- Il a épaté ta sœur…
- Ah, oui ? Ma foi, j'en suis assez fier, alors !
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