Traque

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 La rampe est rugueuse et la peinture s'écaille sous ses mains entaillées. Il monte les dernières marches de ce building délabré et inanimé, le souffle fort. Il est toujours traqué, ça ne s'arrête pas. Ça monte sans effort ces parois de béton qui s'effritent sous chacun de ses pas. Voilà que son ascension s'achève, il pousse la porte battante sur sa gauche et s'engouffre dans une pièce lugubre.

 L'odeur de pourriture flotte dans l'air, tout comme cette épaisse poussière. Il se précipite et prend ce qui lui passe sous la main. Il arrache du mur un morceau de tuyauterie de radiateur pour le passer dans les poignées des portes battantes. Il recule et prend un court instant pour regarder à travers les lamelles des stores métalliques. Un calme mortifère règne dehors. Les rayons du soleil lui détaillent le visage ; des bandes horizontales alternant ombre et lumière. Il en oublierait presque que l'adrénaline le submergeait il y a peu.

 Il se ressaisit, puis il agrippe avec force l'un des bureaux massifs et lourds pour le pousser contre les portes. Le crissement de la ferraille sur le sol irrégulier provoque des étincelles. Mais alors que le meuble frappe les portes, cette chose surgit et martèle les petites lucarnes de ces dernières. Il sursaute et s'écroule en arrière avec un hurlement poignant et saisissant. Cette chose fracasse le verre d'une telle vitesse que son bras en vient déjà à le traverser.

 Le jeune homme se retourne tel une araignée désarticulée, se relève et court à l'opposé de la pièce. Le regard humide, les mains moites et cette sensation de mort imminente lui procurent une force surhumaine. Il se jette contre les autres portes avec force, avant de hurler à nouveau. Il s'effondre devant cette sortie condamnée sous la douleur de son épaule déboîtée. Il laisse s'échapper une larme. Mais la rage prend le dessus. Il pousse difficilement sur ses jambes pour se verticaliser. Il regarde avec dégoût cette entité robotique à l'allure humaine qui veut le tuer. Elle a désormais arraché une bonne partie du bois de la porte et tente de pénétrer, tel un chien qui essaie de s'extirper d'une cage trop petite. Il panique. Il court et traverse de part et d'autre cette pièce encombrée à la recherche d'une échappatoire. Toutes les portes sont bloquées et il se trouve bien trop haut pour se défenestrer. Il saisit les poignées de l'une des portes et exécute des mouvements frénétiques et désespérés, agitant ses bras pour faire céder les verrous, en vain. La chose a passé sa tête et ses bras dans ce qui ne ressemble plus à une porte. Il ne faudra plus beaucoup de temps pour qu'elle se confronte à lui. Elle gémit d'un tel cri qu'il en a mal aux tympans.

 Soudain, son regard croise celui de cette chose et tout semble se figer. Plus de bruit, plus de panique ; les mouvements sont ralentis. L'envie de saisir sa proie parcourt la face de l'entité. Cela se remarque de loin, c'est profondément inscrit dans son regard. Ses yeux, d'un vert si pur, si bionique, si lumineux, l'aveuglent. Il ne peut plus rien faire. Elle entre à travers les vestiges de cette porte, courant au ralenti face à lui. Il s'affaiblit, mais ne veut pas pour autant renoncer. Il tente de lutter, mais le regard de cette chose est trop fort et trouble sa vue. Le paysage tourne, la poussière danse et cette chose se rapproche tranquillement. Elle est maintenant juste à côté de lui, elle le regarde en inclinant la tête de droite à gauche, cherchant à tirer quelque chose de son esprit. Il ne peut plus rien faire.

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