L'héritier (12)
18 Rubilante 767
J’ai été très occupé ces derniers jours, avec les fouilles qui commencent à s’organiser. Maintenant que j’ai l’occasion et l’envie de consacrer un peu de temps à mon journal, j’en ai profité pour relire les dernières entrées. Je m’aperçois que ces histoires de rêves et de revenants paraissent à présent totalement fantaisistes. Les circonstances expliquent sans aucun doute l’amplification des faits. Comme un conte inquiétant raconté au coin du feu, à l’orée de la nuit, peut effrayer les enfants, ces cauchemars, consécutifs aux drames qu’a connus le domaine, dans notre vaste demeure qui gémit sous les bourrasques, ont pu prendre des proportions invraisemblables.
Quoi qu’il en soit, la rumeur concernant d’antiques ruines emplies de trésors n’a pas tardé à circuler. Loin. La populace de Rosenwald et des bourgs environnants, encore marquée par les récents événements, n’a pas osé braver ces lieux maudits, hormis peut-être quelques intrépides ou déments. Mais au-delà, la rumeur a porté au point de nous envoyer des aventuriers, érudits, chasseurs de trésors et autres pilleurs de tombes de tous horizons. Certains proviennent de Lichthel ! Il y a même quelques savants de l’académie Aurélius Vanheim. Beaucoup viennent de Kaltfel, qu’ils en soient originaires ou qu’ils aient débarqué d’un navire en provenance des principautés d’Aigue-Franche ou même d’Ivorie.
Le campement s’agrandit autour de la carrière et l’on y parle quatre ou cinq langues. Pour un courageux explorateur, on y trouve quatre ou cinq curieux, des aides de camp, des apprentis, des marchands d’outillage et même une ou deux filles de joie. Monsieur Stabel et son équipe supervisent les fouilles. Ils surveillent ce qui en ressort et en prélèvent les trois quarts à titre de taxe. Ils s’assurent également que les passages les moins sûrs soient solidement étayés et déblayés par ceux qui les empruntent. Mieux vaut éviter un nouveau drame.
Cependant, la rareté et l’ancienneté des découvertes rend leur évaluation délicate. Les prix sont âprement discutés et les désaccords menacent parfois de dégénérer en disputes. Aussi me suis-je résolu à faire appel à un spécialiste. Je devrais sous peu recevoir la visite de Maître Galimède Kerz, historien en chef de la haute école de Kaltfel. J’espère qu’il pourra nous aider à mieux appréhender la valeur des différents objets, servir d’arbitre dans les conflits et même, éventuellement, acheter certaines pièces pour son illustre établissement.
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