Jonathan
J’ouvre mon ordinateur, histoire de réactiver mon compte Facebook, inexistant depuis maintenant plus de trois ans. J’entre les paramètres nécessaires et hop me voilà de nouveau sur la toile. Je refais un peu le tour de ma page. Seigneur, il y a des choses qu’il vaudrait mieux oublier...
Comme ce qu’il s’est passé avec Nat ?
Chut, la voix. Je ne veux pas repenser à ça. Pas maintenant. Je tape dans la barre de recherche “Brandon Volaire”. Je ne le retrouve pas. J’ai soudain une illumination et renseigne “Bandit974”. Bingo ! Ce crétin n’a même pas pris la peine de changer ce pseudo complètement stupide. Je fais un peu le tour de sa page : Brandon est resté Brandon, même dans un lycée de riche. Oh, je vois que nous avons un ami en commun… ce cher Vincent.
Bon, que faire maintenant ? Prendre contact directement avec lui ? Non… Il faut la jouer plus finement… J’avise une de ses photos. Je la regarde attentivement et il me semble reconnaître l’endroit. Je télécharge l’appli sur mon téléphone et sort de la chambre.
Je me dirige vers les terrains de sports : c’est bien ce qu’il me semblait, la photo a été prise près des vestiaires. Quelle ringardise ! Construire les vestiaires sur la base des anneaux des jeux olympiques ! Je fais le tour du bâtiment tout en examinant l’image sur mon téléphone…
- Tu es sûr que personne ne t’a suivi ?
Deux élèves sont apparus du côté opposé au mien, j’ai à peine eu le temps de me cacher.
- Oui t’inquiète…
- Sinon Brandon ne va pas …
- J’ai dit t’inquiète !
Tiens donc la chance me sourit finalement…
Je jette un œil sur les deux garçons et les vois s’engouffrer dans le bosquet. Je les suis et quelle n’est pas ma surprise de découvrir une sorte de sentier serpentant à travers les buissons de bougainvilliers et autres arbustes. Prudent, je les laisse prendre un peu d'avance avant d’entamer moi-même la petite pente : le chemin est petit, deux personnes ne peuvent se tenir côte à côte. Ainsi, si quelqu’un arrivait en face il me serait impossible de me cacher à cause des épines des bougainvilliers. J’avance doucement, à l'affût du moindre bruit. Une barrière métallique en piteux état se dresse devant moi : je m’approche et m’aperçois que les fils ont été coupés en forme de porte et soigneusement remis en place de sorte que de loin rien ne paraisse suspect. Au-delà se dresse une petite forêt de filaos dont les plus grands arbres doivent faire plus de dix mètres de hauteur. J’avance encore un peu et finis par arriver dans une sorte de clairière plus ou moins circulaire.
Oh oh… Je suis bien chez Brandon. Aucun doute là-dessus…
Devant moi se dressent une dizaine de pieds de marijuana, de différentes espèces si j’en crois mes souvenirs. J’entends des éclats de voix dont une m’est particulièrement familière : Brandon. Les deux garçons et lui-même surgissent sur ma droite. Je crois bien qu’ils finalisent leur transaction.
- Très bien : je vous ferai livrer samedi soir à l’adresse indiquée. Je vous appellerai dès que la marchandise sera en route.
Ils se serrent la main et repartent, laissant Brandon seul. Ce dernier sourit, l’air satisfait. Je sors mon canif de ma poche et approche doucement par derrière. Ma lame placée juste sous sa gorge et son bras droit enserré sur son dos, je lui murmure :
- Salut Brandon… Comment vas-tu vieux frère ?
- Jo… Jonathan ? Que … qu’est-ce que tu fais ici ?
- Moi ? Oh… rien de bien intéressant… Je visite… Cet endroit est très… comment dire… intéressant…
Il essaie de se débattre mais je suis devenu plus fort que lui. Adieu, l’adolescent maigrichon… Cette fois-ci, j’ai le dessus.
- Qu’est-ce que tu veux ?
- Juste une part dans le marché… rien de plus.
Je le lâche en guise de bonne foi.
- Crève !
Brandon me prend par surprise et m’assène un coup de poing dans l’estomac. J’accuse le coup et sent une bouffée de colère monter en moi.
Tant pis pour lui.
Il prend le temps de me regarder cette fois. La dernière fois que l’on s’est vu, il faisait presque une tête de plus que moi, la tendance s’est fortement inversée. Aujourd’hui, je suis plus grand et plus massif. Je crois aussi que mes deux années de prison m’ont donné un air plus menaçant. Il recule, l’air apeuré.
Tu es seul aujourd’hui. Il n’y a personne pour me tenir pendant que tu frappes.
Je lui rends son coup, et emporté dans mon élan, j’y ajoute une droite et un uppercut. Brandon se retrouve à terre, la lèvre fendue et l'œil enflé.
- On remet ça ?
- Je ne suis pas seul dans le coup. Ne crois pas que tu pourras entrer dans le business comme dans une église…
- Bien dit, Brandon. De plus, ce cher Jonathan et moi avons un petit compte à régler.
Brandon retrouve le sourire : la cavalerie est là. Vincent et trois autres gars viennent de faire leur entrée.
Ce sera plus compliqué que prévu...
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