Renseignement
— Est-ce que Taito est à Edo ? osa demander Kairii un soir, alors que ce Harada, qui était en train de le besogner, s’apprêtait à jouir.
Cela faisait plusieurs nuits déjà qu'on l'obligeait à partager la couche de cet homme antipathique et peu avenant. Kairii avait consenti en pensant qu'il n'était plus à ça près : après tout, la survie de Tai valait bien de tendre les fesses. Mais une fois de plus, il avait sous-estimé l'exercice, surtout la fréquence à laquelle on le demandait. Le patron s'était visiblement entiché de lui, et il avait décidé de le garder pour son usage personnel.
— Alors ? continua-t-il, les bras croisés sur son visage dans une tentative pour éviter le contact visuel avec son violeur. Tai est-il à Edo ?
— Mais tais-toi un peu ! s'emporta l'homme. Tu me déconcentres et me gâches mon plaisir ! Qu'est-ce que j'en sais, moi, de ce Tai ?
Le visage impassible, Kairii tourna la tête sur le côté lorsqu'une goutte de sueur grasse et musquée vint s'écraser sur sa joue. Le liquide toucha sa peau, s'écoulant jusqu'à son oreille.
— Vous devriez savoir, pourtant, poursuivit-il sans se démonter. Puisque vous m'avez fait parvenir cette boîte... Vu la vitesse avec laquelle ça a été fait, j'ose croire que Tai se trouve en effet à Edo.
— Tu m'ennuies, avec ce Tai ! s'écria l'homme en attrapant un coussin pour le lui mettre sur la tête. Tu n'ouvres la bouche que pour me parler de lui. Y en a marre ! Je t'interdis de mentionner son nom jusqu'à nouvel ordre.
Kairii rejeta le coussin sur le côté et se redressa. La manoeuvre eut pour effet de sortir le pénis – réellement minuscule – du patron de son corps, et ce dernier le regarda, vert de rage.
— Kirii !
— Kairii, corrigea le susnommé.
Puis, après une pause réglementaire :
— Alors ? Où est Tai ?
— Tu es la créature la plus stupide et la plus obstinée que je n'ai jamais rencontrée ! s'emporta l'homme.
Kairii ne s'en offusqua pas. Il connaissait déjà la piètre opinion que l'homme avait de lui, si ce n'est en tant qu'objet sexuel.
— Où est Tai ? répéta-t-il obstinément.
On aurait dit que le patron allait dévorer le drap de rage. Mais il finit par céder :
— Non, il n'est pas à Edo, ton Tai ! hurla-t-il. Après être allé me plaindre de la mauvaise affaire que j'ai faite en t'achetant, on m'a envoyé une missive par oiseau interposé me demandant de te montrer le contenu de cette boîte, contenu qui est lui-même arrivé par oiseau ! J'ai demandé à qui était ce doigt, et on m'a répondu qu'il appartenait à un certain Taito, voilà ! Tu vas te taire et me laisser finir, maintenant ?
Des oiseaux. Cela ne pouvait être que les Otsuki, qui se régalaient à voler le savoir martial des Naguki. Le dressage de faucons et autres oiseaux de proie étant une spécialité du clan Kuki, les Otsuki les avaient tout naturellement copiés. C'était un nouveau message que voulait lui faire parvenir Sadamaro.
Kairii roula sur le côté à nouveau et il se laissa faire lorsque l'homme réintroduisit son membre en lui. Comparé à ce qu'on lui avait fait subir chez les Otsuki, au moins le traitement que lui infligeait ce Harada n'était pas trop douloureux. L'homme avait un organe insignifiant, et sa seule fantaisie au lit consistait à toucher les cheveux de Kairii, qu'il attrapait à pleines mains. Ce contact était certes désagréable, mais supportable. Les yeux gris du garçon se fixèrent sur le plafond et y restèrent. Il endura jusqu'à la fin, en serrant les dents.
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