PETITS PETITS POISSONS
Je suis un être supérieur. Adulé et craint.
Comme il m'est possible d'apporter l'immortalité, mon pouvoir est immense : j'ai fait et défait bien des destins.
Je suis tour à tour le Bon ou le Mauvais et j'en joue.
Cette ambivalence qui me caractérise fait de moi un personnage redoutable et, parfois, mon manque total de discernement me rend des plus imprévisibles.
Ma tâche est colossale. Aussi, pour l'accomplir, je ne connais ni le repos, ni le silence.
J'ai, enfouies dans ma mémoire, toutes les péripéties de mon existence. Mes innombrables souvenirs sont si puissants, si riches, que parfois lorsqu'ils m'assaillent, ils me surprennent à un point tel que leur caractère exceptionnel me pousse à les raconter.
Aujourd'hui, c'est avec une tendresse infinie que je me remémore ma Grèce natale. Dans ces moments de nostalgie, je retrouve les montagnes de Thessalie si chères à mon cœur.
Je cours pieds nus le long du Pénée, sautant d'une rive à l'autre à la poursuite de ses flots argentés.
Le fleuve majestueux berce de ses eaux suaves des montagnes de verdure à la beauté surprenante. Les peupliers, les platanes et les frênes dont je perçois encore la divine senteur couvrent ces monts flamboyants et je revois jaillir de leurs pieds des sources d'une eau pure comme le cristal.
Je m'étourdis de ses méandres. Je m'enivre avec délice des mille parfums de la vallée fleurie de Tempée, où le chant mélodieux des oiseaux rythme ma danse avec le fleuve enchanté. Insaisissable, il serpente entre le Mont Olympe et le Mont Ossa, mon Mont, avant de m'échapper, et de disparaître dans la mer Egée.
Ma mémoire est vagabonde, pardonnez-moi ; maintenant, je me rappelle pourquoi je vous parlais de mes montagnes.
J'ai, disais-je, enfouies dans ma mémoire, toutes les péripéties de mon existence et, je n'ai pas délivré tous mes secrets ...
Je me souviens de ma rencontre avec Xena, la princesse guerrière, et sa compagne Gabrielle, la barde combattante. A ma connaissance aucun des parchemins de cette dernière ne conte cette histoire ; j'en suis donc l'unique témoin et je viens vous l'offrir en confidence.
C'était à la fin du printemps, les deux amantes traversaient la vallée de Tempée, ma vallée, mon jardin.
En ce temps là, je m'intéressais beaucoup à Xena.
Pressentant qu'elle fomentait contre moi, je devais savoir ce qu'il en était : la confrontation devenait dès lors inévitable.
La barde me servirait d'appât ...
Annotations
Versions