Déjà vu - Ern

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Ern poussa un profond soupir. La nuit avait été d’un calme assommant, et le livre qu’il avait choisi pour passer le temps n’avait pas arrangé les choses. Aucune des informations qu'il contenait n’était nouvelle pour le jeune médecin. La majorité des plantes répertoriés étaient communes, et les rares exceptions avaient été étudiées plus en détail dans d’autres ouvrages que Ern connaissaient par cœur depuis longtemps déjà. Il n’avait continué de lire uniquement pour ne pas s’endormir pendant son astreinte.

L’absence de patient dans cette petite clinique du quartier rouge n’avait rien de surprenant. Elle était la seule clinique « officielle » de cette partie de la ville. Ern avait espéré pouvoir aidé plus de personne dans le besoin en choisissant de candidater pour un établissement dans les bas quartiers, s’imaginant que le faible nombre de concurrents était dû a la mauvaise image des lieux. Et même si il s’agissait sans doute d’une des raisons, le véritable problème était ailleurs : peu de gens du rouge avait confiance dans les institutions « officielles », et le simple fait que cette clinique conservait un suivi médical des patients n’était pas une bonne nouvelle pour ceux qui souhaitaient garder les raisons de leur blessures les plus … discrètes possibles. L’excitation qu’avait ressentit Ern à l’idée d’enfin pouvoir exercer les talents qu’il avait développés au cours de Cycles d’apprentissage s’était donc vite retrouvé écraser par la routine d’une clinique vide et de patient souvent difficiles.

Ces « en-nuits » n’avait donc rien d’exceptionnelle pour Ern, et étaient devenus de plus en plus fréquentes à mesure que ses choix d’ouvrages passe-temps avaient diminués. C’est pourquoi, plongé dans sa torpeur routinière, le jeune homme n’entendit pas les lourds pas de courses de l’autre côté des simples portes de bois qui servaient d’entrée à la clinique. Il ne put que sursauter lorsque ces dernières furent presque dissocier du mur, ouvertes dans un fracas assourdissant par l’épaule du géant qui venait de les enfoncer.

- UN MEDECIN ! VOTRE MEILLEUR MEDECIN, IMMEDIATEMENT !

Ern avait faillit tomber de la chaise sur laquelle il se balançait lorsque la porte d’entrée avait pratiquement explosée. Il pris un instant pour reprendre ses esprits et observé l’arrivant. L’homme était une véritable montagne humaine, dans une forme physique si impeccable que seul les poils blancs naissant dans sa longue barbe laissait transparaître son âge déjà avancé. Son regard perçant et désespéré scannait la salle comme ceux d’un animal acculé, et finirent par croiser ceux du Lecteur.

- TOI ! NE RESTE PAS PLANTER LA ET APPELLE DE L’AIDE !

Ern reprit enfin ses esprit, et c’est à ce moment qu’il remarqua enfin la raison de la présence du colosse : dans ses bras se trouvait une femme inconsciente, dont le visage et le torse étaient couvert de sang. Comprenant soudainement l’urgence de la situation, Ern se mit immédiatement en mouvement. Il attrapa le rideau entourant le lit le plus proche et tira brusquement dessus, attrapant au passage le traineau sur lequel était soigneusement placé son matériel.

- Allonger la là-dessus !

Le colosse s’exécuta, déposant la femme avec une délicatesse dont sa carrure ne lui paraissait pas capable.

- Où est le médecin ?

- Je suis le médecin.

L’homme haussa un sourcil, perplexe. Ern n’y prêta pas attention. Il paraissait jeune pour son âge, et il n’était pas rare que les gens questionnent ses compétences. Cependant, contrairement à beaucoup, l’homme ne fit aucune remarque et se contenta de hocher la tête avec gravité. Ern lui fit signe de reculer, une paire de ciseaux à la main. Il entreprit de découper l’épais vêtements que portait la blessée, séparant le tissu en deux au niveau du torse. Celui-ci avait déjà été en partit lacérer par plusieurs coupes qui auraient pu s’apparenter à des coups de couteaux, si elles n’avaient pas été parfaitement parallèles. Ern avait déjà eu l’occasion de traiter des patients après des attaques d’objets tranchants, mais rien de ce qu’il avait vu n’était comparable à ce qu’il avait sous les yeux. Il ne posa cependant aucune question, restant concentré sur sa tâche.

Une fois la découpe terminer, il sépara le vêtement en deux. Il se saisit ensuite des gants qui couvraient les mains de la femme et les retiras. Ce qu’il vit le fit se stopper subitement. Voyant son hésitation, le géant prit de nouveau la parole :

- C’est une longue histoire et une que je ne peux pas expliquer, essayer de ne pas vous en préoccuper pour le moment.

Ern hocha la tête et reprit le travail, tirant sur les manches pour complétement dénuder le torse de la blessé, et sa surprise s’accentua de plus en plus : à partir de l’épaule et se rejoignant au niveau des omoplates, les deux bras de sa patiente n’était pas de chair, mais de métal. Si ce n’était pour les discrètes articulations qui indiquaient clairement que les deux appendices étaient probablement complétement fonctionnels, leur aspect aurait été si parfait qu’ils auraient ressembler d’avantage à une sculpture qu’à un mécanisme. Ern n’avait jamais rien vu de pareil, mais n’eut pas le temps de s’émerveiller plus d’un instant. La situation était critique.

Une fois les vêtements retirés, il s’appliqua à nettoyer les blessures. Et, après quelques instants, il eu enfin un visuel de l’état global de la femme. Elle devait approcher la fin des 40 cycles, et son torse et son visage avait été lacérés par un ou plusieurs objets tranchants : deux coupures sur le visage, et trois sur le torse. Comme toute blessure à la tête, les plaies du visage saignaient abondamment. Le sang avait déjà bien encrassé les courts cheveux brun de la blessée, rendant l’accès au blessures difficiles, mais Ern se savait capable de traiter toutes les coupures sans trop de difficulté . Sa seule véritable inquiétude était les yeux de la patiente, qui s'était trouvés sur la trajectoire des deux lacérations sur son visage. Concentrant son Ather, il se lança aussitôt dans sa tâche. Il s’appliqua d’abord à réparer toutes les sources de saignements, refermant partiellement les plaies du torse de la jeune femme. Il devait agir vite et sans s’épuiser, et décida donc de ne pas les traiter à l’Ather plus amplement.

- Est-ce que vous savez bander une plaie ? Je dois me concentrer sur ses yeux le plus rapidement possible.

Tout en s’adressant à l’homme qui se tenait debout de l’autre coté du lit, il lui désigna les bandages rangés soigneusement par tailles dans la partie inférieure de la table à instruments. Le géant hocha la tête sans broncher et fit le tour de la table en un instant, se baissant pour atteindre les différents compartiments.

- D’abord les compresses dans la seconde boîte en haut à gauche, le bocal juste à côté contient un onguent à appliquer délicatement sur les plaies avant de les couvrir. Puis les bandages dans le deuxième compartiment en partant de la droite. Il faudra la soulever pour les faire passer dans son dos, faîtes au moins trois couches de bandages.

Tandis qu’il donnait ces explications et que l’homme s’exécutait, Ern travaillait déjà sur le visage de la femme, et le saignement avait commencé à s’estomper. Tout en se concentrant sur ses propres actions, il resta tout de même attentif à celles de son aide improvisée. Le géant ne chômait pas. Bien que manquant les subtilités d’un professionnel, ses gestes étaient précis et efficaces. Il était claire par son calme et son application que ce n’était pas sa première expérience avec une plaie ouverte. Après quelques Temps, Ern cessa de se préoccuper de la compétence du colosse et se consacra pleinement à sa part des choses.

Une quarantaine de Segments plus tard, Ern se laissait tomber sur sa chaise, épuisé. Le géant, qui avait passé les 10 derniers Segments à faire les cent pas en attendant que le jeune Lecteur termine son travail, s’approcha du lit et s’agenouilla près du visage maintenant couvert de bandage de la femme. Caressant du bout d’un doigt l’un des rares pans de peau encore accessible, il demanda d’une voix grave mais douce :

- Comment-va-t-elle aller ?

- Elle n’est plus en danger. Elle a perdu beaucoup de sang, mais rien que quelques Rotations de repos ne pourront régler. Les plaies laisseront sans doute de feintes cicatrices, elle devra malheureusement vivre avec… Ma plus grande crainte sont ses yeux. Ils étaient en piteux état. J’ai pu leur rendre leurs formes, mais les nerfs étaient très abimés. Je ne sais pas si elle sera en mesure de retrouver la vue.

Le géant soupira, essuyant son visage dans une de ses énormes mains. Il resta un instant dans un à contempler la blessée avec une profonde tristesse. Se redressant enfin, son regard prit un air dur et déterminé.

- Elle s’en sortira, d’une manière ou d’une autre. Elle est la plus forte d’entre nous.

Il contracta un de ses bras pour mettre en avant les muscles impressionnant qui le constituait, un sourire rieur sous sa barbe.

- Et je suis particulièrement fort.

Avec un clin d’œil, il se tourna et se dirigea vers la sortie.

- J’ai une affaire urgente à régler suite à ce qui s’est passé cette nuit. Je la laisse entre tes mains. Merci pour ton aide précieuse.

Ern se redressa brusquement sur sa chaise.

- Attendez ! Je dois prendre votre nom et le sien pour mon rapport !

- Cela ne sera pas nécessaire. Quelqu’un devrait passer dans les prochains Chevrons pour s’assurer que tout est en ordre de ton côté comme du nôtre. Prends soin d’elle jusque là.

Sans un mot de plus, le géant passa la porte de la clinique et la referma derrière lui dans un grincement particulièrement audible qu’elle n’avait jamais faites jusque là. Ern n’avait ni l’énergie ni les capacités physiques de l’arrêter, et il laissa donc l’inconnu partir sans plus de protestations. Il se ré-assit et jeta un œil a sa patiente. Sa respiration était régulière et calme, et elle était visiblement plongée dans un sommeil profond. Estimant qu’il n’y aurait probablement pas d’autre irruptions pour le reste de nuit, Ern prit la décisions de s’autoriser une sieste d’une quarantaine de Segments pour récupérer de l’opération. Il se laissa donc tomber dans le sommeil.

Finalement, c’est l’arrivée de plusieurs individus qui le réveilla. Sa chef de clinique, une femme âgée mais toujours particulièrement féroce, venait d’entrer dans la clinique flanquer de deux individus habillée de longue toges vertes. Ses long cheveux blancs étaient resserrés en un imposant chignons derrière son crâne, et ses traits ridées ajoutaient à son visage une sévérité pourtant déjà bien établie par son regard d’un bleu glacial et perçant.

Paniqué d’être ainsi découvert assoupi pendant son service, Ern jeta un œil rapide au Chronostat placé au dessus de la porte. Il jura intérieurement. Il avait dormit un Chevron de trop, le soleil allait bientôt se lever. Il ouvrit immédiatement la bouche pour s’expliquer.

- Mirr Tillin, je suis désolé, j’ai épuisé mon Ather en soignant cette blessée et je…

Tillin ne le laissa pas finir, levant une main tout en prenant la parole de sa voix râpeuse mais calme.

- J’ai déjà appris ce qui a transparu ici cette nuit, d’où ma présence si tôt dans la matinée. On m’a rapporté que tu avais fais un travail remarquable, je ne peux pas t’en vouloir de t’être épuisé à la tâche.

En prononçant ses mots, elle s’était approché du lit de la blessée, toujours endormis. Elle observa les bandages sur le visage de la femme, fermant les yeux un instant pour concentrer son propre Ather. Après une brève inspection, elle hocha la tête et continua :

- Les deux personnes qui m’accompagnent sont des connaissances de ta patiente, et sont là pour te demander service.

Sur ces mots, l’une des deux figures encapuchonnées qui étaient restées debout près de la porte s’avança, découvrant son visage. Il s’agissait d’une jeune femme à l’air banale, mais son expression était particulièrement douce, à l’instar de la voix qui se fit entendre lorsqu’elle prit la parole.

- Bonjour, Hir Ern, nous te remercions pour l’aide que tu as apporté à notre… amie cette nuit. Je suis Mari, Envoyée et Voix du Second Archange, Soral le Prévoyant.

Ern passa de surprise à acceptation. Surprise car la présence d’une Envoyé dans cette partie de la ville était plus qu’inhabituel, et qu’elle lui offre ainsi le nom du Second était un honneur qu’il ne pensait pas se voir octroyer un jour. Acceptation car il était clair que sa journée allait probablement être tout aussi mouvementé que sa nuit.
Il s’inclina avec respect, attendant que l’Aide le remercie d’un geste de la main pour se redresser. Cette dernière continua.

- Comme tu dois t’en douter par notre présence et celle de Mirr Tillin, la situation à laquelle tu t’es retrouvé confronté cette nuit est … particulière. Pour des raisons que le Second souhaite garder privées, ce qui a transparut ces derniers Chevrons doit rester secret et ne figurera donc pas dans les rapports de votre clinique.

Ern leva un sourcil et jeta un coup d’œil à sa supérieur, qui hocha la tête d’une manière à peine perceptible. Il reporta son attention sur la visiteuse.

- Nous avons cependant besoin que la blessée soit prise en charge et voit son rétablissement supervisé, et c’est pourquoi nous avons un arrangement à te proposer. Nous souhaiterions que tu passes les prochaines Rotations à veiller sur elle de manière exclusive, et ce jusqu’à qu’elle soit complétement remise sur pieds. Nous fournirons un lieu, la nourriture, et tout le matériel que tu jugeras nécessaire. Il sera cependant impératif que vous restiez dans le lieu sélectionné, autant que le Second le jugera nécessaire. Quelques Rotations tout au plus, le temps que la sécurité de tout les concernés soit confirmée.

Ern commença à paniquer légèrement. Dans quelle affaire c’était-il retrouvé mêlé ? Le but était clairement de mettre la femme en isolement, mais pourquoi ? Etait-elle dangereuse ? Qu’en était-il du géant de la veille ? Il se tourna de nouveau vers Tillin, qui s’avançait déjà pour prendre la parole.

- Je sais que tu dois être surpris et perdu, mais je peux t’assurer que les choses ne sont pas aussi graves qu’elles n’y paraissent. J’ai été informé que ta patiente est simplement quelqu’un de très proche du Second. Et ce dernier tient à s’assurer de son plein et sûr rétablissement. Ne t’inquiète pas non plus pour la clinique, je m’assurerais de son bon fonctionnement pendant ton absence. Je comprend que tu es des réticences à abandonner ton quotidien pour quelque temps, mais tu rendrais un grand service au Divin si tu acceptais.

Ern se calma légèrement. La femme n’était donc apparemment pas dangereuse, mais spéciale. Il se rassit dans sa chaise pour mieux réfléchir. La requête venant d’un Archange, il n’avait que l’illusion d’un choix. En temps normal, il n’aurait pas aimé se faire ainsi forcer la main. Mais les circonstances étaient exceptionnelles, et Ern commençait à voir dans cette arrangement plusieurs opportunités : une bonne excuse de se sortir de sa routine et de l’ennui, et la chance d’en apprendre plus sur cette mystérieuse femme au bras mécaniques. Enfin, il se sentait aussi tenu de s’assurer du rétablissement de la patiente, et aurait probablement demandé à être responsable de son suivi de toute manière. Que les soins soient prodiguées à la clinique où ailleurs n’avaient finalement pas grande importance. Il n’avait aucune réelle raison de refuser.
Ern avait prit sa décision, et fit part de son choix à l’Envoyé du nom de Mari. Cette dernière le remercia d’une galante courbette, puis fit un signe de la main à la femme qui l’accompagnait, qui n’avait toujours pas dit un mot. Cette dernière se courba à son tour avant de s’éclipser.

- Le Second apprécie ton altruisme, jeune Ern. Et saura te récompenser comme il se doit. Maintenant, nous te conseillons de rentrer chez toi et de te reposer. Un de nos envoyés viendra te chercher dans la soirée pour t’accompagner jusqu’au lieu choisit. Soit sûr d’avoir préparé tout ce qu’il te faut pour un isolement prolongé d’ici la fermeture du Dixième Chevron.

Ern jeta un œil à la chef de clinique, qui donna son accord d’un signe de tête élégant. Ern ne perdit donc pas de temps, et attrapant sa sacoche, se dirigea à son tour vers les portes de la clinique. En chemin, il commença une liste mentale de tout ce dont il aurait besoin pendant cette période d’isolement. Comme souvent lors qu’il planifiait ses tâches à venir, Ern se surprit à parler à voix haute :

- Quelques Rotations ? Je devrait m’en sortir avec la dizaine d’ouvrage que j’ai échangé avant hier…

Deux Ellipses plus tard, Ern poussa presque un cri de joie en poussant enfin la porte de sortie de la loge où il avait vécu pendant ce qui lui avait parfois sembler une éternité. Cela faisait presque 60 Rotations qu’il n’avait pas pu se déplacer librement, et simplement se retrouver sur le pas de la porte lui procura un sentiment de liberté qu’il n’avait jamais ressentit auparavant, même lors qu’il avait enfin décroché son accréditation de soignant. Sa sacoche pleine de ses effets personnels sur le dos, il prit le chemin de chez lui pour la première fois depuis quatre Périodes. Les rues étaient presque vides à ce Chevron avancé de la journée, mais le peu de monde qu’il croisa suffit déjà à apaiser le sentiment de solitude qui l’avait peu à peu envahi pendant l’isolement. Bien qu’il ai eu l’habitude des longues périodes de temps enfermés lors de ses études, ces expériences d’isolation avaient été un choix et Ern aurait pu s’en extirper à tout moment. Il n’aurait jamais pensé que le simple fait d’avoir la possibilité de sortir pouvait rendre ces instants bien plus supportables. Sans la compagnie de Mune, il serait probablement devenu fou.

Penser à sa compagne d’isolement lui fit se remémorer les deux dernières Ellipses. Il avait beaucoup appris aux cotés de Mune. Les premières Rotations de son rétablissement avait été les plus dures pour sa patiente. La perte de sa vue avait été une épreuve difficile. Mais aussi l’occasion pour Ern de comprendre pourquoi Kairn avait tant foi dans la « force » de son amie lorsqu’il était venu la déposer dans sa clinique cette nuit là.

Bien qu’elle eu d’abord été déprimé et désorienté, il ne lui fallut que trois Rotations pour se lever de son lit et commencer à se déplacer d’elle-même. Maladroitement au départ, s’aidant de la canne que lui avait procuré Ern pour se repérer dans son environnement. Dix Rotations plus tard, ce dernier avait à peine commencer à se réjouir des progrès de sa patiente quand celle-ci décida soudain de ne plus utiliser l’objet car elle le trouvait trop encombrant. Bien entendu, elle avait immédiatement recommencé à se cogner dans tout les éléments mobiliers qu’elle croisait, mais malgré les tentatives de Ern pour lui faire reprendre la canne en main, elle avait continuer à refuser sèchement. Une quinzaine de Rotations après le début de l’isolement, une dispute avait finit par éclater entre le jeune homme et la femme.

Cette dernière n’avait jamais été très agréable avec Ern, ce qui ne l’avait d’abord pas dérangé : il n’était pas rare pour les patients se retrouvant soudainement privé d’une partie d’eux même d’antagoniser leur médecin par frustration. Cependant, l’isolement qui se prolongeait et l’attitude de sa patiente avait finit par entamer la patience de Ern, qui s’était énervé à son tour contre elle, lui faisant part de sa propre frustration quand à la situation. Après tout, c’était pour l’aider qu’il avait accepté d’être enfermé ainsi, mais ils ne pourraient jamais sortir de là si elle continuait de refuser d’apprendre à redevenir en partie autonome.

Ce soir là, Ern était retourné lire dans sa chambre, à la fois en colère mais se sentant aussi coupable d’avoir perdu son calme. Il avait manqué de professionnalisme. C’était la première fois qu’il se retrouvait responsable d’une patiente à temps plein, et l’expérience était drainante. Cependant, il savait ne pas pouvoir se servir de ce fait comme excuse. Et avait décider de s’excuser dès le lendemain. Ruminant sur les évènements de la journée, il avait mit du temps à trouver le sommeil.
Mais à sa grande surprise, alors qu’il s’apprêtait à s’endormir, des coups à la porte l’avait obligé à se relever. En ouvrant cette dernière, il s’était retrouvé face à Mune, qui s’excusa de son comportement et lui promit de mieux s’entendre avec lui dès le lendemain. Pris par sa surprise, Ern avait juste accepté les excuses de sa patiente avant de la laisser partir, fermant la porte derrière elle.

Ce n'était qu'après s'être rassis sur son lit qu'il avait réaliser : les quartiers qui leur avaient été attribués étaient particulièrement vastes, composés de plusieurs pièces et couloirs. Il était impossible qu’une femme récemment devenu aveugle puisse d’y déplacer sans problème, et encore moins trouvé sa chambre pour y toquer à cette heure de la nuit. Il s’était alors précipité à sa porte pour sortir dans le couloir. S’attendant à trouver sa patiente en train de longer les murs pour tenter de retrouver sa chambre, Il fut au contraire accueilli par un couloir complétement vide.

Il s'était donc pressé vers la porte de Mune, mais après avoir parcouru les quelques pièces et couloirs qui séparaient leurs quartiers, il s'était retrouvé face à une porte verrouillée de l’intérieur : elle avait déjà rejoint sa chambre. Confus, il avait donc rejoint son propre lit. Il n'avait pas pu fermer l’œil pendant presque un Chevron, se demandant comment elle avait réussi à se déplacer avec tant d’aisance entre les deux pièces.

Le lendemain, lorsque Ern avait été invité à entrer dans la chambre de sa patiente, il ne la trouva pas debout à tenter de se déplacer comme à son habitude. Au contraire, elle l’attendait assise dans un fauteuil installé près de la fenêtre. Le vitrail qui la composait laissait entrer une lumière douce qui cascadait en arc-en-ciel sur le reste du mobilier : une table sur laquelle un thé fumait doucement, ainsi qu’un autre fauteuil placé en face de celui que Mune occupait. Ern n’avait jamais vu un service à thé comme celui là. Sa confection était particulière : au lieu de l’habituel anse, une poignée était monté sur le coté de la théière, et le service entier semblait être fait dans un métal d’une couleur marron-orangée. Son design était simple, mais élégant. Et bien que l'ensemble semblait avoir un certain âge, il était claire qu’un grand soin avait été apporté à le garder en aussi bon état que le jour où il avait été acquérit. Les tasses, de simples gobelets de métal ornés de différent motifs de plantes que Ern n'avait à sa grande surprise pas pu reconnaître, avait déjà été remplit d’un thé dont une odeur épicé se dégageait. L’une d’entre elle avait été placé devant le fauteuil vacant, tandis que l’autre était déjà entre les mains de Mune, qui la sirotait paisiblement. Cette dernière avait invité Ern à s’asseoir. Surpris par cette nouvelle atmosphère, Ern s’était cependant exécuté, emplit de curiosité. Mune avait alors commencé à parler.

Après lui avoir confié qu’elle ne lui parlait uniquement sous le secret médical et que rien de ce qu’elle ne lui dirait ne devait sortir de cette pièce, elle s’était lancé dans un long monologue.

Elle lui expliqua son passé en tant que Collecteuse. Elle avait passé ses jeunes années à se faire un nom en montant des expéditions de plusieurs Rotations pour s’aventurer toujours plus loin d’Oasis, dans des zones peu visitées. Ces sorties étaient toujours plus ambitieuses, et les standards pour les personnes qu’elle sélectionnait pour l’accompagner toujours plus difficile à satisfaire. C’était ainsi qu’elle avait rencontré Kairn, le colosse qui l’avait emmené à la clinique le soir ou elle avait été blessée, et avec qui elle avait finit par forger une relation professionnelle prolongée, qui s’était vite transformée en une amitié profonde.

Ils se trouvaient actuellement dans une extension qu’il faisait actuellement aménagée pour son auberge, qui se situait juste en dessous de ces quartiers. Une fois terminée, celle-ci accueillerait les travailleurs de la taverne, dont la fréquentation était en train d’exploser.

Un jour, bien avant tout ça, Kairn et elle avait été sélectionné pour faire partie d’un groupe de Collecteur particulier, qui aurait l’autorisation des Anges de s’aventurer au delà de la Tempête. Ils s’étaient absentés de la ville pendant presque cinq Cycles. Pour des raisons qu’elle avait juré de taire, elle n’était pas autorisée à en dire beaucoup sur ce qu’elle avait vu ou jusqu’où elle était allé, mais elle lui expliqua que c’est vers la fin de ce voyage qu’elle avait perdu ses bras. Les prothèses qu’elle portait aujourd’hui avait été conçue et était maintenue par une connaissance de Kairn. La raison de ses blessures quelques Périodes auparavant étaient liés à ce voyage, et c’est pourquoi ils s’étaient retrouvés placé en isolement le temps de s’assurer que la situation était sous contrôle et secrète.

Bien sûr, elle n’était pas devenue une Collecteuse de renom seulement grâce à son fort caractère, mais aussi parce qu’elle était l’une des très rares Altérés à être à la fois Lectrice et Modeleuse. Une particularité qui lui avait offert les talents et la flexibilité nécessaires à mener ses expéditions à bien et à en revenir vivante. Au moment où elle lui fit cette révélation, elle avait tendu l’un de ses bras mécaniques dans la direction de Ern, et une vapeur noire s’était lentement échappé des motifs couleur ivoire qui courait de son épaule à sa main. Lentement, le nuage s’était enroulé le long de son bras, formant un serpent dont la tête était lentement venu se reposer sur les doigts tendu de la femme, un de ses œil fixant avec paresse le jeune médecin. Mune le présenta comme Chu, son Murmure. Elle avait ensuite reposé le bras sur la table, paume vers le haut, où le serpent d’énergie s’était enroulé légèrement sur lui-même pour s’y assoupir.

Elle lui avait alors donner la raison de cette fatigue : elle avait utilisé énormément d’Ather dans la matinée pour préparer le thé avec lequel elle l’avait accueilli. Sans pouvoir voir l’air perplexe de Ern, elle sembla cependant sentir son incrédulité et avait donc commencé à lui expliquer pourquoi elle avait décidé de ne plus se servir de sa canne.

Depuis quelque jour, elle tentait d’utiliser ses talents de Modeleuse et de Lectrice pour « voir » avec son Ather. Le dispersant autour d’elle à la manière de vagues en modelant son énergie, puis lisant le moment où leurs ondulations heurtaient des objets pour sentir leur présence et se construire une image mentale de son environnement. L’exercice était difficile, avait-t-elle confier, en particulier sur les objets les plus petits, et c’est pourquoi elle s’était tant épuisée à préparer un simple thé. Cette révélation choqua Ern autant qu’elle l’émerveilla. L’idée était géniale, mais Ern n'avait osé imaginer l’énergie que la mettre en œuvre avait dû demander. A ce moment, le respect que Ern avait commencé à développer pour son ainée s’était transformé en admiration, et lui avait fait regretter davantage ses propos de la veille. Le reste de la matinée s’était donc écoulée entres excuses mutuelles et la promesse de s’entraider afin de rendre cette nouvelle méthode de réhabilitation aussi fiable que possible.

Les Rotations qui suivirent avaient donc été partagés entre entraînement pour Mune et longues discussions sur les différentes découvertes qu’elle avait faitent au cours de ses expéditions. Ern s'était montré particulièrement curieux d’en apprendre plus sur la faune et la flore qu’elle avait rencontré, et sur les attributs médicinales qu’elle et ses compagnons avait pu leur découvrir.

Ses échanges étaient parfois même été animés par la présence de Kairn. Qui bien qu'occupé par les rénovation de sa taverne, avait toujours profité de ses rares moments de liberté pour leur apporter les meilleurs repas que Ern ai jamais mangés. Les entendre ainsi converser de leurs aventures passées autour de la table avait éveillé en Ern un sentiment nouveau, ou peu être depuis trop longtemps oublié : celui de l’aventure. Il s'était surpris de nombreuse fois à s’imaginer aller au-delà des murs et découvrir par lui-même les merveilles que Mune lui avait décrite. Ses questions s'étaient donc éloigner de plus en plus souvent des aspects biologique et médicinal pour s’intéresser d’avantages au techniques de survies, de gestions d’expéditions, et diverses autre connaissances liés à la profession de Collecteur. Ern avait eu l’impression de se retrouver à nouveau sur les bancs de ses cours de médecines, et s'était réjouit de redécouvrir un sentiment qu’il avait perdue sans s’en rendre compte : le plaisir d’apprendre. C’était dans cet atmosphère à la fois nouvelle et étrangement familière que c’était écoulées le reste de ces quatre Périodes d’isolation.

Ern fut soudain sortit de sa longue réminiscence. Ses pas l’avaient guidé à travers les rues de la ville sans même qu’il ne s’en rende compte, et avait mis fin à sa déambulation physique et mémorielle en s’arrêtant devant la porte de sa loge. Il resta un instant figé devant l’entrée, frappé par une impression de routine qui lui noua soudainement la gorge. Sa main tendu par l’habitude vers le verrou à écrou de sa porte se stoppa à quelques centimètres du premier engrenage.

Ses yeux restèrent fixé un instant de plus sur l’imposant verrou de métal, puis se levèrent vers le judas. Il croisa alors le regard de son reflet, que la surface de la lentille avait inversé, emprisonné tête vers le bas dans cette bulle de verre et de métal.

Soudainnement, comme possédé, Ern fit demi-tour et disparu de nouveau dans le dédale de ruelle qu’il venait d’emprunter.

Un demi-Chevron plus tard, c’est devant une toute autre porte que le jeune Lecteur hésitait. Comme promis, l’endroit n’avait pas été dur à trouver. Il n’avait jamais posé les yeux sur un bâtiment aussi étrange. Plusieurs styles d’architectures se livraient bataille pour le contrôle de la façade, et aucun ne semblait capable de remporter la victoire. Même l’épaisse porte de bois au centre du chaos était de travers, comme si on l’avait forcé à laisser place lorsque le mur de vieille brique avait tenté de gagner du terrain sur le territoire de l’encore plus ancienne muraille. Dans un geste qui lui donna une désagréable impression de déjà-vu, sa main était stationnée à une courte distance du heurtoir, attendant les ordres. Un rire récemment devenu familier retentit dans son esprit.

« Tu sais, si tu as tant envie d’en savoir plus sur ce que c’est qu’être un Collecteur, la meilleure approche est d’aller t’y frotter toi-même. Et bien que je en ai encore l’air et la vivacité, je ne suis plus aussi jeune que toi. Tu vas devoir te tourner vers des gens de ton âge si tu veux des compagnons pour t’escorter au-delà du mur, je suis trop viel.. mature, et surtout trop qualifiée pour faire dans la garde d’enfant. Et comme je sais que ta petite tête d’introverti ne saura jamais par où commencer, je vais te donner un dernier conseil. Qui sait, peut-être que tu pourras aussi en apprendre un peu plus sur ces bras qui t’intrigue tant, alors écoute bien, je ne me répéterais pas. »

Le visage de Mune s’effaça, remplacé par celui du rapace qui ornait le marteau du heurtoir en métal qui se trouvait face à Ern. Agacé par le souvenir du ton de son amie et mentor, mais aussi emplis d’un nouveau courage, Ern se saisit enfin de la tête de l’oiseau. Il frappa trois coups, qui furent plus rapide qu’à son intention. L’excitation et l’appréhension commencèrent doucement à monté en lui.

Cependant, même après quelques Temps d'attente, il ne reçu aucune réponse. Alors qu’il s’apprêtait à frapper à nouveau, une petite trappe s’ouvrit sur le coté de la porte, le faisant légèrement sursauter. Malgré que celle-ci fut au niveau de son visage, il n'avait pas remarqué sa présence. Un bruit semblable à celui des engrenages d’un Chronostat se fit entendre, et la tête d’un autre oiseau, en bois cette fois, apparut dans l’ouverture. Elle s’approcha de son visage, juste asse pour qu’il puisse lire les inscriptions sur la petite plaque gravé qu’elle tenait dans son bec : « Veuillez donner CLAIREMENT et LENTEMENT votre nom et la raison de votre venue ». Un instant plus tard, le bec s’ouvrait pour dévoiler un dispositif similaire à ceux que les Passeurs utilisaient pour communiquer entre les différents niveaux des Ponts. Imitant les gestes et le ton qu’il avait observer à de multiples reprises, Ern se pencha vers le volatile.

- Je m’appelle Ern, je suis un Soigneur-Lecteur. Mune m’a envoyé ici afin de discuter de « vos escapades sous les yoks »

Après qu’il est prononcé ces mots, le bec se referma et l’oiseau rejoignit son antre. Quelques Temps encore, et Ern put entendre le verrou de la porte se déclencher. Une tête se présenta timidement dans l’interstice qui venait d’apparaitre entre le bois de la porter et le mur de pierre qui l’encadrait. Encore une fois, la description que lui avait faite Mune était parfaite : les cheveux blancs et les Yeux d’Or typiques des Inventeurs étaient facilement reconnaissable.

- Comment savez-vous pour les yoks … ? Personne ne devrait être au courant.

La voix était timide, presque apeurée. Ern leva les mains à la fois pour rassurer et en signe de paix.

- Honnêtement, je ne sais des yoks que leur particularités botaniques, Mune m’a juste dit qu'y faire référence serait un excellent moyen d’obtenir une réaction de la propriétaire des lieux. Désolé si j’ai touché un sujet sensible. Je souhaitait juste vous rencontrer. Mirr Alyss, j’imagine ?

La jeune femme poussa un soupir de soulagement, suivi d’un petit rire nerveux.

- Un excellent moyen d’obtenir une réaction, ça c’est certain. Même si je ne sais pas qui est asse confiant - ou asse fou – pour s’entretenir avec Alyss d'un sujet aussi sensible sur le pas de sa porte.

L’Inventrice avait finit de sortir sur le palier, et s’était redressée. Elle croisa le regard confus de Ern pour la première fois, et s’exclama:

- Oh ! Pardon. Je ne suis pas Alyss, même si je peu comprendre la confusion. La plupart des gens ont du mal à nous différencier, entre Inventeurs. Les yeux et les cheveux, tout ça … Je suis une amie des jumeaux. Alyss me laisse utiliser son atelier pendant son absence. Enfin, je pense surtout qu’elle veut que j’empêche son frère de venir fouiller dans ses affaires, donc on peut aussi dire que je le garde... Elle s’est absenté quelques jours, probablement pour retourner dans la forêt de yoks justement. La forêt dont il ne faut pas que je parle… Pardon, je m’égare. Elle devrait rentrer dans la soirée, donc vous pouvez repassez à ce moment là. Ah ! Mais vous ne savez pas quand exactement elle sera de retour... Et comme vous avez mentionné les yoks, peut-être que je devrais vous proposez d’attendre ici, pour que vous n’en parliez pas à quelqu'un d’autre... Mais je ne sais pas si j’ai le droit de …

Alors que la jeune Inventrice pensait à voix haute, Ern en profita pour souffler. Il venait de passer par tout un spectre d’émotion. De l’angoisse à l’excitation, puis de la confusion à l’amusement. Il sourit. Ces dernières Périodes avaient boulversées sa vie, et il devinait à l’attitude de cette jeune femme qu’il avait à son tour bousculé ses habitudes. Comme lui, elle n’avait pas l'air très à l'aise pour interagir socialement avec de parfait inconnus. Quelques Ellipses auparavant, il se serait simplement excuser et serait repartit sans insister. Mais il avait décider de commencer à changer. Il leva donc de nouveau la main pour gentiment interrompre son interlocutrice, avant de la lui tendre.

- Ne t’inquiète pas. Comme je l’ai dit, je ne sais rien de cette histoire de yoks, et elle ne m’intéresse pas vraiment. Je suis juste là pour changer de vie, et une connaissance m’a dit que cet endroit était un bon point de départ. Si ça ne te dérange pas, j’accepterais donc volontiers d’attendre le retour de cette fameuse Alyss. Je te promet que je ne te marcherais pas sur les pieds si tu travaillais sur quelque-chose. J’ai apporté quelques livres avec lesquels je pourrait passer le temps. Mais je suis aussi là pour me faire des amis, donc j’espère que l’on pourra bien s’entendre. Pas besoin de me vouvoyer, en fait, on doit avoir à peu près le même âge, donc autant se mettre à l’aise. Je me re-présente. Ern, Soigneur-Lecteur et aspirant Collecteur.

La jeune femme, qui s’était immédiatement tût lorsqu’il avait pris la parole, observa un instant son bras tendu, hésitante. Elle expira lentement, sans qu’Ern ne puisse dire si s’était de soulagement ou pour tenter de rester calme. Finalement, elle tendit le bras à son tour, et ils se saisirent mutuellement l'avant bras. Un léger mais honnête sourire apparut sur les lèvres de l'Inventrice.

- Enchantée de te rencontrer Ern, je suis Mahna.

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