Le jour suivant

Je me suis dirigée vers l'adresse inscrite dans l'agenda de monsieur Felding. J’ai atteint un café situé à une heure de route d’ici. Cela me fait penser que monsieur Felding tenait vraiment à garder cette relation secrète et à ce que personne ne soit au courant.

J’en ai profité pour flâner dans les rues de la ville sans but précis, repensant à toutes les informations que nous avions collectées depuis le début de l’enquête. Je revoyais chaque indice dans ma tête, jusqu’à ce qu’une idée me vienne. J’ai trouvé une seule lettre dans le tiroir du bureau de Charles, mais il y en a sûrement d’autres cachées, qui pourraient m’en apprendre plus sur leur relation. La question est : comment retourner au château des Felding sans attirer l’attention ?

Madame Felding ne sait pas que c’est moi qui ai repris l’enquête, donc elle pourrait me suspecter si je reviens au château pour fouiller à nouveau dans les affaires de son mari. Je doute que le coup du carnet oublié par Thomas fonctionne une seconde fois. Le seul moyen de retourner au château sans éveiller les soupçons est d’emmener Thomas avec moi. Comme c’est lui qui enquête officiellement notre visite, ne soulèvera pas de questions. Mais est-il prêt à revenir avec moi pour poursuivre l’enquête, ou est-ce encore trop tôt pour lui ? Après tout, pourquoi ne pas tenter le coup ? Il m’avait dit de venir le voir si j’avais besoin d’aide.

Je suis donc retournée à ma voiture et je suis allée retrouver Thomas. En arrivant, je l’ai trouvé dans le jardin, à cueillir des pommes. Il a été très surpris de me voir, ne s’attendant pas à ce que je revienne si tôt. Notre rendez-vous étant prévu dans trois jours.

- Salut Clara, je ne m’attendais pas à te revoir si vite.

- Salut Thomas, moi non plus, mais j’ai besoin de ton aide.

Nous sommes entrés dans la maison et nous nous sommes installés dans des fauteuils près de la cheminée.

-Comment puis-je t’aider ?

- Je suis allée au café mentionné dans l’agenda de Charles, c’est à une heure d’ici. Mais ce n’est pas pour ça que je suis là. J’ai réfléchi, et je pense que ce n’est pas la première lettre qu’Alice a écrite à Charles. Il doit y en avoir d’autres cachées dans le château, hors de portée d’Agathe. Ces lettres pourraient nous éclairer sur leur relation. Je ne peux pas fouiller dans les affaires de Charles sans attirer l’attention, et Agathe pourrait se poser des questions. Si tu viens avec moi, elle ne se doutera de rien et nous pourrons chercher les lettres discrètement. Qu’en penses-tu ?

- Je ne suis pas sûr… Je ne me sens pas prêt à enquêter sur le terrain.

- Thomas, j’ai vraiment besoin de toi pour la suite. Je m’en sortirai. Je te tiendrai au courant de mes progrès. On va juste au château pour chercher les lettres, et une fois trouvées, on partira.

- D’accord, je t’accompagne au château des Felding.

- Merci beaucoup, Thomas.

Nous avons pris la route en direction du château des Felding. Pendant le trajet, Thomas m’a expliqué ce qu’il dirait à Agathe Felding pour justifier son absence ces dernières semaines et notre visite. À notre arrivés, Agathe a été très étonnée de nous voir. Nous avons échangé quelques mots avec elle, et Thomas lui a expliqué les raisons de son absence dans l’enquête. Ensuite, nous sommes allés dans le bureau de Charles.

Pour avancer plus rapidement dans nos recherches, nous avons décidé de nous répartir le travail : je me suis occupée de la bibliothèque, tandis que Thomas s’occupait du bureau et des armoires. J’ai examiné chaque livre un par un pour vérifier s’il n’y avait pas de lettre cachée à l’intérieur. Après plusieurs livres, j’ai trouvé une première lettre, puis une deuxième. Pendant ce temps, Thomas a vidé chaque tiroir du bureau et des armoires. Il a finalement découvert deux autres lettres ainsi que des documents qui pourraient nous être utiles pour l’enquête.

Nous sommes retournés au salon pour informer madame Felding. Thomas a discrètement glissé les lettres dans ses poches pour qu’elle ne les voie pas.

- Madame Felding, nous venons vous informer que nous allons partir, nous avons trouvé les informations nécessaires.

- Très bien, j’espère que ces indices vous aideront dans l’enquête pour retrouver celui ou celle qui a tué mon mari.

- Je l’espère aussi.

Nous avons quitté madame Felding et sommes rentrés à la maison. Une fois arrivés, Thomas m’a proposé de rester pour le repas. Après le dîner, nous nous sommes installés dans les fauteuils, et Thomas a ouvert chaque lettre écrite par Alice Harvey avant de les lire à voix haute.

Mon cher amour,
Je pense à vous à chaque instant. Je m’imagine dans vos bras, entourée de votre amour. En regardant par ma fenêtre, je nous vois marcher main dans la main dans les petites rues de la ville. Chaque fois que je ferme les yeux, votre visage tendre apparaît, et je me perds dans vos yeux bleus, comme dans un grand océan.
Alice Harvey

- Alice Harvey était profondément amoureuse de monsieur Felding.

- Oui, tu as raison, mais je ne suis pas sûr que Charles l’aimait autant qu’elle le croyait.

Il lut ensuite la seconde lettre.

Mon cher amour,
J’ai bien reçu le présent que tu m’as envoyé pour mon anniversaire. Le collier est superbe, je vais le porter lors de notre prochaine rencontre. Merci encore pour ce cadeau exceptionnel, c’est le plus beau que l’on puisse recevoir. Je t’aime.
Alice Harvey

À la fin de la lettre, Thomas la déposa et se plongea dans ses pensées.

- Qu’est-ce qui se passe, Thomas ?

- Charles a offert un collier à Alice pour son anniversaire. Mais quand je suis allé au château chercher des indices, Agathe était en train de fouiller pour retrouver un collier qu’elle avait trouvé dans l’un des manteaux de Charles. Comme leur anniversaire de mariage approche, elle pensait que c’était son cadeau. Elle m’a dit avoir fouillé tout le château sans le retrouver.

- Et si ce collier n’était pas destiné à elle, mais à Alice Harvey ?

- C’est une possibilité. J’avais demandé à Agathe de me le décrire. Elle m’a dit qu’il était en or avec une pierre en quartz rose.

- Le seul moyen de savoir si ce collier était destiné à Alice ou à Agathe, c’est de voir lequel Alice portera à son rendez-vous.

Il lut ensuite la troisième lettre.

Mon cher amour,
Il est impératif que nous nous rencontrions rapidement, car j’ai une grande nouvelle à vous annoncer, qui, je le crois, changera notre existence pour toujours. J’espère sincèrement que vous viendrez me voir dès que vous recevrez cette lettre et qu’ensuite, nous resterons unis pour l’éternité. Je vous aime plus que tout, mon cher.
Alice Harvey

- Alice Harvey avait une importante nouvelle à lui révéler, mais a-t-elle eu le temps de le faire ?

- Quelle pouvait être cette nouvelle si importante ?

- Je pense que nous découvrirons toutes ces réponses lors de ton rendez-vous avec Alice.

Enfin, il lut la dernière lettre…

Mon cher amour,

Aujourd’hui, cela fait exactement quatre ans que nous nous sommes rencontrés. Je m’en souviens comme si c’était hier. Élise Walter avait organisé une fête pour célébrer son anniversaire dans son manoir. Quand je t’ai vu entrer dans le hall, j’ai compris que c’était avec toi que je voulais passer ma vie. Nous nous sommes assis côte à côte pendant le repas. Nous avons rapidement bien accroché, et une complicité s’est installée durant le reste de la soirée. J’ai senti, de ton côté, que notre relation resterait amicale. J’ai donc accepté, espérant qu’un jour, tu réaliserais qu’il y a bien plus entre nous que de l’amitié.

Ta bien-aimée

- Alice est maintenant suspecte.

- Pourquoi dis-tu cela ? Alice n'était pas là lors du meurtre.

- Nous n'avons pas encore envisagé qu'une personne ait pu entrer avant le meurtre. Alice Harvey aurait très bien pu pénétrer dans le château avant que cela ne se produise.

- Mais pourquoi aurait-elle tué Charles ? Elle l'aimait énormément.

- Peut-être par jalousie… Alice était amoureuse de Charles, mais lui ne voyait en elle qu'une amie. Elle aurait pu penser que si elle ne pouvait pas avoir Charles, alors Agathe non plus ne devait pas l’avoir.

- Tu as raison, Thomas ! Je n'y avais pas pensé, mais si c'est elle qui l'a tué, comment aurait-elle pu entrer dans la maison sans que personne ne le remarque ?