Épilogue : L'Écho de l'Invisible

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Quelques mois après la destruction de la friche, la ville avait déjà commencé à se transformer. Là où les Invisibles avaient autrefois créé leur œuvre secrète, un chantier imposant s’étendait désormais. Les grues déployaient leurs bras d’acier au-dessus des fondations de nouveaux bâtiments, et le bruit incessant des travaux résonnait dans les rues.

Le monde autour d’eux continuait à avancer, indifférent à ce qui avait été créé et effacé en ces lieux. Pourtant, pour Clara, Lucas, Sofia, et Julien, il y avait une part d’eux qui demeurait, cachée dans les souvenirs de cette friche. Leur œuvre éphémère, invisible désormais aux yeux des passants, vivait encore dans leur esprit. Et ils savaient que pour ceux qui avaient eu la chance d’en faire l’expérience, cet endroit n’avait pas entièrement disparu.

Un soir d’été, Clara marchait dans les rues de la ville. Les jours étaient longs, et l’air était chargé d’une douce chaleur. Elle se sentait légère, presque insouciante. Son carnet de croquis sous le bras, elle déambulait sans but précis, laissant ses pensées vagabonder.

Elle passa devant un café où elle avait laissé, des mois plus tôt, l’un des mystérieux flyers qui menaient à la friche. Par curiosité, elle entra et s’assit près de la fenêtre. Tandis qu’elle sirotait son café, elle entendit une conversation à une table voisine.

— Tu te souviens de cette soirée à la friche, il y a quelques mois ? Ce lieu bizarre avec toutes ces installations… C’était incroyable. Personne ne sait encore qui a fait ça.

Clara sourit en entendant ces mots. L’écho de leur création résonnait encore dans la ville, comme une rumeur persistante. L’œuvre des Invisibles n’avait peut-être jamais été destinée à durer, mais elle avait laissé une marque, un mystère que personne ne parviendrait à résoudre entièrement.

De retour chez elle, Clara prit son carnet et commença à dessiner. Elle laissa son crayon courir sur la page, sans chercher à contrôler ce qu’elle faisait. Les formes prenaient vie d’elles-mêmes, se mêlant, s’entremêlant, comme une danse silencieuse. À cet instant, elle ressentit une sérénité profonde. Elle ne cherchait plus à impressionner ou à plaire, juste à s’exprimer.

Les jours suivants, elle retrouva Lucas, Sofia, et Julien. Ils n’avaient pas besoin de grands discours pour se comprendre. Le simple fait d’être ensemble suffisait. Chacun continuait son chemin créatif de manière indépendante, mais le lien qui les unissait restait intact. Ils savaient que, même sans projet collectif immédiat, leur dynamique n’avait pas disparu.

Un après-midi, alors qu’ils se promenaient dans un parc, Julien s’arrêta devant un arbre imposant. Les branches se tordaient dans des formes étranges, presque sculpturales. Il se tourna vers les autres avec un sourire espiègle.

— Vous croyez qu’on pourrait faire quelque chose ici ?

Clara haussa un sourcil.

— Ici ? Dans ce parc ? Tu penses à quoi ?

Julien fixa l’arbre en silence pendant un moment avant de répondre.

— Rien de grandiose. Peut-être juste une petite intervention, discrète, qui se fondrait dans le paysage. Quelque chose que seuls ceux qui savent regardent verraient.

Sofia, toujours partante pour une nouvelle idée, sourit à son tour.

— J’aime l’idée. Mais cette fois, pas d’invitations. On le fait juste pour nous.

Lucas acquiesça.

— Exactement. Pas de mystères à résoudre, pas de public. Juste nous et l’art. Un geste invisible, presque secret.

Ainsi, leur aventure collective prenait une nouvelle forme, plus intime encore. Leur art, libéré de toute attente, devenait un dialogue silencieux entre eux et le monde, une trace laissée pour ceux qui auraient l’œil suffisamment attentif pour la voir.

Les Invisibles continuaient d’exister, non pas comme un groupe cherchant à imposer une vision, mais comme des âmes créatrices qui n’avaient besoin que de se retrouver autour de l’essentiel : l’acte de créer pour soi-même.

L’écho de la friche se dissipa peu à peu, mais il ne disparut jamais vraiment. Il persistait dans les recoins de la ville, dans les conversations chuchotées, dans les souvenirs des quelques chanceux qui avaient assisté à cette œuvre éphémère. Et pour Clara, Lucas, Sofia et Julien, l’écho continuait à résonner en eux, un rappel constant de leur liberté retrouvée.

L’histoire des Invisibles se termina là où elle avait commencé : dans l’invisible. Mais cette fois-ci, ce n’était pas une fuite ou une disparition. C’était un choix, une affirmation de leur autonomie créative. Ils avaient trouvé ce qu’ils cherchaient : une forme de liberté que rien ni personne ne pourrait leur retirer.

Et dans cette liberté silencieuse, leur art, éphémère ou non, continuerait à vivre, imperceptible, mais toujours présent.

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