5. Eterna - 1/4

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  Hendrick toucha la poignée de la porte du vieux magasin. Ethan se sentit aussitôt happé par une force irrésistible qui le propulsait dans l’obscurité à une vitesse phénoménale, bouchant même ses oreilles. Il avait l’impression d’être ballotté de tous les côtés.

  Il n’en avait jamais fait l’expérience, néanmoins, emprunter un portail devait ressembler à la sensation d’être attaché aux pales d’un moulin à vent durant une tempête.

  Tout s’arrêta lorsque ses jambes touchèrent brutalement le sol. Il perdit l’équilibre, mais quelque chose le retint. L’endroit dans lequel il se trouvait à présent était pour le moins inhabituel.

  Il avait l’impression d’être au cœur d’un tunnel, cependant il n’arrivait pas à distinguer les murs de celui-ci, ni même son plafond. En réalité, Ethan ne discernait absolument rien autour de lui.

  Une pensée frappa Ethan. Il n’était pas resté bloqué devant la boutique de vêtements. Il se pinça pour être certain qu’il ne rêvait pas, pourtant aucun doute, il était bien éveillé. Il avait passé le véritable test. Je suis vraiment un sorcier, songea-t-il en ne pouvant s’empêcher de sourire.

  Il sursauta soudainement et manqua de lâcher un cri quand Hendrick lui tapota le bras.

— Tu peux me lâcher, nous y sommes, lui dit-il.

— C’est ça un portail ? demanda Ethan en écartant sa main pour relâcher la pression sur le bras de son guide. Mais nous n’avons été téléportés nulle part.

— C’est normal. Les portails magiques ne sont qu’un moyen de voyager rapidement. Ce ne sera jamais aussi bref qu’une réelle téléportation. Ils sont toujours constitués au minimum d’une entrée, d’une sortie et d’un couloir qui relie les deux.

— C’est un peu une sorte de tunnel enchanté, c’est ça ? tenta Ethan malgré son manque de connaissance.

— Pas exactement, il en existe certains plus complexes qui peuvent comporter plusieurs entrées et sorties. En revanche, ce n’est pas le cas de celui-ci. De la même façon, tous ne sont pas aussi vides et obscurs, cela dépend beaucoup du créateur et également du nombre de personnes qui l’empruntent.

— Donc comme celui-ci est désert, on peut penser qu’il n’est pas beaucoup utilisé ?

— Absolument. Celui-ci relie ton univers au nôtre. Peu de sorciers souhaitent visiter le territoire humain, ce qui explique pourquoi le portail est si peu accueillant.

  Les sorciers ne semblaient pas vraiment apprécier les humains. Ethan songea qu’il y avait certainement eu un important conflit. Pourtant, Hendrick lui avait dit que des hommes vivaient dans le monde magique. Il espérait qu’ils étaient bien traités.

— L’avantage des portails, c’est que tous les sorciers peuvent les emprunter, dans un sens comme dans l’autre.

— Il faut aller jusqu’à la lumière, c’est ça ? demanda Ethan qui voyait un petit point brillant au loin.

— Oui, c’est notre porte de sortie. Allons-y, ne perdons pas de temps.

  Ils avancèrent durant cinq bonnes minutes dans ce lieu sombre et étrangement calme, même les bruits de pas semblaient étouffés.

  À mesure qu’ils se rapprochaient de la lumière, Ethan commençait à apercevoir les parois de ce curieux tunnel qui se composaient en une multitude d’étranges petits symboles. Il n’en reconnaissait aucun. Il n’avait de toute façon pas le temps de les observer puisqu’ils se succédaient à vive allure.

  Ils atteignirent la lumière et Ethan se sentit à nouveau happé, cette fois-ci par un halo éclatant. Que ce soit pour entrer ou sortir du portail, le voyage était toujours aussi désagréable. Ethan fut soudainement aveuglé par la hausse de clarté. Ses yeux s’embuèrent de larmes et il mit plusieurs secondes à s’accommoder des rayons du soleil.

— On s’y habitue avec le temps, le rassura Hendrick en lui tapotant l’épaule.

  Lorsque Ethan put enfin y voir plus clair, il fut stupéfait de découvrir à quel endroit ils avaient atterri. Ils se trouvaient sur un vaste port où des centaines de personnes s’agglutinaient vers un énorme navire blanc et noir. Son nom était inscrit en grosses lettres dorées sur la coque, « Le roi des mers ».

  C’était la première fois qu’Ethan voyait un bateau en vrai, et pourtant, il en était presque sûr, celui-ci était gigantesque.

— Bienvenue à Eterna, lui annonça fièrement Hendrick, la plus grande ville côtière de sorciers.

  Ethan eut presque le souffle coupé à cette nouvelle. Il ne savait plus où regarder. Il s’émerveillait dès qu’il posait les yeux à un endroit. En analysant de plus près l’architecture des bâtiments, il avait l’impression d’avoir été propulsé quelques centaines d’années dans le passé.

— Et voici donc ton moyen de transport pour te rendre à Castel-Lapis, l’informa Hendrick en désignant le navire d’un signe de la tête. Observe-le bien, il faudra que tu sois capable de le repérer quand tu le prendras demain.

— Demain ? répéta Ethan avec surprise.

— Absolument. Tu ne vas pas à l’école aujourd’hui. Je crains bien qu’il n’y ait personne pour t’accueillir puisque la rentrée n’est que demain.

— Que vais-je faire en attendant ? le questionna Ethan qui n’avait aucune envie de se retrouver seul dans un milieu inconnu et sentait déjà l’inquiétude monter en lui.

— Tout d’abord, nous allons faire un arrêt dans une auberge pour te prendre une chambre pour la nuit et que tu puisses y déposer ta malle. Tu ne vas pas la trimballer toute l’après-midi.

— Mais je n’ai pas d’argent pour me permettre une chambre.

— C’est le gouvernement qui offre, répondit Hendrick avec un clin d’œil. Allez, en route.

  Alors qu’ils avançaient le long du port, Ethan observait avec attention les passants. Tous paraissaient étonnamment normaux. La mode vestimentaire ne différerait pas tellement de celle qu’il connaissait. Il remarquait cependant que certains sorciers portaient des capes. Il y en avait de toutes les formes et de toutes les couleurs.

  Il prenait beaucoup de plaisir à voir la magie en action. Un homme marchait près de lui avec de nombreuses cages qui lévitaient à ses côtés et semblaient suivre le moindre de ses mouvements. À l’intérieur de celles-ci se trouvaient d’étonnantes poules violettes qui aboyaient comme des chiens dès qu’elles apercevaient un étal de poissonnier.

  Près de l’entrée d’un bâtiment, une femme rondelette disputait copieusement de minuscules créatures qui ressemblaient, à s’y méprendre, à des nains de jardins portant des gilets de couleur jaune.

— Je n’ai rien fait, hurlait-elle en effectuant de grands gestes. Je ne comprends pas pourquoi je devrais payer une amende pour stationnement abusif. Je n’ai même pas de carriole.

— Nous sommes seulement les messagers, voyez ça avec l’expéditeur de la lettre, lui rétorqua avec une petite voix l’un des bonhommes avant de disparaître avec ses deux autres congénères.

— Tous ces gens sont des sorciers ? demanda Ethan à Hendrick tandis qu’ils quittaient peu à peu le port.

— Oui pour la plupart. Il doit certainement y avoir quelques humains qui se promènent. Certains viennent ici pour faire des achats sur les différents étals et d’autres, qui n’aiment pas ou ne peuvent pas se téléporter, prennent le bateau pour se déplacer.

— Pourquoi certains sorciers ne peuvent-ils pas se téléporter ?

— Tous n’ont pas la même puissance magique, au même titre que tous les hommes n’ont pas des capacités intellectuelles équivalentes. Certains sont simplement trop faibles pour se téléporter.

— Je parie que je fais partie de ceux qui ne sont pas suffisamment forts, se désola Ethan.

— Tu veux rire ? s’étrangla presque Hendrick. Il existe plusieurs académies de magie et Castel-Lapis, par exemple, n’intègre dans ses rangs que ceux qui auront, s’ils travaillent assidûment, la plus grande puissance. Ce n’est pas pour rien qu’elle est prestigieuse. Crois-moi, rien qu’en étant accepté à Castel-Lapis, tu sais que tu n’es pas faible.

— Pourquoi ne s’est-on pas téléportés jusqu’à Castel-Lapis dans ce cas ?

— Oh, je crains bien que cela soit irréalisable. Les protections magiques de l’école rendent la téléportation impossible à quiconque. Ou alors, il faudrait disposer d’une puissance inimaginable. De plus, tu n’es pas en mesure d’utiliser tes pouvoirs pour le moment et tu serais bien incapable de te téléporter ne serait qu’à un mètre. Tu prendras le bateau comme tout le monde.

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