9. Des débuts difficiles - 1/4
Le soleil se levait tranquillement, déployant sa lumière sur la cour de l’immense domaine du château. Les rayons de l’astre se reflétaient dans l’imposante cascade, qui dévalait la falaise non loin de la tour. L’eau scintillait comme s’il s’agissait d’une chute de minuscules diamants.
Du mouvement dans un lit voisin détourna l’attention d’Ethan qui observait par la fenêtre depuis sa couchette. Il était le premier debout, réveillé par un lutin bossu, occupé à remettre une buche dans la cheminée de la chambre. Celui-ci s’était confondu en excuses, totalement horrifié à l’idée d’avoir dérangé un élève, mais Ethan l’avait rassuré en lui disant qu’il était déjà à moitié éveillé.
Il avait dormi comme un bébé. Jamais il n’avait passé la nuit dans un lit si moelleux, c’était semblable à se coucher dans un nuage. Aussi, la veille, il n’avait mis que quelques minutes à sombrer dans un sommeil profond.
Ses camarades se réveillèrent petit à petit. Derek s’étira et bâilla bruyamment.
— Mal dormi ? s’enquit-il à l’adresse d’Ethan en le voyant déjà prêt à aller en cours.
— Au contraire, ça fait longtemps que je ne m’étais pas aussi bien reposé.
— Et ton bras ? lui demanda Nate d’une voix étouffée tandis que sa tête essayait de se frayer un chemin dans sa robe de sorcier.
— Il est encore un peu engourdi, comme s’il ne m’appartenait pas vraiment. Mais c’est déjà beaucoup mieux qu’hier.
Evan fut le dernier à se réveiller. Ce qui ne semblait lui poser aucun problème puisqu’il fut prêt avant Nate et Derek.
— Oh, j’ai reçu du courrier, s’exclama ce dernier.
Sur son bureau reposait une lettre ainsi qu’un exemplaire d’un journal. En réalité, tous avaient eu du courrier. Tous, sauf Ethan.
— J’hallucine, mes parents ont pris un abonnement au Magistérium, grommela Derek. Ils savent très bien que je ne le lis pas à la maison. Pourquoi je le ferais ici ?
— C’est pourtant évident. Nous ne sommes plus des enfants, répliqua avec amusement Evan. On va devenir des adultes responsables au cours de nos études. Et les grandes personnes lisent le journal.
— Génial…
— Et ce tableau, il était là hier ? leur demanda Ethan tandis qu’il nouait ses lacets.
— Il ne me semble pas. Enfin, j’étais tellement fatigué que je n’ai peut-être pas fait attention, lui répondit Nate.
Un tableau en liège était installé sur l’un des pans de murs entre deux petits fanions de couleurs bleu clair. Il était tout ce qu’il y avait de plus simple, mais surtout, il était vierge. Ils ne détournèrent leur regard que quelques secondes lorsque Derek s’écria :
— Notre emploi du temps vient d’arriver.
Nate et Evan se précipitèrent vers le tableau pour prendre connaissance du document qui était apparu de lui-même.
— Ce matin on commence par un cours de magie blanche, lut Nate. Ensuite on a un trou d’une heure avant d’enchainer par botanique et cours de potions.
— Heureusement qu’on a une heure de pause, la matinée aurait été chargé autrement, fit remarquer Derek.
— Et cet après-midi ? s’enquit Ethan en se levant et en attrapant son sac à dos.
— Double cours d’études des créatures magiques et on termine par magie d’altération.
— Et après nous serons en week-end, c’est une rentrée en douceur, releva Evan ravi.
Ils quittèrent la chambre et allèrent dans la pièce principale de la salle commune. De nombreux élèves attablés prenaient leur petit-déjeuner, d’autres marchaient déjà en direction de l’escalier de la tour. Ils aperçurent Leah en compagnie d’Anna, qui leur faisait signe, elle leur avait gardé des places. Ils s’installèrent à ses côtés.
— Vous aviez prévu de ne pas venir en cours ou quoi ? demanda-t-elle en fronçant les sourcils.
— On était un peu trop absorbé par l’emploi du temps, s’excusa Ethan.
— Il n’est pas si tard que ça, si ? s’enquit Derek
— On a cours au deuxième étage dans vingt minutes, lui répondit simplement Anna.
— Ah, en effet.
— Comment vous savez qu’on doit aller au deuxième étage ? les interrogea Nate.
— Non, mais vraiment, souffla Leah avec exaspération. Vous êtes en retard parce que vous regardiez l’emploi du temps, mais vous n’avez même pas remarqué que les salles et les étages étaient inscrits dessus ?
Derek et Evan pouffèrent de rire.
— Bon, là on n’a aucune excuse, admit Nate avec un sourire timide.
Comme le repas de la veille dans la grande salle, une multitude de choix étaient présents pour le petit-déjeuner. Ethan prit deux morceaux de pain grillé et les tartina avec une confiture à la framboise qui avait l’air délicieuse.
Il aurait bien mangé plus, mais ils n’étaient pas en avance. Leah les regardait s’empiffrer à toute vitesse, ne sachant pas si elle était amusée ou encore plus exaspérée.
— Salut tout le monde, leur dit une jeune fille rousse avant de s’asseoir à la table.
Elle attrapa un morceau de pain grillé et mordit dedans à pleines dents.
— Je suis Agate, la sœur de Derek, se présenta-t-elle une fois sa bouchée avalée. Je suis en cinquième année.
— Tu ne m’avais pas dit que tu avais une sœur, Derek, lui fit remarquer Leah.
— Il faut dire que tu as passé tellement de temps à nous parler de ta famille que je n’ai pas vraiment eu le temps de présenter la mienne. Tu as vu Malik ? demanda ce dernier en se tournant vers sa sœur. J’ai l’impression qu’il m’évite.
Agate leva les yeux au ciel.
— C’est normal. Monsieur parfait fait comme s’il ne nous connaissait pas. Tu comprends, il ne faudrait surtout pas qu’on lui fasse honte. Il est encore plus insupportable qu’à la maison, tu verras.
— Ça promet…
— Ne t’inquiète pas, je prends un malin plaisir à lui rappeler qu’il a une sœur qui peut se montrer très embarrassante quand elle le décide, ajouta-t-elle avec un sourire narquois.
Elle croqua à nouveau dans son morceau de pain avant de soupirer.
— Foubadil veut ma mort… Commencer l’année avec un cours de Maléficio, ça relève de la maltraitance.
— Qui est Maléficio ? s’enquit Ethan.
— Oh, c’est vrai que vous ne la connaissez pas encore. C’est une enseignante. Elle est complètement dingue, je n’ai jamais vu ça. Elle est obnubilée par son frère. Et j’ai l’impression que c’est de pire en pire avec le temps. Moi je vous le dis, un jour elle va péter un plomb.
Elle jura puis se leva aussitôt de son siège.
— J’ai oublié de dire quelque chose à Sam et Erik. Bon courage pour votre première journée, leur souhaita-t-elle avant de quitter la salle commune en vitesse.
— Elle a l’air gentille, fit remarquer Nate.
— Elle est géniale, renchérit Derek. Elle est plus intelligente que Malik, mais elle au moins, elle ne se croit pas supérieure à nous. Heureusement qu’elle existe. Je serais bien malheureux si je n’avais que mon frère.
— Oh, tu as un abonnement au Magistérium ? demanda-t-elle à l’adresse de Derek qui avait déposé son journal à côté de lui.
— Oh, m’en parle pas, grommela-t-il en levant les yeux au ciel.
— Je peux te l’emprunter ? le sonda Ethan qui n’avait jamais lu une gazette de sorcier et était curieux.
— Fais-toi plaisir.
Comme les photographies, les images et la une du quotidien étaient animées. Ethan le feuilleta jusqu’à ce qu’un des articles attire son attention.
« INTRUSION AU MUSÉE DE RETRALIE »
La nuit dernière aux alentours de vingt-deux heures, le musée de Retralie a subi une intrusion. Les autorités n’ont décelé aucune trace d’effraction. Les défenses magiques ont cependant été désactivées. Elles affirment également qu’aucun objet de la collection de l’établissement n’est absent. Bien que rien n’ait été volé, il s’agit de la troisième incursion dans un musée en quelques semaines.
La galerie de Brestona avait d’abord été prise pour cible, suivie de celle de Verprairie. Étonnamment, à chaque fois, rien n’avait été dérobé. Les autorités avancent que les coupables sont probablement de jeunes sorciers en manque d’adrénaline. Les riverains, eux, voient l’affaire d’un œil plus sombre et rappellent qu’un groupuscule bien connu des forces de l’ordre gagne en puissance et qu’il pourrait être à l’origine de ces intrusions. Nous n’aurons pas le fin mot de l’histoire puisqu’à l’heure actuelle, l’enquête est toujours en cours.
— Des gens se sont introduits dans un musée à Retralie, leur fit savoir Ethan.
— Ce n’est pas là qu’habite Emma ? s’enquit Anna. Ce n’est pas si loin d’ici, non ?
— Rien n’a été volé apparemment, continua-t-il.
— Ça, c’est étrange, commenta Derek en terminant sa tartine. C’est quand même bizarre de rentrer dans un musée si ce n’est pour rien prendre. Ou alors ils cherchaient une relique en particulier.
— Oui enfin, si c’est ça, ils auraient pu le visiter en journée pour faire du repérage, rétorqua Nate.
— Ne sois pas stupide, répliqua Leah. Tu te doutes bien que les musées ont des réserves d’objets qu’ils n’exposent pas forcément au public.
Ethan haussa les épaules puis rendit son journal à Derek qui le glissa discrètement dans le sac à dos d’un élève qui passait par là. Ils se levèrent finalement et quittèrent la salle commune.
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