18. La clairière de Hood - 3/4
Ils se sentirent aussitôt propulsés vers l’avant à une vitesse phénoménale. Ils perdirent l’équilibre en arrivant durement sur un sol dallé et s’écroulèrent les uns sur les autres. Ils se débâtèrent quelques instants afin de se relever puis observèrent autour d’eux. Ils se trouvaient dans un long couloir de roche blanche, élégamment taillée.
La lumière aveuglante qui se situait derrière eux, s’éteignit soudain et fit place à un froid mur de pierre. Les flambeaux fixés à la paroi, qui éclairaient la voie, se volatilisèrent un à un. Le petit groupe se retrouva dans la pénombre.
— Elle a détruit le portail, soupira Nate.
— J’espère qu’elle va s’en sortir, dit Leah soucieuse. Ils ont déjà tué quelqu’un. Qui sait ce qu’ils sont prêts à faire pour découvrir l’emplacement de la pierre ?
— Tout ira bien pour elle, j’en suis certain, tenta de les rassurer Derek. Tu n’avais pas menti, Ethan, ce n’est vraiment pas agréable comme moyen de transport.
— Ne trainons pas, répliqua ce dernier. Allons-y.
Il prit la tête du groupe et marcha en direction de la lumière qui se trouvait à l’autre bout du couloir. Rapidement, ils l’atteignirent et l’instant d’après se retrouvèrent au point de départ. Ils étaient de retour au quai de Castel-Lapis.
Ethan n’avait pas eu l’impression d’être resté si longtemps chez Mathilda pourtant, il faisait nuit à présent. Nate lança un regard anxieux en direction du sentier qui menait au château.
— Vous pensez qu’ils nous cherchent ? demanda-t-il.
— C’est possible. Ils ne doivent pas être très contents, mais tout sera plus clair lorsqu’on leur racontera, se rassura Leah.
— La forêt est immense. Vous savez où on peut trouver la maison ?
— J’ai ma petite idée, répliqua Ethan en fronçant les sourcils. Suivez-moi.
Il sortit sa baguette et alluma le bout de celle-ci. Il fut aussitôt imité par le reste du groupe. Ils s’engagèrent dans la forêt en empruntant un sentier exigu. Leah et Nate jetaient des coups d’œil terrifiés autour d’eux au moindre bruit. Ethan les comprenait, il n’en menait pas large non plus. Pourtant, ils devaient demeurer forts. S’ils abandonnaient maintenant, la secte finirait par mettre la main sur la pierre.
Ils s’enfoncèrent plus profondément dans la forêt. D’énormes racines venaient parfois leur barrer le passage, ce qui rendait leur progression difficile. Derek accéléra le rythme pour parvenir au niveau d’Ethan.
— Ne me dis pas que l’on va où je pense ? lui demanda-t-il en fronçant les sourcils.
Ethan resta muet et très vite, Derek eut la réponse à sa question. De grands piliers de pierre sur lesquels étaient posés d’imposants braseros étaient disposés en cercle devant eux.
— Ethan ? l’appela Nate. Pourquoi ça ressemble étrangement au lieu où vous vous êtes fait attaquer par les Spriggans ?
— Parce que je pense que c’est ici que se trouve la maison de Hood.
— Comment ça ?
— Derek, tu te souviens de la première chose qu’ils nous ont demandée ?
— Bien sûr que non, répliqua ce dernier. J’étais bien trop occupé à regarder leurs énormes griffes.
— Ils nous ont demandé si on connaissait leur maître, lui rappela Ethan. Ils ont également dit qu'il était parti depuis longtemps.
— Tu penses que Hood vivait avec des Spriggans ? l'interrogea Leah comme s’il avait perdu l’esprit.
Trois grandes silhouettes atterrirent sur le sol, près d’eux. Leah cria de surprise et attrapa aussitôt la main de Nate qui semblait presque pétrifié par la peur.
— Je vous reconnais, susurra l’une des créatures en approchant. Je vois que vous avez amené des amis, mais cela ne change rien. Vous n’avez rien à faire là. C’est ici que votre chemin s’arrête.
— Nous ne vous voulons aucun mal, tenta de les apaiser Ethan.
— Peu nous importe, votre destin s’achève, répondit un autre Spriggan en sortant les griffes.
— Ignis, s’écria Derek.
Une boule de feu explosa juste devant les pieds des créatures, stoppant leur progression. Ces dernières sifflèrent d’indignation.
— Attendez ! Tout ce que nous souhaitons est de trouver la maison de Robin Hood, s’écria Ethan.
Les trois créatures échangèrent un regard.
— Le maître ? Vous nous aviez dit ne pas le connaître ?
— Nous ne le connaissons pas, mais nous avons rencontré Mathilda, une de ses descendantes.
— Seul le maître compte, trancha le plus petit des Spriggans.
— Écoutez, il y a un objet dans la maison de Hood que cherche la secte de la dame rouge. Ce sont de très mauvais sorciers qui n’hésiteront pas à mettre le feu à votre forêt, s’il le faut, pour le trouver, expliqua Ethan très rapidement. Tout ce que nous voulons, c’est placer la pierre à l’abri dans notre école. Un lieu où ils ne pourront pas l’atteindre.
Les créatures restèrent silencieuses un instant, puis la plus grande fit quelques pas en direction d’Ethan.
— Tes paroles nous inquiètent, humain. Nous t’autorisons à te rendre au manoir du maître. La matriarche prendra la décision de vous confier la pierre ou non. Écartez-vous du cercle.
Le petit groupe s’exécuta. Les Spriggans fermèrent les yeux et entonnèrent une étrange mélodie. Les flammes s’éteignirent une à une, les piliers s’enfouirent alors dans la terre et à la place, l’entrée d’une grotte fit son apparition. Les braseros qui étaient maintenant posés au sol se rallumèrent en même temps.
— Le chemin qui vous attend est semé d’embuches, nous serons là si vous décidez de faire demi-tour.
Sur ces mots, les Spriggans tournèrent les talons et s’enfoncèrent dans la forêt.
— Je n’y crois pas, murmura Derek. Tu avais raison, Ethan.
— J’ai bien cru que nous allions mourir, balbutia Nate.
— Les ennuis ne sont pas terminés visiblement, fit remarquer Ethan. On y va ?
Ils pénétrèrent dans la caverne avec prudence. À première vue il n’y avait aucun danger, mais les créatures les avaient mis en garde. Le chemin semblait s’enfoncer profondément sous terre. Les murs étaient poisseux d’humidité et d’épaisses racines traversaient parfois la cloison rocheuse. Ce n’était pas le lieu le plus accueillant qu’ils aient connu.
Quelques minutes après être entré, ils se retrouvèrent devant un cul-de-sac. Une paroi de pierre compacte leur barrait la route.
— Génial, on est déjà bloqué, grommela Derek.
— Il y a forcément un moyen de passer, dit Ethan.
Contre le mur se trouvaient deux grands braseros ainsi qu’un piédestal. Une page apparut sur ce dernier au moment où le groupe approchait. Nate s’empressa d’aller la récupérer. Il lut à haute voix :
« Quel imbécile ! Je me suis montré bien trop imprudent cette fois-ci. Voler la couronne du roi. Quelle idée ai-je eue ? Mon ambition m’a poussé bien trop loin. Voilà que les sbires de Sa Majesté sont à mes trousses à présent. Ils ne tarderont pas à me retrouver, c’est certain. Heureusement, je suis tombé sur cette étrange caverne. J’ignore pourquoi, mais j’ai la sensation qu’elle n’a rien de naturel. Enfin, peu m’importe, c’est peut-être ma porte de sortie. Je dois trouver un moyen de sceller l’entrée. Personne ne doit me retrouver à moins de se montrer digne de ma confiance. Une vie de solitude reste préférable au billot. J’espère que ma femme et mes enfants pourront me pardonner.
R. Hood. »
— Il a quitté sa famille pour échapper à la justice, c’est triste quand on y pense, fit Leah.
— Ça ne nous explique pas comment faire pour avancer, répliqua Derek.
— Allumons les braseros, nous y verrons déjà plus clair, dit Ethan.
Les flammes ne tardèrent pas à crépiter joyeusement, rendant l’atmosphère un peu moins sinistre. À la surprise générale, des lettres d’or apparurent sur le mur. Il était écrit : « Qui suis-je ? ».
— Facile ! Robin Hood, clama Derek à haute voix.
La paroi ne bougea pas d’un pouce.
— C’est trop évident à mon avis, fit remarquer Nate. Son nom est inscrit sur la page.
— C’est bien joli, mais il n’avait pas cinquante prénoms.
— Tu as raison, répliqua Ethan avec un sourire. En revanche, il avait un surnom. Robin des bois.
Les lettres d’or se modifièrent pour former une nouvelle phrase. « Où se trouve ma maison ? »
— C’est quoi ces questions ? se plaignit Derek.
— Il le dit dans sa note. Il cherche à savoir si on le connaît suffisamment pour qu’il nous fasse confiance, répondit simplement Leah. Le livre que j’avais lu à la bibliothèque indiquait qu’il vivait à Havenrock.
« Quelle est ma profession ? » remplaça la phrase précédente.
— Tu parles d’une mesure de sécurité, dit Derek. Ses questions ne sont pas bien difficiles. Il était voleur.
Les flammes dans les braseros gagnèrent en puissance. Les lettres se mélangèrent à une vitesse phénoménale pour finalement inscrire : « Tu me connais, mais j’ignore tout de toi. Humain, sorcier ou créature magique, d’autres dangers t’attendent. Montre-toi digne d’accéder à ma demeure. ».
L’intensité des feux était telle qu’ils éclairaient toute la caverne. La chaleur était suffocante. Le mur se mit à bouillonner et s’évapora peu à peu comme s’il était devenu aussi liquide que de l’eau. Les braseros s’éteignirent et le groupe découvrit un long couloir qui poursuivait son chemin vers les entrailles de la terre.
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