41. Back to business

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Maeva

J’essuie la bouche de Nora et dépose un baiser sur ses cheveux en lui donnant un abricot dont j’ai enlevé le noyau, puis fais de même avec Mika avant de récupérer leurs biberons de chocolat. J’évite de justesse la main pleine de confiture de mon fils et jette un oeil à mon tailleur blanc en soupirant de soulagement. Évidemment, les jumeaux n’ont jamais fait de grasse matinée de leur vie ou presque et, alors que j’allais descendre déjeuner, je les ai entendus s’agiter dans leur chambre. Retour au boulot pour moi aujourd’hui, et j’avoue que laisser ma petite famille après ces quinze jours ensemble m’a fait grimacer, ce matin. Presque autant que de voir les petits monstres debout alors que je comptais sur mon petit-déjeuner pour consulter mes mails, écouter les messages de Gaëlle et de Yoann, et donc me mettre un minimum à jour sur les derniers événements qui se sont passés à Belle Breizh.

Manque de chance, difficile de faire tout ça avec nos tornades, mais je profite encore un peu de mes vacances. J’aimerais cependant ne pas arriver trop tard, et voyant qu’Allan ne se lève pas, je finis par débarbouiller les petits et monter avec eux au premier. Je les laisse jouer dans leur chambre pour offrir à mon mari un doux réveil plutôt que deux tornades déjà bien éveillées, et m’installe au bord du lit en caressant délicatement son dos, faisant courir mes doigts de sa nuque à ses reins, non sans en profite pour mater ce petit fessier qui manque de bronzage. Je pose mes lèvres dans son cou en l’entendant grogner et souris quand il frémit sous mes caresses.

— Bonjour, mon petit mari. Il faut se réveiller, finie la grasse matinée.

— Hmm… C’est tôt, encore… Je veux dormir… Tu n’aurais pas dû me réveiller à trois heures du matin…

— Il est huit heures vingt-cinq, Chéri. Et si tu parles de ton réveil nocturne, il me semble que tu ne t’en es pas plaint au moment M, souris-je en mordillant son épaule.

— Déjà ? Mais comment c’est possible ? Tu vas être en retard au travail, là, à cause de moi ! s’inquiète-t-il en se redressant.

— Je ne suis pas à cinq minutes près, c’est rien. T’étais trop mignon quand je me suis levée, je ne voulais pas te réveiller. Les jumeaux ont mangé et jouent dans leur chambre.

— C’est toi qui es trop jolie, mon Amour, me répond-il en m’enlaçant avant de m’embrasser.

Je souris contre ses lèvres et profite de ce moment, approfondissant notre baiser. Oui, vraiment, aller bosser ce matin s’avère être une torture, même si j’ai vraiment besoin de reprendre contact avec l’entreprise et de tout savoir de ce qui s’est passé durant mon absence.

— Tu préfères que je fasse une grosse journée aujourd’hui et que je rentre tard pour me mettre à jour, ou que j’étale mes heures sur la semaine ? Normalement, en choisissant la première option, je devrais pouvoir être à la maison à dix-huit heures les autres soirs… sauf urgence, forcément, lui demandé-je en fourrageant dans sa barbe du bout des doigts.

— Fais au mieux pour toi, on s’adaptera, finit-il par dire en souriant après avoir réussi à presque cacher la grimace qui lui est venue spontanément à l’esprit.

Le mieux pour moi ? J’ai l’impression qu’aucune des solutions ne lui plaira, dans tous les cas…

— Bien… Je vais rentrer tard ce soir, et trouve-nous une activité à faire mercredi après-midi, je compte libérer ce temps le plus possible pour profiter des enfants quand l’école reprendra. Tu veux que je te ramène les jumeaux au lit ou tu te lèves ?

— Non, je vais me lever, j’arrive tout de suite, un petit tour à la salle de bain et je descends. Je t’aime, ma Maeva d’amour !

Je glousse et l’embrasse avec empressement, le faisant basculer à nouveau en position allongée alors que je m’étale sur lui. Allan rigole sous moi mais ses mains deviennent déjà baladeuses, remontant ma jupe jusqu’à ce qu’il empoigne mes fesses en nous faisant onduler l’un contre l’autre. Et c’est ma montre connectée qui brise ce petit moment qui promettait monts et merveilles… Gaëlle semble déjà au taquet puisqu’elle m’appelle. Merde, je veux retourner en vacances, moi !

— Garde de l’énergie pour ce soir, soufflé-je. Je n’en ai pas fini avec vous, mon cher mari. Je t’aime.

Je me lève rapidement et sors de la chambre avant de finir vraiment très en retard, passe par celle d’Albane pour l’embrasser doucement, et vais câliner les petits monstres qui s’en fichent bien, trop occupés à sortir tous les livres de leur petite bibliothèque en s’extasiant devant chaque animal sur les couvertures. Allan sort de notre chambre lorsque je dévale les escaliers, et je lui envoie un baiser avant de disparaître de son champ de vision. Téléphone, Ordinateur, sac à main, clés de voiture, le check est bon, et je finis par franchir les portes de Belle Breizh avec quinze minutes de retard seulement. La secrétaire de l’accueil me regarde bizarrement, il faut dire que le nombre de fois où j’ai été à la bourre depuis qu’elle a été embauchée il y a sept ans doit pouvoir se compter sur les doigts de la main… Ou alors, c’est mon sourire qui n’a rien de professionnel et est juste naturel, ce matin, qui lui fait bizarre. Peu importe, dans tous les cas, il se fane un peu quand je constate que mes collaborateurs sont déjà dans mon bureau à mon arrivée et qu’ils semblent bien plus fatigués que moi, pour le coup. J’ai presque envie de narguer Gaëlle en lui souhaitant la bienvenue dans ma vie quotidienne.

— Eh bien, vous semblez au bout du rouleau, tous les deux. Bonjour à vous ! Comment ça va ? leur demandé-je en m’installant autour de la table.

— Comme deux pauvres employés que tu as abandonnés, me reproche Gaëlle. Tu te rends compte de ce que tu n’as pas géré ? Et de la galère dans laquelle tu nous as mis ? Et on fait quoi, maintenant ?

— J’étais en vacances, Gaëlle, soupiré-je. Je crois que ça fait au moins cinq ans que je n’avais pas pris de vraies vacances, tu sais, du genre celles que prennent les gens normaux, qui coupent vraiment avec le boulot. Même pendant mon congé mater, je répondais à tes appels et tes mails. Moi aussi, j’ai besoin de souffler parfois, et j’avais promis à Allan de couper. La boîte est encore debout, non ? C’était si terrible que ça ?

— Elle n’a pas voulu m’écouter quand je disais de ne pas te déranger, Maeva. Mais oui, on a tenu malgré les difficultés. Il y a plein de choses à voir par contre…

Je me sers un café en me demandant un peu à quoi Gaëlle occupe son mi-temps dans l’entreprise. C’est vrai, elle n’est pas mon employée mais ma collaboratrice. Nous avons tout monté à deux, et avant de rencontrer son mec, elle était très impliquée dans la société, même si elle a toujours refusé de prendre les décisions seule. Et je suis persuadée que Yoann a été bien plus efficace qu’elle durant ces quinze jours. Si je n’étais pas mariée, je crois que je l’épouserais pour ces derniers mois où il n’a jamais flanché, à mes côtés, pour sa rapidité à apprendre tout ce qui pouvait être utile pour l’entreprise, pour ses prises d’initiatives, sa compréhension de l’univers Belle Breizh et son amitié, son soutien constant. Oui, bon, s’il avait dix ans de plus et que je n’étais pas mariée et amoureuse, peut-être que…

— Et toi, alors, ta prise de poste ? lui demandé-je alors que Gaëlle fait toujours la tronche de son côté.

— Je n’ai pas tous les éléments, mais je fais au mieux. Il faudrait juste définir un peu mieux ma fiche de poste, que je sache ce que je peux et ne peux pas faire, ajoute-t-il en lançant un regard en coin à Gaëlle.

— Rien ! Il faut qu’on valide, ou Maeva, ou moi ! s’emporte-t-elle.

— OK, soupiré-je. Eh bien, si tu veux perdre du temps à valider les décisions de Yoann, grand bien te fasse, personnellement, j’ai déjà suffisamment à faire sans devoir en plus le fliquer quotidiennement.

— Surtout que c’est bien de se positionner parfois, grommelle-t-il. Ce n’est pas si compliqué que ça de valider un “oui” ou un “non”... Bref, si je peux avoir un avenant, ça m’arrangerait vis-à-vis de certains dans la boîte.

— Noté. On peut s’occuper de ça dans la semaine ? J’aimerais me mettre à jour sur tout ce que j’ai manqué, puisqu’apparemment, c’était l’anarchie. Vous avez trouvé un nouveau fournisseur pour l’Aloé Véra ? Est-ce qu’il va y avoir des retards d’acheminement des produits dans nos magasins ?

— Il y a un petit producteur local qui voulait se lancer, mais Gaëlle trouve qu’il n’a pas les épaules pour le faire. Moi, j’avais envie de lui faire confiance.

— Si on fait ça avec lui, on va encore droit dans le mur dans quelques mois. Il faut prendre un grand groupe, sinon, ça va être du grand n’importe quoi.

— Eh bien, il faut savoir donner sa chance aux petits, non ? Si personne ne nous avait accordé sa confiance, il y a treize ans, pour distribuer nos produits, nous serions encore dans la galère, rétorqué-je. Tu as déjà signé, Gaëlle ? Peut-être qu’on pourrait bosser avec lui pour certains produits, et avec un plus gros pour le reste, histoire de ne pas se retrouver totalement bloqués en cas de pépin.

Ce qui me fait penser qu’il me reste plein de choses à faire pour que Yoann ait les mêmes accès, ou presque, que moi. Enfin, que son champ d’action soit plus ouvert, tout du moins. Je suis partie si vite que tout s’est fait à l’arrache…

— Non, je n’ai rien signé, Yoann a dit de t’attendre, je l’ai écouté, tu vois ?

Gentille fille… Même pas capable de s’imposer face à un nouveau collaborateur. Merde, la maternité lui a flingué le cerveau, c’est pas possible. Bon, je ne vais pas m’en plaindre, parce que j’aime bosser avec les locaux et les petits producteurs, et Yoann le sait, apparemment. Je lui adresse un sourire reconnaissant que j’espère discret et récupère le dossier qu’il me tend.

— Je vois. Eh bien, j’irai rencontrer le local et… on verra ce que ça donne. Ça urge à quel point ? C’est pour demain ou c’était pour hier ? Comment sont nos stocks ?

— Gaëlle a réussi à négocier avec L’Oréal pour avoir un peu de stock. Elle a bien géré le coup avec le commercial. Le gars était venu pour nous racheter, il est reparti en nous laissant un stock ! s’enthousiasme Yoann alors que ma partenaire sourit, fière d’elle. Mais bon, il ne faut pas traîner non plus.

OK, j’ai peut-être parlé un peu vite concernant Gaëlle. Ça me rassure, j’en conviens.

— Bien, je vais programmer ça cette semaine alors. Il faut qu’on se cale pour les vacances d’Août, que l’un de nous soit toujours présent dans l’entreprise. Pour le reste, d’autres choses qui nécessitent qu’on en discute dans l’immédiat ?

— Il faut que tu reprennes contact avec la banque… On risque d’avoir des problèmes de trésorerie avec tous les nouveaux magasins qu’on a ouverts. Les comptes flirtent avec le rouge toutes les fins de mois et là, notre interlocuteur s’inquiète franchement, m’informe Yoann. Il ne veut traiter qu’avec toi.

Magnifique… Je sais que nos dernières décisions étaient risquées, mais vu les bénéfices de nos magasins, ça promettait des résultats positifs. Le rouge, on a connu pendant un moment à la création de l’entreprise, et Gaëlle et moi avons toujours assumé les risques pris en connaissance de cause. Jamais de décisions hâtives, toujours des projets montés, étudiés et réfléchis… Mais aujourd’hui, le groupe n’est plus uniquement composé de quelques personnes… Nous savoir en mauvaise posture me fait immédiatement culpabiliser.

— OK, je vais voir ça aussi, soufflé-je, tous les bénéfices de mes vacances déjà envolés.

Le poids qui avait quitté mes épaules est bien de retour, et je sens que je vais rentrer tard. J’ai bien fait de prévenir Allan dès ce matin… et j’aurais mieux fait d’avoir une panne de réveil, tiens.

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