24 juillet, Au nord de Kars

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Le Caucase est proche, et le ciel est de plus en plus bouché. Soudain, le brouillard tombe, et nous ne voyons goutte. Au milieu de la route, une vache énorme apparaît ; une deuxième, une troisième, etc. Elles ne bougent pas d’un pouce, la priorité leur revient dans ce fief pastoral ; lorsqu’au bout d’un virage, un gigantesque troupeau (cinq cent vaches au bas mot) s’extirpe de ce temps nébuleux, comme enfanté par une atmosphère infiniment laiteuse, aux allures d’outre-monde. Bucéphale est à l’arrêt, le berger presse avec un bâton son troupeau qui n’accélère pas son pas pour autant, le train demeure présidentiel, on fend lentement la purée de pois, c’est un peu surnaturel et pourtant si naturel : c’est la paysannerie qui fête ici ses dix mille ans d’existence. Les étoiles seront ce soir des bougies. Bourrasques à prévoir avant la nuit noire, on soufflera sur le gâteau céleste. Pas conviés, Marie et moi filons vers la frontière, engloutis par la brume.

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