Chapitre 2

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La trompette retentit dans le silence de l’air marin. Enfin, la fanfare allait démarrer. Idri, tout excité, était aux premières loges dans les estrades qu’on avait disposées sur la terrasse donnant sur le jardin aquatique.

Les instrumentistes arrivèrent deux par deux sur le chemin longeant le premier et deuxième bassin et les danseurs naviguaient entre les rangs de trompettes, percussionnistes, flûtistes et harpistes. Comme l’eau d’une rivière dansant autour de solides rochers. Les danseurs portaient des masques colorés représentant la fougue du volcan, et étaient vêtus de pagnes dans les mêmes tons. On ne pouvait pas non plus manquer leurs colliers et bracelets faits des fleurs et des pierres précieuses qui faisaient la richesse de leur île, malgré son climat si dur.

Pour l’occasion, tous les villageois du port avaient été invités au palais, aussi la foule était beaucoup plus nombreuse qu’à l’accoutumée. La fanfare accompagnée de ses danseurs arriva au pied de l’estrade et s’installa sur la terrasse. Les villageois commencèrent à se mêler aux danseurs pour profiter de la fête et de la musique et la moitié des nobles situés sur l’estrade se joignirent également à la manifestation.

Idri, porté par la musique, ne put résister à l’envie de participer. Dans certaines situations, il lui arrivait de se laisser porter par son enthousiasme. Il restait néanmoins sur ses gardes et prenait toujours soin de couvrir ses cicatrices d’une chemise épaisse pour ne pas être obligé d'inventer des mensonges douteux justifiant leur provenance. Il lui était arrivé de faire l’objet de moqueries quant à cette lubie. Il avait une excuse toute faite, sa peau supportait mal le soleil. Il oublia un instant sa méfiance et se laissa porter par la foule et le rythme, jusqu’à en avoir le tournis.

Il dériva ainsi jusqu’aux bords du jardin aquatique et, estimant son bain de foule suffisant, s’extirpa doucement des derniers bras qui le retenaient pour revenir vers des endroits plus calmes. Enfin, à ce qu’il croyait… il n’était pas sitôt sorti d’un sac de nœud qu’il allait de ce pas s’y fourrer dans un autre. Après avoir fait quelques pas en arrière, il buta contre un corps qui lui, n’avait pas l’air d’être en mouvement. Il se retourna pour constater l’étendue des dégâts causés par sa maladresse et tomba sur Meroem, son cousin. La seule personne à ne pas croiser.

- Ah mais voilà le roi de la fête! En habits de bouffon ! ironisa Meroem, flanqué de ses deux acolytes qui ne manquèrent pas de pouffer de rire.

Idri baissa les yeux et ne releva pas la provocation, il ne faisait pas le poids physiquement. Meroem faisait bien une tête de plus de lui et exhibait fièrement son torse musclé. Idri, sans être rachitique, se serait quand même pris une bonne raclée. Et puis ce serait lui donner du grain à moudre que de rentrer dans son jeu, et le discréditerait en tant que prétendant au trône. Car derrière la pointe d’ironie de son cousin, c’est bien de cela qu’il s’agissait: est ce que le roi, qui ferait un discours en clôture de la fête annoncerait aujourd’hui qu’il désignait Idri comme son successeur potentiel ? Meroem en était aussi bien conscient et savait que si rien n’était annoncé aujourd’hui, tout serait possible pour lui et son père, le frère du roi.

- Et qui piétine ses loyaux sujets de surcroît ! Continua Meroem en mimant la révérence.

- Je te prie de m'excuser, Meroem, j’ai trébuché, répondit froidement Idri.

- Ah ah, tu penses vraiment pouvoir t’en sortir comme ça ? Tu ne t’es pas fait bien mal pour quelqu’un qui a trébuché, on pourrait peut-être lui montrer la différence ? Dit-il en faisant un clin d’œil en direction de ses compères qui ne manquaient pas une miette du spectacle.

Idri commençait à se sentir mal, ce serait vraiment de mauvais goût de finir amoché juste avant le discours, devoir s’expliquer auprès de son père, sans compter que Meroem ne manquerait pas de nier, évidemment. Comment allait-il pouvoir se sortir de cette impasse ?

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