Chapitre 15
Yssim, Idri et Meera tournèrent la tête de tous les côtés pour voir d'où venait ce rire. C'est alors qu'ils virent avec stupeur arriver de part et d'autre du chemin les gardes du palais, qui les tenaient en joue avec leurs lances acérées. Lentement, mais avec une certaine vigueur retrouvée, Jahro arriva en boitant, le sourire aux lèvres.
¬ Alors mes petits fugitifs, vous ne croyiez tout de même pas que le vieux Jahro ne connaissait pas le passage secret ?
Il éclata de rire de nouveau:
¬ J’ai emprunté ce passage avant vous, et je connais tous les secrets de ce palais !
Idri était stupéfait: son père qui avait d'habitude toutes les cartes en main, n'avait pas dû prévoir ce retournement de situation. Ou alors il ne s'était pas suffisamment méfié de son frère ? Ils tiraient tous les trois une mine déconfite devant l'échec cuisant de leur fuite. Ils avaient perdu…
¬ Yssim, tu vas nous rendre ce que tu nous as pris maintenant.
Idri se tourna vers Yssim, qui ne bronchait pas. Jahro cherchait sûrement la larme dorée. Et il pensait que c'était Yssim qui l'avait volée ! Cette information était à leur avantage, il fallait s'en servir et ne surtout pas le démentir. Idri se demandait bien pourquoi Jahro tenait tant à cet objet, lui qui n'avait toujours considéré la larme dorée que comme un bijou à haute valeur sentimentale pour lui, mais sans valeur pour les autres. Pour le moment, il était plutôt découragé et ne voyait pas comment ils pourraient s'en sortir.
¬ Vous avez trahi Ibrahim, l’accusa froidement Yssim, tentant de gagner un peu de temps.
Jahro secoua la tête et balaya l'accusation d'un geste de la main
¬ Je me suis toujours demandé pourquoi Ibrahim s'était acoquiné avec quelqu'un de ton espèce. C'est lui qui nous a tous trahis en s'associant aux anges. Ce royaume est à nous ! Ton espèce a caché des secrets depuis des décennies, et Ibrahim vous a protégés au lieu de protéger son propre peuple ! Lui-même est responsable de sa chute.
Idri grimaça: il voyait dans les yeux de son oncle que Jahro pensait sincèrement ce qu'il disait et dans ces conditions, il n'était pas étonnant qu'il ait fini par décider de se débarrasser d'Ibrahim. Maintenant qu'il connaissait la vérité à son sujet, il n'hésiterait pas à se débarrasser de lui par la même occasion. Ils étaient tous les trois rassemblés au milieu du plateau, faisant face aux gardes qui les menaçaient. Idri sentait l'angoisse qui commençait à le gagner, il fallait qu'il se calme pour pouvoir réfléchir aux possibilités qui se présentaient à eux, sans paniquer. Il y avait une dizaine de gardes armés jusqu'aux dents, dirigés par Jahro, qui malgré son regain d'énergie, n'était pas des plus en forme. Soit ils se rendaient sans faire la moindre tentative, soit ils se défendaient en prenant le risque d'être blessés, voire pire, soit ils tentaient de s'enfuir. Idri turbinait sans trouver de solutions à leur problème. Jahro était le grand vainqueur de ce duel.
¬ Fini de jouer maintenant. Yssim, sois raisonnable, tu ne voudrais pas qu’Idri et Meera soient blessés par ta faute, non ?.
Yssim restait droit et ne disait rien, son visage avait repris le masque d'indifférence qu'il savait si bien jouer.
¬ Très bien, on va donc devoir passer à l'étape supérieure.
Jahro fouilla dans la poche de son veston et en sortit une pierre verte. La pierre brillait d’un éclat particulier, comme si une boule d'énergie blanche brûlait à l'intérieur. Elle était semblable à certaines des pierres qu'ils avaient vu dans la salle du trône quelques jours auparavant, mais celle-ci semblait briller plus fort. Idri commença à ressentir le même malaise qu'il avait ressenti dans les escaliers. Regardant autour de lui, il réalisa qu’Yssim, Meera, mais aussi les gardes ressentaient la même chose que lui. Une sorte de panique se lisait dans leurs yeux, et l'expression tétanisée par la peur prenant tout son sens. La sensation était très puissante, et envahissait tout son corps, de sorte qu'il ne fut bientôt plus capable de bouger ses jambes.
Par réflexe, il agrippa la larme dorée, tenant le pendentif dans son poing. Et là, quelque chose d'aussi étrange se produisit. Le malaise qu'il ressentait se dissipa peu à peu, et il put reprendre totalement ses esprits. Pour les autres, rien ne semblait avoir changé. Mu par l'urgence de la situation, idri comprit qu'il devait agir. Maintenant. Jahro se délectait de la peur d’Yssim et n'avait pas réalisé que c'était Idri qui portait l'objet de son désir. Il attrapa Meera par la main, et se mit à courir sur le plateau afin de dépasser la colonne de gardes par la gauche.
¬ Yssim ! Suis nous! hurla-t-il en désespoir de cause, ne sachant pas si l’ange aurait la force de contrer le pouvoir de la peur.
Meera était comme un pantin, et Idri dut la tirer de force pour qu'elle le suive. Quant à Yssim, il ne bougeait pas, Jahro leva sa canne vers lui, stupéfait de voir son neveu lutter contre les pouvoirs de la pierre:
¬ Idri, comment peux-tu…? C'est toi qui l'as ! Rugit-il quand il comprit enfin. Gardes, emparez-vous de lui!
Mais les gardes aussi étaient sous l'effet de la pierre, et, tétanisés, ils ne bougèrent pas d'un orteil pour se mettre à leur poursuite. Idri jeta rapidement un œil en arrière pour constater qu'ils avaient le camp libre. Au fur et à mesure qu'ils s'éloignaient, Meera se mettait elle aussi à courir plus efficacement, preuve que les pouvoirs de la pierre diminuaient avec la distance. Une fois qu'ils se furent suffisamment éloignés, ils allèrent se cacher derrière un pin touffu pour observer la scène.
Jahro commençait à montrer des signes d'agacement, et ils l’entendirent vociferer et maudire sa mauvaise fortune. Puis au bout d'un court instant, ils virent les gardes se mettre de nouveau à leur poursuite. Il en conclut que jahro avait dû ranger la pierre pour les rattraper. Il vit alors Yssim, alors réveillé, se battre comme un beau diable, évitant les lances et en retenant ainsi quelques-uns.
¬ Nous ne pouvons rien pour lui, dit Idri, attristé, à Meera, nous devons nous enfuir afin que son sacrifice n'aie pas été vain.
Ils reprirent alors leur course vers l'avant. Idri fit la liste dans sa tête des potentiels endroits où ils pourraient se cacher. Comment allaient-ils pouvoir se sortir de cette galère ?
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