Chapitre IX
- ... Je reviens.
Toute l'attablée me dévisagea, alors que je me relevai, et rangeai ma chaise. Je finissai ma bouche en avalant une grande gorgée d'eau, et fourrai mon téléphone dans la poche de mon jean. Elora me lança un regard interrogateur, alors que je commençais à m'éloigner.
- T'es sûr ? Me demanda Solal, réellement inquiet.
Pandora m'avait vu. Elle m'adressa un regard espiègle, beaucoup trop appuyé pour qu'il ne s'adresse pas à moi. Elle sortit du foyer, telle une ombre, sans se retourner.
- Ouais, t'inquiète. Je suis là dans deux secondes.
J'essayais de ne pas la perdre de vue, et sortai, sans paraître pressé ou indiscret. L'air froid me mordit le visage alors que je bifurquai vers le bâtiment pricipal, contigu à la rue. Je réprimai un frisson qui me parcourai les épaules, et un arrêt cardiaque en voyant un éclair écarlate disparaître dans le hall des casiers.
" Sale fouine, tu vas voir ! "
Les larges foulées de mes jambes me menèrent devant le hall d'entrée. La colère me montait au nez comme de la moutarde, et j'arrivai bien vite au niveau de la porte vitrée, ouvrait le battant en grand du hall, et saisissait le bras de la jeune femme qui m'avait fui, la plaquant violemment contre les casiers jaune poussin. Je lui levait bien haut les bras au dessus de la tête, la tenant de la sorte à deux mains, sachant bien que ma force démesurément inexistante ne ferait absolument rien pour l'entraver. Je bluffai, et j'étais sûr qu'elle le savait.
- C'est vous !
Je ne dominai la jeune femme que d'une dizaines de centimètres, mais c'était amplement suffisant pour que je me sente un tout petit peu intimidant. Apparemment, je ne lui imposait rien de bien intéressant, mis à part la peau de ma nuque. Elle bloquait sur le moindre morceau de peau que j'avais laissé à l'air libre. Dieu sait qu'il n'en avait pas beaucoup. Les yeux flamboyant d'un désir malsain à mon égard, Pandora descendit lentement ses mirettes sur mon pull, s'arrêtant sur le bout de hanche qui avait été découvert par mes bras levés, et qui avait dénudé cette toute petite partie de peau.
- Alors minet, t'es enfin décidé à me sortir le liquide ?
Elle se mordit la lèvre sensuellement, tortillant son corps coincé contre le métal glacé et moi même. Il y avait quelque chose de ridicule dans son comportement, mais pourtant d'extrèmement séduisant, c'était indéniable. Mais je ne faiblissai nullement face à cette piètre tentative.
- Je ne vous pai ...
- Allons Olivier, ne me fait pas ces yeux là ... je vais finir par me pendre à ton cou.
J'aurai pu lui foutre un coup de poing, la balancer hors du hall ou lui hurler dessus, mais je n'aimais pas les conflits. Et ce genre de situation était sur le point de m'échapper, je ne me faisais pas d'illusions, et tentai de ne pas perdre la face.
Elle rapprochai dangereusement sa tête ébourrifée de moi, et je distinguai sans effort les dents effilées derrière ses lèvres impeccablement overlinées de parme. Je réprimai presque un frisson de dégoût, et me ressaisissait en la plaquant un peu plus aux casiers. Pour sécuriser le tout, je fichai une de mes jambes entre ses cuisses, qui étaient suffisemment écartées pour me permettre une telle manoeuvre.
- Foutez moi la paix.
Pandora ressera instantanément ses cuisses sur ma jambe. Son corps était chaud, alors que je m'attendais plus à une froideur cadavérique, voir même glaciale. Ce contact entre le tissu me fit frémir.
- Lauzel, je t'en supplie. Pas de chichis entre nous. Et pas la peine de me vouvoyer, Minet.
J'enrageai. Elle osait me donner des surnoms aussi ... indéfinissables ?! A moi ? Je ne suis pas Abraham Lincoln et encore moins la dernière star à la mode, mais je méritai mieux que ce piètre " Minet ".
- Je ne suis pas ton minet.
Elle avait gagné. Elle savait que cela m'agacerait. Elle avait raison, et ça me faisait chier. Machiavélique, c'était le mot. Elle n'était pas une succube pour rien. Je devrai me méfier.
- Avec cette bouille de chiot perdu ? Pardonne moi très cher, mais tu as la tête à te faire appeler Minet. Je suis sûre que tu fais un carton auprès des petites cocottes de ton école. regarde toi ... Ces belles boucles brunes en font rêver beaucoup, et ce regard, chéri ... Ce regard. Ils sont à tomber. Tu as des Beretta à la place des yeux.
- Ce ne sont pas tes affaires. La coupais-je, agacé.
Elle recula sa tête, apparemment vexée que je ne sois pas sensible à son petit jeu.
- Maintenant, ce sont les miennes. Je n'aime pas vraiment qu'on me vole la vedette, surtout quand on parle de mes clients, j'adore avoir l'exclusivité sur la marchandise.
Encore une tentative de séduction parfaitement millimétrée. Une fois de plus, je n'étais pas dupe. Et de ce fait, je me disais que finalement j'avais peut-être un avantage, aussi mince soit-il.
Alors comme ça, j'étais de la marchandise. Rien qu'un morceau de bidoche à dévorer, en tartare, rôti à la broche où au four, elle n'en avait cure, du moment qu'elle me mangeait. Très bien, elle n'obtiendrai que dalle.
- Tu n'auras rien de moi tant que je serai encore en vie.
Outrée, Pandora me dévisagea, l'air revêche. Je la sentai se tendre entre mes mains, et cela ne présageai rien de bon. Elle manqua de me fracasser la tête avec son front. Je l'évitai seulement par chance.
- T'es coincé je te rappelle. Je te hanterai jusqu'à la fin de ta misérable existence, que ce soit en possédant une gamine pour te tourmenter, en occupant ta tête, en t'empêchant de baiser, en tuant tes proches. Je t'ai permis de retrouver ton frère, et ce service a un prix. Tant que je n'aurai pas mon dû, je te ferai vivre un enfer.
Piqué au vif, je me rapprochai de Pandora, et soutenai son regard assassin. Le petit jeu avait l'air de lui plaire, elle aurai pu me bouffer rien qu'avec ses iris.
- Tu ferais mieux de me tuer tout de suite, alors.
Un sourire naquit sur ses lèvres.
- Je ne tue pas mes clients. Sinon, le Malin seul saura ce que le sort me réserve. Alors bon, pas la peine de me répéter, tu sais très bien ce que je veux.
Elle baissa de nouveau les yeux vers moi, ou plutôt vers la boucle de ma ceinture, en se mordant la lèvre. La bougresse ne lâchait pas le morceau. Je continuai à la provoquer, me prenant à ce petit jeu.
- Tu pourrais me violer, me posséder ou me faire subir les pires atrocités qui te passent par la tête. Alors pourquoi tu ne le fais pas ?!
- Tu le sauras bien assez tôt, Minet. Je t'ai à l'oeil, mais je ne suis pas la seule apparemment.
Je tiquai. Quelque chose n'allait pas dans ses paroles, elle ne me disait pas tout. Et cela ne présageait rien de bon, ni pour moi, ni pour quoi que ce soit d'autre.
- Fais gaffe à ton cul.
- Olivier !
Le battant de verre s'ouvrit à nouveau, et Solal apparut dans l'entrabaillement.
Je lâchai finalement la succube, qui s'arracha à ma faible étreinte et alla se réfugier en geignant vers mon collègue, qui m'avait suivi, et interpellé. Mon ami me questionnait silencieusement, prenant la jeune femme par l'épaule alors qu'elle sanglotait presque contre son imposante veste. Son visage allait du mien à celui de la femme qui lui était inconnue.
- Bah alors jeune fille, on se fait agresser par mon collègue ? Je suis désolé pour lui. Fit-il un peu gêné.
Il est vrai que je n'avais pas pour habitude de plaquer des gens au mur dans mon lycée, ni nulle part, d'ailleurs. Je n'étais pas violent pour un sous, pour ainsi dire, jamais. Gêné, et me rendant compte que je m'étais quelques peu emporté dans un endroit aussi incongru, je fourrai mes mains dans mes poches, et restai planté là, le regard braqué sur les deux intéressés devant moi.
- Encore mille excuses... Commença l'Israëlien. Olivier n'est pas si agressif d'habitude. Je le punirai. T'es nouvelle ici ?
Il dominait Pandora de toute sa hauteur, et sans avoir besoin de la plaquer où que ce soit. Ses larges mains posées sur les hanches, Solal adressait un sourire des plus enjoleurs à la petite peste devant lui. Elle se désintéressa bien vite de moi, posant un regard flaboyant sur le large torse de mon collègue. Evidemment, il avait remarqué le petit jeu de Pandora, et se jetta tête la première dans le piège.
- Ouais, je viens d'arriver.
- Quelle classe ?
- BTSA Horticole deuxième année, j'ai été mutée ici, mes parents ont déménagé, et moi avec ... Couina la furie cramoisie, arborant une moue timide et une bouille de souris. Elle avait cerné mon collègue en quelques secondes, c'était horrifiant.
Mais attendez ...
BTSA Horti ... NOM DE DIEU !!! La salope ! Elle était rentrée dans la même classe que moi. J'enrageai, et me retenai de lui en coller une. Par quelle sorcellerie avait-elle pu intégrer cette classe, je n'en savais rien, et je m'en foutai.
- T'es pas sur ton lieu d'alternance ? Continuai l'autre con, rapetissant de plus en plus l'espace vital entre lui et la succube.
" Evidemment qu'elle n'y est pas, Trou Du Cul ! Elle n'est même pas du bahut !!! T'as de la merde dans les yeux Solal ! "
J'amorçais un geste pour partir, resserrant mes poings dans mon jean, et rentrai mon cou dans mes épaules, impatient. je tapai du pied, irrité et passablement en colère. Un café ne serait pas de refus, et il me tardait soudain de retrouver mon tupperware de nems au porc.
J'adressai un regard pressant à Solal, qui fit mine de ne pas s'intéresser à moi. Je savais intérieurement qu'il n'attendais que mes explications, et qu'il essayait de rattraper la situation, pour ne pas m'attirer d'ennuis. Il n'était pas tout à fait stupide, finalement. De toute évidence, mon collègue n'avait pas perdu de temps, et fait de ma boulette d'une pierre deux coups.
- Non, pas encore malheureusement ... Comme je viens d'arriver, il faut que je trouve une entreprise ...
- Oh ... Et bien ... je pourrai t'aider à rentrer à la ville de Nantes ... Et c'est quoi ton petit prénom, ma grande ?
- Pandora.
Un sourir carnassier fendit le visage du jeune homme devant elle. Il arcqua un sourcil, visiblement satisfait du patronyme qu'elle portait.
- Joli ...
J'échangeai un regard avec Solal, puis Pandora. Essayant de me faire le plus discret possible, je tentais de lui faire comprendre que la conversation était close, et une très mauvaise idée dès le départ. Pressant, j'arrivai à leur hauteur, et apperçut au loin le survet orange de Cindy apparaître dans la cour.
- Que dirais tu de ... Boire un verre après les cours ? Tu finis quand ?
Je soufflai intérieurement, encore plus exédé. Décidément, il ne changerait jamais sur ce point là, et ne perdais pas une seconde. Sa mécanique de séduction était bien huilée. " Arrête de penser avec ta queue merde !!! " De son côté, la succube sembla réfléchir quelques secondes, échangeant un regard espiègle avec moi, un index collé sur ses lèvres, dans une expression des plus ridicules.
Apparemment, Solal n'était pas de cet avis, et son sourir enjoleur montait de plus en plus vers ses oreilles.
- ... Seize heures trente ?
Mon ami s'éloigna de la jeune femme, satisfait. Il pencha la tête vers moi, goguenard. C'est à ce moment là que notre hamster orange, aka Cindy, entra dans le hall. Sidérée, elle décida de ne rien dire, son regard allant de Solal à moi, de Pandora à Moi, De Pandora à Solal.
- Bien, je passe te chercher tout à l'heure, alors.
Je me retenai de trépigner de frustration. " T'es foutu, Solal, ravi de t'avoir connu. "
Parallèle, Chapitre IX - A suivre ...
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