Chapitre 3

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L'appartement fut vidé en quelques jours.

Mika n'avait plus eu de nouvelles de son amie depuis l'agression. Elle avait tenté de l'appeler chez elle et à son travail. La pauvre avait même cherché des nouvelles via les réseaux sociaux de son amie, mais rien. Le silence complet. À son travail, on lui annonça qu'elle avait démissionné et qu'elle avait ramassé ses affaires. Démunie, Mika se décida à prendre contact avec les voisins de Yüna.

— Allô ?

— Oui, bonjour, je suis une amie de Yüna. J'essaye de la contacter depuis plusieurs jours, mais rien. Savez-vous au moins si elle va bien ?

— Oh ! Ma pauvre... Yüna est à l'hôpital psychiatrique.

Mika eu un moment d'hésitation avant de lui demander :

— Pardon ? Elle est où ?

— À l'hôpital psychiatrique. Elle a été tellement choquée par son agression qu'elle a décidé de partir pour se « soigner », comme elle me l'a dit.

— Oh mon dieu... Vous avez un moyen de la joindre ? Je suis très inquiète...

— Oh, euh... Oui, attendez, je vais vous trouvez ça... Ah, le voilà ! Vous notez ?

Les deux femmes discutèrent encore un temps, puis Mika se lança.

— Qui c'est ? répondit une petite voix tremblante.

— Nyla ? Ma belle, c'est moi, Mika.

Le silence lui répondit durant quelques secondes qui la firent douter.

— Mi-Mika ? Mais co... comment tu as eu ce numéro ?

— Bon dieu que ça fait du bien d'entendre ta voix ! s'exclama la femme en laissant couler les larmes qu'elle avait retenues jusque-là.

— Je... Je suis désolée Mika, mais je... J'avais besoin de me retrouver... seule.

— Tu n'as pas à t'excuser, ma belle. Mais j'étais super inquiète. J'ai appelé à ton travail et ils m'ont dit que tu avais démissionné.

— Ou... oui...

[...]


Après une bonne heure de discussion, les deux femmes raccrochèrent, soulagées de s'être retrouvées. Un sourire était même venu fleurir sur le visage de Yüna. Mais rien de ce qui s'était dit n'avait changé sa décision. Mika le comprenait et même si elle voulait aider son amie en la faisant venir chez elle pour que Yüna puisse se reconstruire dans un lieu sain, son amie avait poliment refusé.

Elle partirait.

Mika avait cependant raison sur un point : elle aurait dû la prévenir. Mais ce fameux soir, elle n'avait pas réussi à faire quoi que ce soit, hormis rester assise dans un fauteuil chez ses voisins, la peur au ventre et les crises s'enchaînant les unes après les autres, la faisant trembler comme la terre durant un séisme puissant. Ses dents avaient claqué très fortement, son regard perdu n'exprimait rien d'autre que la peur, s'agrandissant avec les crises. Sa bouche figée dans une envie de crier sans que le moindre son n'en sorte et son cœur qui battait lourdement contre sa poitrine... Ce soir-là, tétanisée dans ce fauteuil, elle s'était dangereusement approchée du précipice.

Pourtant, dans ce brouillard infini, une voix avait persisté. Apaisant son esprit, l'aidant à calmer ses crises et l'aidant à retrouver un semblant de paix. Cette voix... SA voix !

« Yüna, tu n'es pas seule, je suis là ! »

Comment connaissait-il son prénom ? Mika aurait-elle cafté sans faire attention ? Quelqu'un avait-il fait des recherches sur elle ?

Depuis plusieurs jours, alors qu'elle avait été internée dans cet hôpital qui la connaissait bien, beaucoup de questions se bousculaient dans sa tête et notamment celle-ci : comment savait-il que c'était son nom ?

À chaque fois qu'une crise se déclenchait, elle l'entendait dans sa tête. Elle pouvait respirer et prendre du temps pour reprendre pied.

Le psy qui la suivait lui avait dit que c'était comme une bouée jetée à la mer pour tenter de l'aider à se raccrocher à la réalité.

— Connaissez-vous cette personne ?

Si elle connaissait Hawkly ? Bien sûr qu'elle le connaissait ! Du moins, elle savait qu'il s'appelait Kang Shi Ji, qu'il avait 27 ans et qu'il était très intelligent. Elle aurait pu faire un exposé sur lui et son groupe, mais elle ne connaissait que ce que les médias disaient d'eux. Elle ne l'avait jamais rencontré en vrai, il ne savait pas qui elle était, hormis une fan parmi tant d'autres...

Savait-il qu'il lui avait sauvé la vie, ce soir-là ? Non, elle en doutait fortement. De plus, elle-même ne savait pas que le jeune homme avait été son sauveur.

— Lui avez-vous déjà parlé ? demanda le psy.

Oh oui ! Par écrit, noyé dans la foule de messages sur un tchat sur son ordinateur.

— Il faudrait que vous puissiez entrer en contact avec cette personne, car elle semble être le point de départ de votre potentielle guérison.

Yüna avait rit jaune.

[...]


Pourtant, c'est ainsi qu'elle se retrouva à éplucher les listes d'embauches de Séoul, afin d'y aller. Mais les dossiers pour partir là-bas étaient nombreux et sa condition actuelle ne permettait pas de partir sans qu'un médecin l'ait déclarée apte à sortir de l'hôpital.

Après l'appel des deux femmes, Mika s'était reconnectée pour assister à un live du groupe. À peine arrivée, elle fut harcelée de messages demandant des nouvelles de Nyla. Le groupe en entier était présent devant son écran. Hawkly affichait un sourire triste à la caméra. Ce dernier avait attendu de voir Nyla ou de croiser Mika pour savoir ce qu'il s'était passé et si son amie allait bien. Mais ni l'une ni l'autre n'avait réapparu.

— Bonsoir, tout le monde ! s'exclama Shrinlo, le plus jeune du groupe. Comment vous allez, ce soir ?

Les messages fusèrent comme à l'habitué, jusqu'à ce que Hawkly ne se redresse d'un coup sur sa chaise.

— Mika ? Mika, tu es connectée ?

Cette dernière hésita, puis lui répondit :

« Oui... »

Un vent d'espoir emporta le jeune homme.

— Dis-moi que tu as de ses nouvelles ? Est-ce qu'elle va bien ?

« Je suis désolée de pas m'être connectée ces derniers temps. J'ai tenté de la contacter par tous les moyens possibles, sans succès... » expliqua la femme derrière son écran.

— Ne t'excuse pas, je comprends. As-tu pu avoir de ses nouvelles ? Comment va-t-elle ?

Mika hésita longtemps avant de se décider à lui écrire, son amie n'accepterait jamais de voir sa vie étalée sur internet.

« Je suis sûr qu'elle fake ! » écrivit une fan en se moquant ouvertement de la situation de Yüna.

« Je t'interdis de te moquer de mon amie comme ça ! » s'énerva Mika en tapant frénétiquement sur le clavier.

— Chérie, fit son mari derrière elle. Tu devrais lui envoyer un message privé pour le tenir au courant.

— Tu as raison.

Mika tapa : « Pas ici, en MP* ».

Le groupe lut rapidement la phrase et Lovers fit basculer la discussion sur un autre écran posé à côté du principal.

Mika commença alors à écrire tout ce qu'elle avait pu récolter comme informations jusqu'à l'annonce fatidique.

« Elle est en hôpital psychiatrique. Sa voisine m'a dit qu'elle y était allée d'elle-même, ne se sentant pas du tout à l'aise chez elle. Elle a quitté son travail et rendu son appartement. »

Plus le groupe lisait les informations, plus ils se décomposaient. Sur le live, les fans s'inquiétaient de ce que pouvait bien leur dire Mika pour qu'ils en perdent la voix et que plus aucun d'eux ne réagissent.

Soudain, Hawkly quitta la pièce.

Il avait failli.

Il n'avait pas réussi à protéger quelqu'un et il allait le porter sur sa conscience.

***

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