Chapitre 18
— Mika ?
— « Dieu merci, vous répondez ! » s'exclama la femme au téléphone.
— Qu'est-ce qu'il y a ? l'interrogea Ka Si, installé dans un des fauteuils du salon de l'appartement de son leader.
Après une journée assez banale, ils s'étaient tous retrouvés chez Shi Ji. Ils avaient eu le courage de ne rien faire, hormis allumer la télé pour la regarder sans grand intérêt, jusqu'à ce que le téléphone du chanteur ne sonne, affichant le nom de l'amie de la belle Bretonne. Inquiet, il avait décroché et mis le haut-parleur. Le ton de la femme était tendu et elle paniquait.
— « Bonsoir, vous avez des nouvelles de Yüna ? »
— Non... pas depuis qu'elle est partie...
— « Elle devait sortir avec son entreprise pour fêter la vente de ses premiers designs, mais je n'ai plus aucune nouvelle depuis 2 bonnes heures et je suis très inquiète... »
Mika ! Mais oui ! Ils auraient dû passer par elle pour avoir des nouvelles de la jeune femme ! Pourquoi aucun d'eux n'y avaient pensé ?! Les garçons se regardèrent et sur leurs visages s'afficha la même émotion.
— Mika, savez-vous à quel rest-
— « Dans un bar du quartier de son travail. Elle m'a expliqué ce qu'il s'était passé avec le CEO. Elle m'a interdit de vous contacter, car elle pense que c'est une sorte de test qu'il lui fait passer. Mais je vous en prie, trouvez-la ! J'ai peur qu'il lui arrive quelque chose. Tout le monde sait que vous allez mal et elle non plus ne va pas bien. Elle ne peut plus vivre sans vous ! »
— Je sais, murmura Shi Ji, la tête baissée. Comptez sur nous. On va la retrouver et je vais la ramener à la maison, peu m'importe ce qu'en dira l'agence.
— « Trouvez-la, vite ! Elle ne va pas bien, Shi Ji... Pitié, sauvez mon amie... »
À sa manière, Mika leur transmettait les cris de détresse de son amie qui n'avait déjà plus aucun moyen de le faire par elle-même. Yüna était en danger, elle avait mal et se trouvait dans une situation qu'ils n'osaient imaginer. Ni une ni deux, bien que fatigués, les garçons récupérèrent manteaux et masques, puis quittèrent en trombe l'immeuble.
Ils furent accueillis par une multitude de flashs, mais ils n'en avaient plus rien à faire d'être exposés ou non, seules comptaient Yüna et la détresse que leur avait dépeinte Mika.
Alors que les cris retentirent tout autour d'eux, Alexis leur indiqua la direction où se trouvait la petite boutique où bossait la jeune femme.
— C'est par là !
— On en a pour combien de temps ?!
— Même pas vingt minutes !
Les garçons se mirent à courir dans la direction indiquée. Il leur fallut un peu plus de vingt minutes, à cause des fans et paparazzi qui les suivaient, les encerclant pour prendre des photos, mais une fois arrivés, ils se mirent à chercher le bar en question.
Une bande sortit de l'un des petits restaurants, chantant à tue-tête des slogans aussi débiles les uns que les autres. Alexis reconnut sans mal la patronne de Yüna, coup de chance ou du destin ou encore simple hasard, ils n'auraient su le dire, mais ils se précipitèrent vers eux.
— Madame, vous vous souvenez de moi ? demanda l'aîné.
La femme, torchée, leva la tête et plissa les yeux de façon à mieux se concentrer sur la personne qui lui parlait et soudain eut un éclair de lucidité.
— Oh, mais oui ! Vous êtes venu avec Yüna et un autre, plus jeune, pour des tissus !
— Oui, savez-vous où elle est ?
— Elle... Elle a dit qu'elle rentrait chez elle parce qu'elle ne se sentait pas bien, baragouina cette dernière, peu préoccupée par la situation.
— Cette fille est... étrange... hoqueta un homme.
— Elle se mélange jamais aux autres et quand on la touche, c'est limite si elle pleure pas ou ne nous vomit pas dessus, rétorqua une autre femme.
— Savez-vous où elle habite ?
La femme, bien alcoolisée, fouilla dans son téléphone pour trouver la fiche employée de la
Bretonne où se trouvait une adresse. C'était un bâtiment où se trouvaient plein de logements pour les étrangers qui venaient avec un visa.
[...]
Yüna n'arrivait presque plus à respirer. Elle avait besoin de quelqu'un, mais elle savait que ça lui était impossible. Son esprit partait déjà à la dérive et son cerveau refusait de s'alimenter en oxygène.
Après sa course folle, elle avait plus ou moins réussi à atteindre son logement et à s'y enfermer, mais la crise qu'elle avait mainte et mainte fois tenté de repousser avait fini par prendre le pas sur ce qu'elle avait essayé de faire pour se sécuriser.
Elle s'était persuadée qu'elle avait réussi à s'en sortir et pensait pouvoir atteindre l'objectif qu'elle s'était fixé. Mais voilà que ce soir, tout partait à vau-l'eau.
Shi Ji...
Si seulement elle s'était battue un peu plus, alors elle n'en serait sûrement pas là. Ils savaient d'avance que leur relation n'irait jamais plus loin que ces deux semaines idylliques.
Elle avait connu un sursis des plus heureux, loin de la peur et des gens qui l'effrayaient. La jeune femme avait pu rencontrer des personnes chaleureuses qui n'avaient pas cherché à la blesser. Aucun jugement dans leur regard non plus.
Shi Ji...
Le chanteur lui avait apporté une paix qu'elle avait longtemps cherchée, mais qui lui avait été arrachée sans lui laisser le temps de l'apprécier. Elle commença à suffoquer. Enfermée dans son petit appartement vide, elle ne se sentait plus en sécurité.
— Shi... Ji...
Dans un soupir, elle tentait toujours de l'appeler. Comme une incantation grâce à laquelle elle pourrait le faire apparaître pour qu'il la sauve de son enfer revenu beaucoup trop vite.
— Sh... i... Ji...
Des cris et des bruits précipités dans le couloir retentirent jusqu'à ce qu'elle entende tambouriner contre son entrée. Prise de panique, elle ne répondit pas, mais continua d'appeler le chanteur. Soudain, la porte fut défoncée et elle l'entendit l'appeler :
— Yüna ! Yüna !!
— Sh... i... Ji...
Elle les entendit fouiller les quelques pièces de son logement, avant qu'une silhouette n'apparaisse dans sa chambre et ne vienne s'agenouiller près d'elle.
— Yüna ?! Tu m'entends ? Ma belle, c'est moi, respire. Je suis là ! s'exclama le jeune homme.
— Sh... i... Ji...
— Oui, c'est moi. Tu sens ? C'est moi, je suis là ! Je te ramène à la maison !
Il posa près d'elle son bras pour qu'elle sente s'insinuer en elle une odeur familière qui fit gonfler ses poumons et libéra cette pression qui encerclait son crâne, l'empêchant de respirer correctement.
L'odeur boisée du jeune homme pénétra chacun de ses pores jusqu'à son cœur qui se souleva. Elle s'accrocha à ce bras, y collant son visage pour inspirer correctement. Yüna ouvrit les yeux et la dernière image qu'elle vit avant de sombrer fut celle du chanteur fou d'inquiétude, les traits du visage tirés et le regard froid, les larmes au bord des yeux, la respiration haletante et les lèvres tremblantes.
— Yüna ? Non, non ! Yüna, reste avec moi ! S'il te plaît, reste avec moi ! Shin Ya, appelle une ambulance... non ! On a pas le temps de les attendre. Où est l'hôpital le plus proche ?
— Attends, je regarde... à dix minutes, il est juste derrière.
Ni une ni deux, il donna des directives aux garçons et se défit de son manteau pour en recouvrir la jeune femme qu'il prit dans ses bras. Elle pesait son poids, mais il n'allait clairement pas attendre que l'ambulance arrive et risquer de la perdre avant même d'avoir pu faire quoi que ce soit.
Il partit en trombe, suivi par Min Ko et Shin Ya, laissant Alexis et Ka Si faire la valise de la trentenaire. Shin Ya appela leur manager pour lui expliquer la situation et demanda à ce que le CEO soit mis au courant.
Shi Ji avait mal au cœur et l'air lui manquait, mais il courait comme si sa vie en dépendait. Le corps de la jeune femme dans ses bras y était pour beaucoup. En aucun cas il n'abandonnerait.
Quand ils arrivèrent aux urgences du petit hôpital, il se savait exposé, car il n'avait rien pour cacher son identité, mais il s'en foutait, seule elle comptait.
On la prit en charge et elle fut emportée dans une salle d'examen, le laissant là, au milieu d'une tempête intérieure qui risquait à tout moment de le détruire.
***
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