Chapitre 28
Quelque temps plus tard, il leur fut notifié qu'un procès allait se tenir, géré par un juge coréen et un français.
Durant celui-ci, Yüna avait été tenue de raconter, pour la deuxième fois, l'agression en Bretagne, mais aussi celle qu'elle avait vécue ici.
Dans la salle, elle avait dû affronter ses anciens collègues français qui avaient fait le voyage pour la collaboration avec son travail dans la petite boutique, mais aussi ses collègues coréens. Le groupe TRYomphe l'avait accompagnée, ainsi que Ho Ly qui représentait l'intérêt de ces derniers. Un avocat de l'agence lui avait été imposé par le CEO qui n'avait pu faire le déplacement. Bien sûr, Mika et son mari étaient là pour ne pas la laisser affronter seule ce procès terrifiant.
Les larmes, la terreur, l'humiliation... Elle avait tout expérimenté dans le tribunal, mais savait qu'elle n'était plus seule pour affronter ce moment très éprouvant.
Plus elle livrait ces choses, plus elle se rendait compte que Gérard ne disait rien. Il se contentait de la regarder avec une haine flamboyante, ainsi qu'une promesse de la détruire quand il sera libéré, car il comptait sur sa patronne pour avoir son soutien.
Quelle ne fut pas sa surprise quand elle fut appelée à la barre. Cette dernière témoigna contre lui, avançant d'autres plaintes déposées par des employées ou clientes.
À elle, on lui reprocha de n'avoir pas fait le nécessaire à l'époque pour éviter ce qu'il s'était produit chez Yüna et ce qu'il avait pu faire à toutes ces femmes. Les deux juges lui exprimèrent leur mécontentement sur la manière dont elle avait totalement négligé ses responsabilités vis-à-vis de Yüna, dont l'histoire aurait pu trouver une fin bien plus tragique.
Avec la présence du groupe de garçons dans la salle, cette dernière s'était retrouvée débordante de monde. Les voir durant un procès international avait tellement fait parler que tous les médias s'y étaient précipités pour avoir des infos croustillantes à placarder sur la une du lendemain ou dans leurs infos du soir. On pouvait également y voir des fans arborant des pancartes demandant de lourdes peines contre cet homme. Sur d'autres, on pouvait y lire des mots d'encouragement pour Yüna dans toutes les langues.
Shi Ji avait été aussi appelé à témoigner et ce fut à cet instant précis que Gérard réagit. Il se débattait furieusement pour passer par-dessus la table des accusés pour s'en prendre au leader du groupe, dont le calme était exemplaire. Sa compagne avait besoin qu'il le soit et même s'il bouillonnait de vouloir asséner son poing dans la figure de l'individu énervé, le jeune homme se retint et continua de s'approcher de la barre.
Personne n'avait osé bouger, pas même Yüna, assise entre Mika et Shin Ya. Ce dernier lui tenait la main pour partager avec elle sa chaleur et une force qui pourrait l'aider à affronter ce qui se déroulait devant ses yeux.
Shi Ji exposa ce qu'il savait avec calme, fixant son regard dans celui de sa belle qui s'était figée. Il exposa également leur rencontre, bien qu'il omit certains détails. Il raconta ce qu'il avait fait depuis qu'elle était avec lui. Puis le médecin qui s'était occupé de Yüna, depuis que le jeune homme l'avait amenée à l'hôpital le soir où il avait failli la perdre, vint également témoigner à la barre. Il avait entre ses mains le dossier médical envoyé depuis la France par l'hôpital qui avait pris en charge la bretonne des années avant son départ.
Ce qu'il raconta mit du poids dans la décision des juges qui ne se fit pas attendre.
Et elle avait été sans appel, Gérard serait renvoyé en France pour une peine de 3 ans et une amende décidée par la justice française. Sentence jugée trop légère pour la jeune femme et son entourage.
[...]
Yüna avait tout de même pu souffler de soulagement.
Elle avait tenu jusqu'à la dernière seconde de ce procès qui avait fini par la faire suffoquer.
Le CEO s'était empressé de faire une conférence de presse tout de suite après, afin de donner des précisions sur ce qui allait se passer ensuite. Il énonça des poursuites judiciaires contre certaines personnes, il indiqua vouloir faire appel, car il jugeait que les 3 ans étaient beaucoup trop peu vu l'ampleur des dégâts subis par Yüna. Il parla également du futur de la jeune femme, ainsi que celui du groupe.
— Elle vit avec moi ! déclara Shi Ji avec force.
— Où est-elle, actuellement ? demanda une journaliste.
— Yüna a assez subi pour le moment. Elle est rentrée chez moi avec un couple d'amis à elle. Ils doivent être en train de regarder cette conférence. expliqua calmement le jeune homme.
D'autres questions furent posées, allant jusqu'à la plus déplacée qui mit Shi Ji dans un état impossible, mais dont il ne dut rien montrer. Il y répondit cependant, évitant soigneusement les humiliations portées à la jeune femme.
Soudain, Shi Ji se leva et déclara :
— Ma compagne a assez subi dans sa vie pour que des étrangers décident qu'ils ont tous les droits de l'insulter ou la critiquer. Juger sans connaître peut-être fatale, tout comme la curiosité mal placée. Mais sachez que tout a un prix.
Il adressa un regard violent aux divers journalistes, puis quitta les lieux sous une pluie de flashs crépitants. Il fut dirigé vers une sortie de secours, pour éviter la horde qui attendait à l'extérieur.
Une seule chose comptait pour lui et celle-ci l'attendait chez eux.
[...]
Le van le déposa au niveau du parking sous-terrain de l'immeuble et il se précipita vers l'ascenseur. Arrivé devant la porte de son appartement, il n'eut pas le temps de l'ouvrir que Yüna le fit pour lui et lui sauta dessus pour le prendre contre elle, soulagée de le voir de retour.
— C'est fini. dit-il en la tenant contre lui, plongeant son visage dans le cou de la jeune femme, humant son odeur.
— Tu n'aurais pas dû les menacer, lui lâcha-t-elle, toute tremblante.
— Ils l'ont mérité.
Yüna s'écarta légèrement pour le toiser du regard. Le sourire qu'il lui adressa se voulait assuré et rassurant. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour venir l'embrasser avec amour, car oui... Il s'agissait bien là d'amour avec un grand A. Et ils comptaient bien se le faire savoir.
Le reste du groupe, le manager, l'avocat, le CEO, ainsi que quelques gardes du corps de ce dernier, arrivèrent dans l'appartement.
Yüna laissa les hommes s'installer dans le salon pour rejoindre son amie dans la cuisine, afin d'y préparer un véritable festin. Et quel repas de Rois ! Bœuf Bourguignon, soupe de rouille avec ses croûtons, galettes bretonnes, salade et gâteaux. La table allait déborder de plats, mais Yüna voulait exprimer sa reconnaissance et pour ça, elle n'avait rien trouvé de mieux que de préparer de bons plats de son pays.
Même le mari de Mika alla dans leur appartement pour chercher une bouteille de vin ramenée directement de sa cave personnelle. Elle ne fit pas long feu, comme tout le reste, d'ailleurs.
Cette soirée conclut une période douloureuse pour la jeune femme, mais aussi un nouveau chapitre pour tous. La seule question qui ne trouvait pas de réponse était celle de son avenir professionnel. Qu'allait-elle faire à partir du lendemain ? Shi Ji l'avait fait démissionner et sa psychologue lui avait clairement fait savoir qu'elle désapprouvait le moindre travail extérieur pour un certain temps. Cependant, elle refusait d'être un poids pour Shi Ji et son groupe. Elle ne voulait pas qu'ils la couvent continuellement et qu'ils l'entretiennent. C'était même impensable pour elle.
Pourtant, ce fut durant la nuit qui suivit le dîner qu'elle trouva enfin l'idée. Alexis et elle avaient fait sensation avec leurs créations pour les garçons, alors pourquoi ne pas proposer ses services exclusifs au CEO de l'agence pour confectionner les tenues du groupe ? Voilà son idée, mais encore fallait-il l'exposer au directeur... C'était pas gagné.
Le lendemain, elle s'enferma dans le bureau aménagé pour se plonger dans une réflexion créative. Elle feuilleta divers magazines parlant du groupe que Shi Ji gardait dans une bibliothèque. Elle trouva enfin l'inspiration après avoir lu une interview d'Alexis parlant de comment il trouvait sa propre imagination pour créer.
Mika n'y connaissait rien à la mode. Ce n'était clairement pas son domaine, mais pour aider son amie, elle lui prépara un en-cas, afin de l'encourager et surtout lui éviter de tomber dans les pommes, car trop concentrée, elle était capable d'oublier de se nourrir.
Ce fut quand Shi Ji s'imposa le quatrième jour qu'elle lui sauta au cou et qu'un cri de joie retentit dans la pièce.
— Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-il surpris.
— J'ai enfin terminé ! Il faut... Il... Il faut qu'on aille à ton agence ! Tout de suite ! s'exclama la jeune femme.
Intrigué, son compagnon s'écarta d'elle pour la questionner du regard.
— Je veux proposer mes dessins à ToXy Entrainement pour vos tenues. Lui expliqua-t-elle. Je veux travailler en exclusivité pour vous.
Les yeux écarquillés, Shi Ji jeta un coup d'œil aux dessins éparpillés sur le bureau. Il fut scotché par ce qu'il y trouva. Yüna était douée, il n'y avait aucun doute là-dessus, mais est-ce que la proposition plaira vraiment au CEO ? Shi Ji en doutait, surtout après tout ce qu'il s'était passé entre eux.
D'un signe de tête, il accepta de l'y emmener. Elle ramassa rapidement ses affaires, rangea dans un lourd dossier ses dessins et beaucoup de notes prises pour expliquer son projet. Ils se retrouvèrent dans la voiture du jeune homme quelques minutes plus tard. Il fonça droit vers l'agence, dans l'espoir que la jeune femme obtienne gain de cause et qu'on lui accorde ce qu'elle souhaitait.
[...]
Dans une salle de réunion, assise face au CEO, certains actionnaires de l'agence, l'avocat et Ho Ly, Yüna se retrouva prise d'un stress ultime.
Shi Ji s'était vu refusé l'entrée de cette salle et le groupe également quand les garçons arrivèrent quelques instants plus tard.
— Boss ! s'exclama Min Ko.
— Où est Yüna ? demanda Alexis.
— À l'intérieur, répondit-il, stressé. Je peux pas entrer, ils ont interdit l'accès. Elle doit se battre toute seule. Cette fois, on peut pas l'aider. Yüna doit affronter ça seule.
— Mais elle va paniquer, entourée d'autant de monde ! s'exclama Mika.
Le couple de français s'était joint à eux quand il avait quitté l'appartement.
— Oui, elle est terrorisée. Mais hyung est avec elle et c'est son avenir qui se décide derrière ces portes. Lui dit Shi Ji. C'est à elle d'affronter ça. On peut qu'attendre.
Ils entendirent plusieurs voix s'élever et une plus petite, tremblante, répondre avant qu'elle ne devienne plus affirmée.
Shi Ji sourit.
— Je pense que nous n'avons plus à nous en faire. Dit-il enfin. Elle a l'air de s'en sortir comme une cheffe.
Après une bonne heure de débat, ils purent entendre des applaudissements. La porte s'ouvrit enfin et tous ceux qui s'y trouvaient sortirent de la salle, sourires aux lèvres, visiblement contents de ce que Yüna leur avait proposé.
Elle sortit peu après, cherchant Shi Ji du regard. Il se leva et ouvrit ses bras, cueillant cette dernière qui lui sauta au cou, s'accrochant à lui avec force. Il referma son étreinte autour d'elle, caressant son dos et ses cheveux.
— J'ai... J'ai réussi ! s'exclama-t-elle.
— Je savais que tu pouvais le faire, je suis fier de toi, lui dit-il.
Il posséda sa bouche devant tout le monde, se fichant grandement de qui les voyaient. Tout ce qui comptait pour lui était cet instant. Il était fier d'elle, de ce qu'elle avait réussi à faire seule. Leur baiser se fit si passionné qu'ils manquèrent rapidement d'air.
— Vous avez devant vous votre nouvelle styliste ! annonça le CEO, un léger sourire sur les lèvres.
La joie électrisa le groupe et le couple de français.
Une nouvelle ère allait commencer et cette fois, elle n'était plus obligée de subir quoi que ce soit. Elle venait de faire le premier pas dans la direction qu'elle souhaitait. Elle avait décidé elle-même ce que serait son avenir.
***
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