02 - La maison, la famille
Adèle préparait le dîner dans la petite cuisine, à l'arrière de la maison. L’unique et étroite fenêtre de la pièce donnait sur le mur au crépi grisâtre de la bâtisse d’en face. Une petite coulée séparait les deux pignons. Comme bien souvent dans les vieux bourgs, un dédale d'étroits passages sillonnés entre les habitations, formant un réseau de ruelles mal entretenu, d’impasses amenant aux petites cours intérieures où le soleil n'arrivait pas à pénétrer ou rarement. Une faible lumière se faufilait par cette ouverture et suffisait à peine à éclairer le plan de travail. C’est là, sur les carreaux d'une faïence aux motifs démodés qu'elle s'installait pour éplucher, couper ou peler les légumes de tous les repas, qu’elle confectionnait avec le plus grand soin, résignée à faire le nécessaire, pour que chaque jour des repas corrects soient servis à la table du foyer. Elle s'affairait à cuisiner, elle ne le faisait pas par plaisir, mais par nécessité. La nécessité d'unir autour d’un plat ceux qu’elle aimait. Ce besoin de fédérer, de réunir autour d'une table sa famille était une obsession. Ces instants étaient sûrement pour elle les plus importants d’une journée. On se devait de respecter des horaires, des rituels bien établis, dans une sorte de représentation de la famille idéale, où chacun trouvait sa place et même si sa famille rechignait à se plier à ses convenances, cela l'a rassuré et l’a comblé malgré tout de se savoir utile. On se devait de respecter ce rythme qu'elle imposait. C’était sa seule demande, la seule contrainte qu’elle se permettait de réclamer en échange de son travail. Elle passait du temps à refaire les recettes que sa mère lui avait transmises, ce qui ajoutait un petit côté solennel et cérémonial à sa cuisine. D’ailleurs elle ne supportait pas les plats vite fait, sans saveur, les plats industriels précuisinés, bref la malbouffe en générale. Avec les années, elle s'était installée dans ce rituel rigide, qu’elle s’imposait à elle-même et à sa famille. La cohésion familiale se faisait grâce à elle, par elle, comme lui avait inculqué implicitement sa mére fidèle aux traditions chrétiennes; dans une famille la femme est au centre du foyer. Le dimanche en apothéose, pour perpétuer ces pratiques désuètes, elle recréait le repas dominical de son enfance. Elle soumettait sa famille à ces conditions conformistes et conventionnelles auxquelles elle s'accrochait fermement, souhaitant ainsi éviter la déliquescence de son foyer. A dix huit ans après son brevet de coiffure, elle s'était installée à Courseulles-sur-Mer où elle avait trouvé un travail dans un salon tenu par une mégère, mielleuse devant les client mais dès que ceux-ci étaient parti se transformer en une vraie peau de vache. Entraînée par des amies, elle s'était retrouvée à cette soirée un peu malgré elle, réticente à devoir affronter tous ces étudiants, pourtant la vie estudiantine l'a fascinée, tous ses jeunes semblaient si brillants, mais ils étaient d’un autre monde que le sien, elle aussi aurait aimé faire de longues études, mais la vie en avait décidé autrement. Elle avait rencontré Christophe à cette occasion. Assis à une table, il jouait avec un jeu de cartes, qu’il manipulait avec adresse. Âgé de deux ans de plus qu'elle, il lui avait plus immédiatement. Il l'a fascinée, il était drôle et à l'époque son côté taciturne ne l'avait pas rebuté. Elle trouvait en lui ce qu’elle avait toujours cherché chez un garçon. Il lui avait parlé de sa passion, de son goût pour le jeu. Elle s'était laissé emporter par son enthousiasme, l’avait accompagné à des tournois, séduite par l’ambiance exaltée des rencontres et le talent de Christophe. A l'époque elle n’y trouvait rien à redire, c'était une marotte comme une autre. Elle le suivait, fier d’avoir attiré l'attention sur elle d'un de ses étudiants remarquable, elle qui n’avait aucune facilité. Mais Christophe semblait plus intéressé par le poker que par ses études. En plus des tournois, il passait des nuits à jouer et à entraîner ses camarades dans des parties où les enjeux les dépassaient. Christophe prenait plaisir à les dépouiller, sans se soucier des conséquences. Jusqu'à ce soir de novembre où tout avait basculé dans l’horreur. Une tragédie qu’elle n’aurait jamais imaginé possible. Elle avait bien essayé de dissuader Christophe, de ne pas persister dans sa folie. Mais il ne l’avait pas écouté et ce jeune homme était mort. Elle prenait conscience que cette addiction du jeu pouvait mener jusqu’au drame. Alors après ce jour funeste, elle le fit jurer de ne plus jamais jouer, d'oublier le poker, de ne jamais recommencer. Il promit. Leur liaison aurait pu s'arrêter là, mais leur amour tenait bon, comme uni par ce drame, soudé dans un pacte pernicieux. Quelque mois après, ils emménagèrent ensemble, Christophe s’installait dans le petit deux pièces qu’elle habitait près de la mer, il se laissait vivre, ne parlait plus de jouer, se consacré exclusivement à ses études comme pour oublier. Elle rêvait, ravie d’avoir un homme à elle. Elle avait bien compris qu'il n'était absolument pas doué pour la vie domestique. La cuisine et toutes ces besognes ménagères le rebutait. Alors elle prit petit à petit, insidieusement, le rôle de factotum. Adèle se persuadée qu’avec le temps les choses changeraient, mais rien ne changeait. Christophe, lui, n'imaginait rien et se laissait vivre au jour le jour et s'impliquait à regret aux besognes que demandait la vie commune. Ainsi chacun faisait un effort pour ne pas décevoir l’autre dans cette relation naissante, pour ne pas le contrarier, lui laissait assez de place et d’espoir pour continuer l’aventure. Malgré ce déséquilibre évident, ils étaient heureux, satisfaits de ce qu’il trouvait dans cet amour nouveau, décelant dans l’effort de l’autre une marque d’affection. Ils faisaient alors de longues promenades sur la plage, traçant leur avenir dans de merveilleux rêves ou ils se voyaient heureux et comblés où chacun trouver sa place dans ce schéma convenu, un schéma qui allait devenir avec les années le carcan de leur relation. Mais ce qui à l’époque de leur rencontre pouvait passer pour négligeable, insignifiant, voire secondaire, dans leur caractère dissemblable, deviendrait lentement le poison de leur amour. Les années passaient, Adèle était tombée enceinte, pressée par son envie d’enfant, persuadée que le joli bébé qui naîtrait ajouterait à leur union, un lien plus fort, solide, durable. Son ventre s'arrondissait et pour que cet enfant ne vienne pas au monde hors mariage, Adèle avait convaincu Christophe, d’abord réticent, inflexible, hostile à cet enfant qui ajoutait une contrainte à leur vie, à se résoudre à ses arguments. Après de longues semaines à repousser sans cesse sa décision, il imposa que tout devait se dérouler simplement et rapidement. Heureuse, Adèle se félicitait de ce qu’elle avait obtenu, ils s’uniraient, en petit comité, dans l’église du bourg. Elle y tenait plus que tout, il lui fallait une cérémonie religieuse, en souvenir à sa mère qui n’aurait jamais accepté une telle situation déshonorante et aurait qualifié cette naissance d’illégitime. Après le décès de ses parents, orpheline à l'âge de quatorze ans, elle s'était juré de respecter leur mémoire. Christophe se résignait à cette contrainte, acceptant à contrecœur, lui qui n'était jamais entré dans une église. Malgré son ventre rond de sept mois et le peu d'enthousiasme de Christophe, le prêtre d’abord réticent avait accepté de les unir, touché par la ferveur d'Adèle, il cédait, célébrerait la messe le mois prochain. Ils avaient saisie la date que le prêtre proposait, la seule qui restait de libre avant trois mois. Il fallait faire vite, organiser la noce, envoyer les invitations. Une dizaine d'invités, pas plus, s'était entassée autour de la table de la petite salle communale de la grange aux dîmes qu’ils avaient réservée pour l'occasion. Adèle avait invité son oncle André et sa femme Madeleine, c’etait la seule famille qui lui resté avec un grand-pére du coté de sa mère. Trop vieux pour se déplacer, le vieil homme leur avait envoyé une charmante carte de félicitation qui avait ému Adèle aux larmes. Accompagné d’un peu d’argent, le petit mot qu’il avait écrit d'une main tremblante et fatiguée, déclinait gentiment l’invitation. Christophe lui avait convié ses parents, une vieille tante, son frère et sa sœur qu’il voyait rarement, qu’à l'occasion des fêtes et des grands événements et qui retourneraient, sitôt les lumières éteintes, dans un chacun chez soi, indifférents à la vie de l’autre. Malgré leur petit nombre, ils avaient dansé, rit et bu jusqu’au matin, entraîné par le frère de Christophe qui ne manquait pas d’humour et de joie de vivre. Un mois après, Adam était né et le modeste appartement ne leur suffisait plus.
Ils avaient longtemps cherché un bien à la hauteur de leurs maigres revenus. Ils avaient remarqué cette maison sans prétention au centre du bourg de Ouistreham, mais qui pouvait répondre à leur besoin et à leurs rêves de s’installer durablement ensemble. Ils avaient hésité longtemps, mais en dépit des difficultés financières et après plusieurs visites, suivies de longues discussions, pesant le pour et le contre, ils s'étaient lancés dans l'aventure, s'étaient promis de tout faire pour être heureux ensemble ici et d'installer leur famille dans cette commune tranquille. Quand ils avaient emménagé, les souris couraient sur le sol, longeant les murs, se cachant derrière les caisses de bois empilées les unes sur les autres. Derrière les volets clos, un air vicié remplissait les pièces plongées dans une pénombre froide et humide. Seul, un rai de lumière, planté dans le mur du fond où s'adossait la cheminée dont le dessus et la face étaient en marbre, laissait entrevoir les larges tomettes hexagonales, sales et poisseuses de la salle à manger. Les grains de poussière dansaient dans la clarté du jour qui pénétrait par les lames disjointes du volet. Des pots de fleurs renversés, cassés, jonchaient le sol de la pièce. De vieilles litières souillées s'entassaient contre la cloison qui séparait la pièce en deux. Des odeurs de mousse, de terre et de moisissure émanaient de la pièce et se mélangeaient aux effluves d'urine de chats. Le salpêtre transpirait et remontait au bas des murs. Les vieilles pierres à nues, imprégnées et rongées, ruisselaient d’une eau blanchâtre. Dans ce capharnaüm d’immondices, il était périlleux de poser un pied et d'avancer jusqu'à la pièce voisine, qui allait devenir la cuisine. Un escalier en bois, craquant à chaque marche, donnait accès à l'étage.
- Il faudra régler ce problème, avait dit Christophe.
Ils riaient heureux, s'amusaient du travail à accomplir. Là aussi les pièces n’étaient guère mieux, les rats et les souris avaient profité de l’absence de résidents pour pulluler et couraient entre les ordures. Des cartons, des cageots, du papier, toutes sortes de détritus envahissaient les pièces, jonchaient le sol. La maison dormait dans cet état d’abandon misérable depuis le départ de l’ancienne propriétaire, une marchande de fleurs. Il n’y avait aucun confort, tout était à faire. Pas de salle d’eau, pas de chauffage. Toutes les pièces étaient vétustes et humides malgré le soleil de juillet. Ils avaient choisi de vivre ici. Ils débarrassèrent et nettoyèrent ce taudis. Puis se lancèrent dans de petits travaux à la hauteur de leurs moyens. Dès les premiers mois, la cuisine avait subi quelques améliorations. Mais les travaux prenaient plus de temps et d’argent qu’ils ne l'avaient estimés. Le rêve des premiers jours ne s'était pas transformé en réalité. Encore aujourd'hui, il restait tant de choses à faire, Christophe s'était désintéressé peu à peu de la maison comme il se désintéressait maintenant de sa famille.
*
Une radio posait sur l'étagère au-dessus de l'évier, diffusait l’adagio du troisième concerto de Mozart. Elle se passionnait pour la musique classique et aimait, après le travail tout en cuisinant, écouter les concerts du soir. Mozart était l'un de ses compositeurs préférés. Enfant, ses parents l'avaient inscrite au conservatoire départemental, où elle avait suivi des cours de piano. La musique l’avait aidé à traverser bien des moments difficiles. A la mort de ses parents, après leur accident de voiture, quand elle se sentait triste ou mélancolique, que quelque chose la tracassait, elle se mettait au clavier et improvisait des mélodies aux tonalités mineures. Elle finissait par se perdre dans sa musique, oublier le temps et ses tracas. Elle passait ainsi des heures dans ses songes remplis de notes. Dans le foyer où elle avait fini son adolescence, on l'avait d’abord autorisé à poursuivre les cours, puis elle avait tout arrêté, lasse, préoccuper par d'autres sujets plus importants pour sa survie, balloté dans un monde où elle devait se battre seule. Parfois elle le regrettait. Aujourd'hui elle serait sûrement une parfaite pianiste. Elle avait grandi, la femme qu’elle était devenue n’avait plus rien à voir avec l’adolescente quelle avait été. Elle gardé malgré la quarantaine approchant, sa silhouette élancée de ses vingt ans et elle s’en félicitait. Pour autant, elle n’avait jamais aimé son corps. Ce corps lui déplaisait, depuis qu’il s'était transformé à sa puberté; ses cuisses trop larges, ses épaules tombantes, ses seins ridicules et ses hanches qui lui donnaient la forme d’une poire l’a complexé. Elle se regardait dans le miroir et rien ne lui convenait. Plairait-elle encore aux hommes ? Elle se posait parfois la question. Son rôle d’épouse et de mère l’avait fait renoncer à séduire. D’abord pour elle-même, ne se trouvant pas assez belle, puis pour son mari qui ne la regardait plus. Reléguer dans un quotidien où il n’y avait pas de place pour le glamour. Elle s’habillait simplement, se maquillait peu. Levée la première, couchée la dernière. Au salon de coiffure où elle travaillait depuis des années, elle ne ressentait pas le besoin de se faire remarquer, elle s’apprêtait juste assez pour accueillir les clientes, cela suffisait et convenait au patron.
La délicate musique de Mozart emplissait le rez-de-chaussée. Elle se laissait bercer en épluchant les carottes qu'elle ajouterait à la sauce de ces fameuses lasagnes. Adam était dans sa chambre au premier étage. Les examens blancs arrivaient à grand pas et lui prenaient beaucoup de temps. Quand il s’installait à son bureau pour étudier, il pouvait travailler pendant de longues heures. Avant de monter, il lui avait dit qu'il préparait ses fiches de révisions pour ses prochaines épreuves. Il se passionnait pour ses études. C'était un bon élève, apprécié par ses professeurs. Adam avait laissé sa porte ouverte et les effluves de cuisine remonter jusqu'à lui.
- Ça sent bon, lança-t-il depuis sa chambre.
La musique couvrait ses paroles, sa mère ne répondit pas immédiatement.
- Qu'est ce que tu dis ?
Elle s’était déplacée au pied de l'escalier, certaine d’avoir entendu son fils.
- Je dis, ça sent bon, répéta-t-il un peu plus fort.
Elle hocha de la tête.
- Ça sera prêt dans une petite demi-heure. Si tu veux faire une pause et aller prendre l’air dans le parc, c’est maintenant.
Elle regagna la cuisine sans attendre sa réponse. Adam aimait aller se promener dans les jardins de l'abbaye derrière l'église avant de manger pour se détendre après ses longues heures passées à travailler derrière son bureau. Parfois, il venait s'asseoir sur un banc pour réviser ou lire à l'ombre d'un des nombreux arbres. Il aimait passer son temps à écouter le chant des oiseaux et cherchait à les reconnaître; le merle et ses alertes, le rouge gorge et son chant territorial, la pie et ses appels. Il appréciait cet endroit calme, coincé entre l'école, le vieux bourg et le cinéma. Les touristes ne se perdaient pas ici, ils restaient sur la plage de Riva bella. Aujourd’hui il n’en avait pas le cœur, il préférait rester dans sa chambre en attendant l'heure du repas. La cloche de l’église sur la place donnait les heures, sept coups sonnèrent. Elle annonçait la fin de journée, emplissant le bourg de ses ondes sonores. Il jeta un regard dehors depuis sa fenêtre. Les rues étaient déjà désertes et les rares personnes qui traînaient encore semblaient se hâter de rentrer chez elles. Le boulanger avait baissé ses rideaux et une lumière blanche rayonnait entre les panneaux de toile. Adam descendit rejoindre sa mère. Tout était prêt, la table mise.
- J’ai faim, lança-t-il.
- On va attendre le retour de ton père, il ne devrait pas tarder. Elle avait prononcé ces mots sans conviction, ignorant quand Christophe serait de retour.
Adèle, malgré les protestations d’Adam, retardait le plus possible le dîner, espérant le voir arriver.
- Je ne sais pas pourquoi on attend encore, grogna Adam qui ne se faisait plus aucune illusion sur son père.
- Tu pourrais faire un effort. Ton père n’aime pas manger seul. Il aura été retenu au travail.
- Ouais, sûrement, s'enhardit Adam.
Ils regardèrent le journal télévisé de huit heures ensemble, puis las de patienter, ils se mirent à table. Christophe n'était toujours pas rentré. Un soir ou deux dans la semaine, Christophe tardait à revenir. Ses absences répétées pesaient sur l'ambiance familiale. Elle avait fini par renoncer à l’appeler ou lui envoyer des messages pour lui demander l'heure à laquelle il serait de retour à la maison. Épuisée, lasse, de cette situation, de ce sentiment d’indifférence que leur témoignait Christophe. Au début, il expliquait par de petits messages simples son retard, mettant souvent en cause son travail. Puis il répondit de façon laconique et imprécise. Comme s’il n’avait d’autre raison que de souhaitait retarder le plus possible son retour. Parfois elle devait se contenter d’un “j’arrive”, ou d’un “commencez sans moi”. Elle s'attristait de ce que leur vie était devenue. Quand il rentrait, il ne s'attardait pas à des explications, ni même à des excuses. Il ne racontait pas grand chose de ses longs moments passés à l'extérieur. Elle n'avait jamais chercher à en savoir plus et se contenter de ses explications lapidaires. Mais elle avait le sentiment désagréable d'être mise de côté, de ne plus faire entièrement partie de sa vie. Il ne semblait plus s'intéresser à sa famille. Vivait une autre vie en dehors de son foyer et ne semblait revenir chez lui que par obligation. Elle aussi aurait aimé vivre, sortir, profiter de ses temps de repos pour voyager. Christophe refusait tout, n’avait jamais envie de sortir, comme s'il avait honte de se montrer avec elle. Le mardi matin, quand le salon de coiffure ouvrait de nouveau ses portes pour la semaine, elle écoutait ses collègues raconter leur histoire, leur weekend, ce qu'elles avaient fait, où elles étaient allées, ce qu'elles avaient vu. Adèle n’avait jamais rien à dire et pour combler ce vide, inventer pour ne pas paraître trop ridicule à leurs yeux et évitait leur apitoiements gênants, des aventures lues dans les magazines, qu'elle modifiait, arrangeait, sans jamais s'étendre sur les détails pour que tout soit crédible.
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