Uncontrollable

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Azura avait été conduite au deuxième étage. Durant tout le chemin, elle s'était efforcée de ne pas penser, mais elle réalisa que c'était impossible. Dans l'ascenseur, elle ne pouvait s'empêcher de remarquer la ressemblance physique entre Loevan et son père, bien que leur caractère soit opposé. Edwin avait le regard fixe, la posture droite comme un piquet.

— Par ici.

La brunette lui emboîta le pas. Ils longèrent un couloir aux murs ornés de gravures anciennes et pénétrèrent dans une pièce spacieuse. Un bureau moderne trônait au centre, encadré de deux grands sofas rouges et d'une bibliothèque regorgeant de livres aux reliures usées. Une grande fenêtre entrouverte donnait sur un balcon somptueux. Azura capta du coin de l'œil un grand portrait accroché au mur : un couple de personnes âgées y posait dignement.

— Ce sont mes parents, répondit froidement Edwin.

— Vous avez lu dans mes pensées ? s'offusqua la jeune femme.

— Pourquoi aurais-je fait cela ? Il n'était pas difficile de deviner.

— Ils ont l'air si chaleureux… Ce sont vraiment vos parents ? ironisa-t-elle.

Azura était franche, trop franche. Cette qualité lui avait causé bien des ennuis, mais elle refusait de taire ses pensées.

— Pensez-vous que je vous ai amenée ici pour écouter vos sarcasmes ? répliqua Edwin avec dédain.

Il s'installa derrière son bureau et lui désigna un siège.

— Asseyez-vous et écoutez-moi. Nous verrons qui rira le dernier.

Elle soupira et s'exécuta à contrecœur.

— Votre frère est en danger.

— Quoi ? s'exclama Azura, l'estomac noué.

— Savez-vous pourquoi votre père n'a jamais fait allusion à sa famille ?

— J'imagine que je vais bientôt le découvrir…

— Parce que tous les hommes de votre lignée ont un point commun : ils meurent jeunes. Votre grand-père ? Empoisonné à vingt ans par une créature. Votre arrière-grand-père ? Terrassé par une maladie rarissime à vingt-neuf ans.

Azura sentit un frisson lui parcourir l'échine.

— Vous insinuez quoi au juste ?

— Que votre père a découvert qu'une malédiction pesait sur sa famille. Pendant des années, il a mené des recherches et a trouvé un manuscrit datant de 1768, écrit par un certain Ferguston Barclay. C'est ainsi qu'il a compris la nature de ce fléau.

Edwin sortit un livre imposant d'un tiroir et le posa sur la table avec gravité.

— Il a poursuivi ses recherches à la grande bibliothèque de Neridia et a obtenu une autorisation spéciale pour consulter des ouvrages de magie noire scellés. C'est là qu'il a trouvé ceci.

Azura haussa un sourcil.

— Le fameux livre qui détient toutes les réponses ?

— En effet. Page 58 : "Comment maudire une lignée sur plusieurs générations". Page 147 : "Comment y mettre fin".

— Minute… Avant de venir, votre fils a juré ignorer l'origine de la malédiction. Maintenant, vous me dites que mon frère est condamné ?

— Si Loevan vous avait dit la vérité, vous n'auriez jamais accepté de le suivre.

La rage s'empara d'Azura.

— Il savait depuis le début et il ne m'a rien dit…

— Le seul moyen de lever cette malédiction est de retrouver le mage qui l'a lancée. Seul le lanceur peut la briser.

— Ça n'a aucun sens ! Si mon père le savait, pourquoi n'a-t-il rien fait ? !

— Parce qu'il n'avait plus aucun droit sur Neridia. La seule solution, c'était de remonter le temps.

— Et vous, vous n'auriez pas pu le faire pour lui ? ! Vous avez laissé un homme mourir ! Il était votre ami !

— Son choix était irréversible. Il a déjà défié la loi en préservant vos pouvoirs.

Azura se leva brusquement.

— Asseyez-vous, je n'ai pas fini.

— Je n'en ai rien à faire de vos lois stupides ! Vous êtes tous des menteurs !

Edwin resta impassible.

— Ilyan a protégé vos pouvoirs parce qu'il croyait en vous. Il savait que vous seriez capable de briser la malédiction… pour l'amour de votre frère.

Azura éclata d'un rire amer.

— Donc j'étais prédestinée à sauver mon frère ? Comme un agneau mené à l'abattoir ? J'ai passé toute ma vie à me demander à quoi je pouvais bien servir sur cette terre !

Elle attrapa le grimoire et le jeta violemment contre le mur avant de quitter la pièce en trombe. Son cœur tambourinait dans sa poitrine. Son père, l'homme qu'elle admirait tant, n'avait même pas essayé de se sauver. Désormais, elle portait la responsabilité de protéger son frère… et elle refusait de le perdre.

Elle claqua la porte derrière elle et ne remarqua même pas la présence de Loevan dans le couloir.

— Azura, que se passe-t-il ? demanda le Neridien, perplexe.

Dès qu'elle croisa son regard, la colère explosa.

— Tu n'es qu'un menteur !

— Azura, tu pleures ?

— Comme si tu en avais quelque chose à faire !

— Azura…

— Je sais tout ! Tu savais que mon frère était maudit ! Tu savais que mon père était mort pour rien ! Et tu m'as menti !

— Azura, j'ai obéi aux ordres…

— Je m'en fiche ! Ne t'approche pas de moi !

Elle le repoussa violemment et s'engouffra dans l'ascenseur. Loevan lâcha un long soupir. Une sensation désagréable de déjà-vu s'empara de lui. Mais il ne comptait pas la laisser partir comme ça. Il bondit dans l'ascenseur avant que les portes ne se referment.

Azura recula instinctivement jusqu'au mur. Loevan s'avança et posa ses mains de chaque côté de son visage, bloquant toute échappatoire.

Elle leva la main et le gifla. Il resta impassible, son regard ancré dans le sien. Ils étaient si proches qu'elle sentait son souffle sur ses lèvres.

— Azura, calme-toi et écoute-moi.

— Ne t'approche pas de moi.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent brusquement. Azura repoussa Loevan avec une force incontrôlable. Un halo de lumière jaillit de ses paumes et traversa la poitrine du jeune homme, le projetant violemment en arrière. Il percuta plusieurs Neridiens sur son passage.

Un silence abasourdissant s'abattit sur la pièce. Tous les regards étaient rivés sur Azura. Sa respiration saccadée trahissait sa panique. Elle baissa les yeux vers ses mains tremblantes. De petites orbes bleues scintillaient au creux de ses paumes, incontrôlables.

Elle vacilla. Ewen fendit la foule et la rattrapa de justesse alors qu'elle s'effondrait dans ses bras.

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