Le splinter

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Ses paupières se soulevèrent à peine, révélant un plafond en bois abîmé. Son dos était adossé à une surface rugueuse, tandis que le sol semblait se mouvoir sans cesse. Un frisson la parcourut lorsqu'elle comprit : elle était à bord d'un navire. Son dernier souvenir lui revint en éclair. Tentant de se redresser, elle constata que ses poignets et ses chevilles étaient entravés par des cordes rugueuses, lui brûlant la peau à chaque mouvement.

— Azura ?

Désorientée, elle tourna la tête. Elle se sentit aussitôt soulagée en reconnaissant Élise, contre qui elle était appuyée.

— Rien de cassé ?

— Non, mais ma tête me fait un mal de chien, grommela son amie.

— Où sont les garçons ?

Azura scruta l'obscurité. Une faible lueur filtrant par un hublot éclairait trois silhouettes recroquevillées dans un coin.

— Ewen ?

— Inutile, il dort encore, répondit Élise.

— Comment le sais-tu ?

— Je me suis réveillée la première. On a tous été drogués. C'est du chloroforme, le même que celui utilisé par les praticiens de cette époque pour opérer.

Azura serra les dents.

— Incroyable. Et tout ça à cause d'un fichu gamin…

— Azura, c'est toi ?

La voix de Shadow émergea de la pénombre.

— Shadow, rien de cassé ? demanda Élise.

— Non, mais ces imbéciles m'ont décoiffé !

— On devrait peut-être utiliser nos pouvoirs, suggéra Azura.

— Hors de question ! Cela pourrait altérer notre existence même. Nous sommes dans le passé, ne l'oublie pas, rétorqua Shadow.

Un grincement sourd résonna au-dessus de leurs têtes, suivi de pas lourds s'approchant.

— Quelqu'un arrive, souffla Élise.

— Les gars, réveillez-vous bon sang ! s'exclama-t-elle en secouant Ewen.

Celui-ci ouvrit les yeux, le regard encore embrouillé. Quelques instants plus tard, Loevan émergea à son tour.

Une porte grinça, laissant apparaître un homme d'âge mûr. Sa stature n'était pas particulièrement imposante, mais son regard dur et sa barbe grisonnante lui conféraient une aura d'autorité. Il arborait un tricorne en cuir, une longue redingote rouge et un foulard blanc noué autour du cou.

Un jeune homme asiatique se tenait à ses côtés. Sa tresse haute et son chapeau noir accentuaient son expression sévère. Entre eux se faufila le petit garçon responsable de leur malheur, un sourire malicieux aux lèvres.

— C'est cette vermine qui a pris la montre, grogna Azura.

— Je vous suggère de surveiller votre langage en présence de votre capitaine, répliqua l'homme à la barbe. Je suis Hernest Bush. Bienvenue à bord du Splinter.

— Des pirates… On ne pouvait pas rêver mieux, marmonna Shadow.

— Laissez-moi lui couper la langue ! siffla l'Asiatique.

— Ce ne sera pas nécessaire, Jian, trancha le capitaine.

Il tourna autour d'Azura, la jaugeant.

— Quel genre de créature divine êtes -vous ? Une fée, une sorcière ? 

Elise pouffa nerveusement. Azura dut se mordre la langue pour ne pas répliquer. Évidemment, leur apparence commune pour cette époque ne passa pas inaperçue auprès du capitaine. Elle réprima l'envie de lui répondre qu'en effet, elle était une sorcière. Une Néridienne pour être exacte. Un jeune homme entra dans la lumière. Ses yeux noisette dégageaient une étincelle de curiosité. Ses cheveux bruns, attachés en une queue basse, renforçaient son air délicat.

Il fixa la brune de ses yeux étincelants. 

— Seriez-vous une sirène ? demanda-t-il, intrigué.

— Ferguson, si c'était le cas, crois-tu qu'elle serait encore en vie hors de l'océan ? ironisa Jian.

Les jumeaux tressaillirent.

— Ferguson… murmura Loevan, abasourdi.

– Barclay, enchantée. repondit l'adolescent.

— Impossible, ajouta Ewen.

Leur ancêtre se tenait devant eux.

Azura sentit une vague de panique la submerger. Cette rencontre ne devait pas avoir lieu. Si Ferguson associe les yeux d'Azura et ceux de l'amour de sa vie, qu'il allait bientôt rencontrer, une faille dans l'espace-temps pourrait avoir lieu. 

Le capitaine reprit la parole :

— Qui êtes-vous, étrangers ?

— Pourquoi ? Vous voulez un autographe ? répliqua Shadow avec insolence.

— Je ne comprends guère, rétorqua Bush, fronçant les sourcils.

Shadow haussait les épaules.

— Écoutez… Nous sommes… des pirates. Nous venons de France, improvisa Élise.

— La France ? Pourtant, vous parlez notre langue presque à la perfection.

— Nous avons beaucoup étudié l'anglais.

— Où est votre navire ?

— Nous avons payé pour voyager sur un navire en direction de Londres, poursuivit Azura.

Jian grimaça.

— Ils mentent, capitaine.

— Vous êtes un pirate ou un voyant ou un clairvoyant ? demande Shadow avec sarcasme. 

Jian porta la main à son sabre. Le capitaine le stoppa d'un geste.

— Vous cherchiez à fuir Londres, n'est-ce pas ? Une destination en particulier ?

Un silence pesant régna, Ewen inspira profondément et se lança avec courage. 

— Nous recherchons une île en mer du Nord. On dit qu'elle renferme des trésors inestimables et qu'elle possède des pouvoirs mystérieux.

Ces amis l'observaient avec stupeur. Ils étaient censés être le plus discrets possible et, depuis leur arrivée dans l'ère victorienne, ils faisaient l'opposé de ce qui leur était demandé. 

Ferguson écarquilla les yeux.

— Vous aussi, vous cherchez l'île mystérieuse ?

Le capitaine

— Quoi, vous connaissez cette île ? Demanda Azura.

— Évidemment, les soldats voulaient s'en emparer, mais nous avons volé leur carte. Selon nos informations, l'île est indiquée quelque part, mais nous ne connaissons pas sa position, expliqua le capitaine.

— Cette carte appartenait à l'un de nos hommes. Les soldats l'ont récupérée et il a été tué, ajouta tristement Fergus.

— Nous sommes du même camp, vous êtes tombés sur les bonnes personnes. Nous savons où se trouve l'île ! s'écria la brune.

— Si vous nous relâchez, nous pourrons vous montrer sa position sur la carte et vous y mener, renchérit Loevan.

— Avec tout le respect que je vous dois, mon capitaine, nous ne devrions pas accorder notre confiance à ces intrus, se méfia Jian.

— Je ne suis pas dupe, Jian. Comment puis-je avoir la garantie de votre bonne foi ? exigió Hernest.

— La garantie, c'est que vous possédez un équipage capable de nous réduire au silence, s'exclama Azura.

— Pas faux, vous ne faites clairement pas le poids.

— Vous avez un navire, et c'est exactement ce que nous recherchons, ajouta Loevan.

Le capitaine esquissa un sourire. Il semblait moins farouche qu'il ne l'était quelques minutes auparavant.

— Par chance pour vous, j'ai le goût de l'aventure. Jian, Fergus, libérez-les.

Jian s'inclina au-dessus d'Élisandre et défit le nœud avec brusquerie.

— Je ne vous fais pas confiance, je vous tuerai moi-même si vous nous trahissez.

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