4 – Dembe : Les yeux dans le ciel
Au briefing du matin, Dembe fait le point avec le reste de l’équipe de nuit. Avant d’aller prendre un repos mérité, ces pilotes et agents de Tachyon lui expliquent où ils en sont.
Pendant toute la nuit, les avions de repérage ont couvert toute la région, offrant une cartographie précise au centimètre de plus de quatre-cents kilomètres carrés autour du lieu de l’attaque. Avec le LIDAR, ils révèlent même les sous-bois à travers la canopée.
Les équipes au sol ont, elles, travaillées avec l’armée ougandaise pour bloquer toutes les routes et fouiller tous les véhicules. Désormais, il y a deux possibilités : soit les assaillants ont réussi à quitter le périmètre avant l’arrivée des premières forces d’interventions, soit ils sont cachés dans l’une des habitations, fermes ou autre structure de Kyotera et ses alentours. Dans les deux cas, les seuls critères permettant de repérer ces hommes consistent à trouver Noterger ou les armes employées.
Avec l’équipe de jour, la première chose à faire est de poursuivre les barrages filtrants. Le jour, ce sera plus compliqué : plus le temps va passer, plus il y aura de passage. Et avec l’importance de la route de Masaka-Kakuto, les choses vont rapidement devenir compliquées.
Vient ensuite le moment de faire le point avec Tito et les analystes. Le traitement des données est complexe et Dembe n’a pas la moindre idée de comment en tirer la moindre chose utile. C’est une aiguille dans une botte de foin et il espère que Tito aura trouvé un puissant aimant pour la trouver.
« Salut Dembe, comment ça va ? lui demande son ami.
– J’ai pas super bien dormi, répond-il. Et toi ?
– Tu me connais, il pourrait y avoir un tremblement de terre, je dormirais quand même comme un loir, plaisante l’expert.
– Haha, s’amuse Dembe. Quoi de neuf sur notre affaire de ton côté ?
– Plusieurs dizaines de téraoctets à traiter, explique Tito. On a une équipe qui fait des recherches sur les cartes, à la main. C’est compliqué, mais un de mes petits génies m’a entraîné une petite IA pour faire des cartes de différences.
– Sur quarante kilomètres carrés, tu vas en avoir des tonnes de différence, non ?
– C’est là que vient l’astuce : en virant la faune des résultats, il se trouve qu’il n’y a pas autant de différences que ça pendant une nuit, explique l’analyste.
– Et les résultats ?
– Là, il a un bug et du coup les résultats sont inutilisables, mais il bosse dessus à cent pourcents, précise Tito.
– Ça marchera quand ?
– Dans 5 minutes… ou ce soir. Je sais pas combien de temps ça va lui prendre, déplore-t-il.
– OK, OK. Si tu as du neuf, préviens-moi.
– Ça marche chef. », termine Tito alors que l’enquêteur retourne à son bureau. Avec le temps, il a compris que l’informatique pouvait se montrer tellement récalcitrante qu’elle en devenait proche de la magie noire. Pourvu que le mage de Tito parvienne à mettre ses arcanes en ordre.
Le reste de la matinée, Dembe coordonne ses services de renseignement avec les opérateurs de sécurité sur le terrain. Tout le regard de Tachyon est focalisé sur cette affaire. Pas tant pour retrouver Gloria, que la plupart considèrent déjà comme morte, mais pour faire regretter l’affront aux responsables. Tachyon est en charge de la sécurité de Sol6 et mettre en défaut la filiale doit être payé chèrement.
Le repas du midi est rapidement englouti, un sandwich récupéré en hâte à la cantine et voilà Dembe reparti pour une réunion avec les chefs des services de la société de sécurité. Tout le monde est présent physiquement, mais pendant que la porte-parole de Sol6, Solène Gatz, détaille son plan de communication, chacun passe son temps à se tenir au courant des avancées sur le terrain ou dans les labos.
Vers le milieu de la réunion, Tito lui envoie un message : « On a quelque chose, viens vite ! ». Dembe lève la main pour prendre la parole et Solène lui fait signe qu’il a la parole. Il annonce alors : « Les labos ont quelques choses. Je vais devoir m’absenter quelques instants, mais il est possible qu’on ait une piste sérieuse. »
Quelques sourires, un hochement de tête et le voici en train de courir vers les laboratoires de Tito en essayant de l’appeler : « Dembe, je sais que tu étais en réunion, mais on a un truc vraiment pas normal et si on a raison, Gloria pourrait être encore en vie.
– Raconte ? demande-t-il en sortant du bâtiment administratif de Tachyon.
– Vois par toi-même ! », lui indique Tito en lui envoyant, un zoom sur l’immense carte dressée par ses services via la visio. C’est un toit de tôles ondulées tout ce qu’il y a d’ordinaire, probablement une remise ou un garage. L’endroit semble banal et l’enquêteur ne distingue rien d’anormal ou de significatif.
« Et ? » interroge-t-il.
L’image passe à une vue prise quelques heures plus tard. Sur le toit, une veste apparaît. Un peu froissée, elle semble avoir été glissée à travers une fente entre deux plaques de tôle superposées. Mais ce qui retient surtout l’attention de Dembe, c’est le logo brodé dessus : « Sol6 – Space Developments », devine-t-il à travers l’amas de pixels. Le vêtement semble aussi porter quelques taches, peut-être du sang, mais l’image monochromatique ne lui permet pas de s’en assurer.
« C’est encore là-bas ? », demande Dembe. Une nouvelle image, prise peu avant le lever du soleil, toujours en infrarouge : la veste n’y est plus, mais une trace de salissure reste à son emplacement.
« OK… Je préviens les bourrins. », annonce-t-il en revenant vers le bâtiment qu’il a quitté sur un pas beaucoup plus rapide. Noterger est probablement en vie et ils ont potentiellement plus de dix heures de retard. Il est temps de prendre cette revanche.
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