31 – Alexander : Ab mortem
Dans l’infirmerie, la jeune femme repose avec légèreté sur le plateau de la station médicale de l’Akasha. Une multitude de bras robotiques, portant chacun de véritables collections d’instruments, l’ont auscultée, examinée, manipulée et opérée. Durant la reconstruction de sa trachée, ces ustensiles ont joué un véritable bal. Les fragments de l’ancien cartilage extraits, ils ont été remplacés par un nouveau, fraîchement synthétisé. Avec du medigel, l’impressionnant appareillage a refermé le reste de la plaie, reconstruisant la structure des tissus endommagés. Dans les colonies, soigner un corps semble à peine plus compliqué que de réparer un robot. L’assistance respiratoire devient passive et une série de microélectrodes placées sur un grand nombre de ses muscles provoquent des mini-contractions destinées à prévenir l’affaiblissement des muscles.
Déstabilisé par les informations sur l’opération, Alexander a coupé les annotations ajoutées par le link qu’on lui a prêté. L’appareil consiste en une paire de lunettes, superposant toutes sortes d’informations utiles par-dessus la réalité. Mais parfois, trop d’informations, c’est trop.
Durant les manœuvres, le rescapé réfléchi : si la fille revient à elle avant qu’il n’ait pu être extrait, il sera mis aux arrêts à coup sûr. Les deux astronautes doivent déjà avoir de sérieux soupçons et l’assassin est même surpris de ne pas avoir été placé en détention préventivement.
À travers les écouteurs de son link, l’IA de bord annonce soudainement : « Une anomalie biologique a été détectée. Mise en quarantaine de l’Akasha et du Mona Lisa.
– Bon sang, qu’est-ce qui se passe Akasha ? demande Feyn à travers le canal de communication principal.
– Le patient à l’infirmerie a été infecté par un agent viral inconnu, répond l’IA.
– Fais-en un scan complet et envoie les données au centre de recherche épidémiologique de Mars, ordonne Feyn.
– Bien commandant, confirme l’IA.
– Hé, Alexander, tu as quelle version du vaccin universel ? l’interroge Feyn.
– Hein ? sursaute l’homme. Le quoi ?
– Le vaccin universel standard des colonies, précise le raton laveur. Oh, vous ne l’avez toujours pas sur Terre ?
– Non, mais je suis à jour sur mes autres vaccins.
– D’accord, acquiesce Feyn en appuyant fortement sur le A. Tsadir, il faut le vacciner. On ne peut pas prendre plus de risque.
– Bien reçu commandant. », confirme la femme. Entrant quelques informations à travers une interface invisible, l’un des bras médicaux relié au plafond se met en mouvement et lui apporte un pistolet à injection au bout de quelques secondes.
L’opératrice s’en empare et s’approche d’Alexander qui conteste : « Hé ! Vous allez m’injecter quoi, là ? Des nanorobots ?
– Non, c’est juste le vaccin universel : je l’ai, Feyn l’a, explique Tsadir. Tout le monde dans les colonies l’a.
– Et comment ça peut m’aider vu que vous ne savez même pas ce qu’elle a ? objecte l’assassin.
– Le vaccin universel comporte un grand nombre de marqueurs qui couvrent ceux susceptibles d’être utilisé par des armes biologiques et ceux de maladies à forte capacité de mutation, explique Feyn toujours dans la conversation.
– Et si je refuse ? tente Alexander sans grande conviction.
– Ce n’est pas une option, insiste Feyn. Techniquement, vous vous trouvez sur le territoire de Suan et la loi de la corporation est très claire là-dessus : le vaccin universel est obligatoire. Par ailleurs, en tant que commandant de ce vaisseau, je suis responsable de l’état de l’équipage et des passagers et le risque sanitaire est trop important pour vous laisser sans la moindre protection. N’oubliez pas que la contamination est avérée.
– Bon d’accord. », se résigne l’homme.
Tsadir s’approche, soulève la manche de la veste et lui applique l’embout du pistolet sur le bras. Une brève sensation de piqûre le fait légèrement tressaillir puis la femme lui annonce : « Et voilà. Ce n’est pas si terrible, si ? »
Au moins, s’ils disent vrai, il est à son tour protégé. Enfin, une fois que son système immunitaire aura mémorisé ces nouveaux marqueurs.
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