Éléon courait d'une branche à l'autre sur les arbres de Furtis, la forêt du petit peuple dont il faisait partie. N'allez pas croire que le petit peuple avait la peau verte ou ne mesurait que quelques centimètres : Éléon avait le teint mat, les yeux marrons, les cheveux ébène et il faisait un mètre quatre-vingt de haut, maigre et sec, fin mais robuste.

Pour finir, il est facile de courir sur les arbres vu qu'une petite branche fait minimum soixante dix centimètres de diamètre.

Mais revenons à notre héros.

Éléon, donc, courait sur les branches, laissant le vent passer dans ses cheveux (qu'il avait fort longs d'ailleurs). Il se dépechait de rejoindre celle que les villageois appellaient respectueusement "Doyenne", soit pour obtenir des faveurs, soit parce que, de toutes manières, ils la surnommaient "Vieille carne" dans son dos.

C'était la plus vieille femme de tout le petit peuple. La plus vieille tout court d'ailleurs (c'est pas pour rien qu'on l'appellait"Doyenne"). On dirait une vielle masse de peau, de rides et de cheveux blancs sur laquelles ont aurait posé une couronne de lierre (car les mauvaises herbes, ça crève jamais) et des lunettes bancales qui ne lui servaient pas à grand chose, étant donné qu'elle était aveugle et se repérait grâce aux vibrations du sol.

Éléon, dont le dix-septième anniversaire s'était déroulé hier, n'était pas très sobre. Il se rappelait juste avoir pris une dizaine de shots de liqueurs de fleurs lors du banquet, avoir dragué cette fille là... Liniri ? Et après black-out.

Ce fût sans doute l'alcool qui provoqua les événement suivants. Éléon ratta sa branche, se ramassa sur un tronc d'arbre, glissa le long de celui-ci et finit par atterir dans la maison de la Doyenne par la fenêtre, ce qui n'est pas une manière habituelle d'entrer chez quelqu'un.

La doyenne, toujours aussi aveugle, se contenta d'un :

"Quékispace ?"

Éléon eut le temps d'apercevoir le nom de la doyenne sur un tableau : Liniri.

Merde. Pensa-t-il

"Le roi arrive..." Murmura le garçon

Puis il s'évanouit.