À Grand-Fresnoy, quand nous étions couchés, Richard, Anne et moi, le sommeil ne venant pas, nous avions des jeux qui ne faisaient pas de bruit, n'alertaient pas nos parents et nous occupaient longtemps.

Des jeux de mots, pas dans le sens de blagues, non, plutôt de construction.
Trouver tous les mots comportant, commençant ou finissant par telle syllabe. Trouver tous les mots de telle famille etc. Tous les mots pour manger, dire, colorer etc.

Mais ma grande préoccupation de cette époque était de connaître l'origine des mots, leur création, généalogie, leur parentelle. Pourquoi on utilisait plutôt celui-ci que celui-là. Pourquoi on appelait une table, table ? Pourquoi on appelait un vélo, vélo et pas assiette. J'en ai passé des heures à cogiter sur la nature des mots, leur couleur, leur douceur ou leur rugosité, leur parfum, leur beauté ou leurs sons.

C'était pour moi une source de réflexion et d'émerveillement immenses, un peu comme un océan à explorer.
Je suis d'ailleurs toujours passionnée de mots, ça ne m'a pas quittée, mais c'est d'une façon différente.