[ o kɔmɑ̃smɑ̃ etɛ laksjɔ̃ ]
[løki] Cinq heures... Cinq heures que je traîne mes bottes dans ce maudit trou puant, à m’embourber les tiges dans cette vase acide qui poque la pisse ! La galaxie du Têtard. Porte bien son nom, tiens ! Quel décalotté de l’@me a pu pondre un jour l’idée de venir nicher sur ce patatoïde stérile ? Ce bout de caillasse collé au noyau actif de cette galaxie ? Se fixer sur sa bande d'étoiles linéaire ; subir ses mitrailles de neutrinos ; se coltiner les caprices gravitationnels ; être arrosé sans garcrier de rayons X par ...
— … ce FOUTU disque d’accrétion qui lèche le CUL MITÉ de ce système solaire triple de MEEERDE à UNE-SEULE-PU-TAIN-DE-PLANÈTE !
Voilà que je m’égorgille toute seule, coupe-coupe dressé au ciel... T’es en train de te dés@mer ma pote ! T’as l’air d’une astrotinérante en manque de c@me. Redescends... Là. Ya pas de réseau, c’est pas l’amer à boire. Calme. Là... Mais non ! Sérieux ? Une seule planète, bordel ! Pas un clampin à moins de huit parsec ! Faut vraiment avoir l’@me en moins ! Je te jure… Et ils sont où les locaux, là ? Jamais présents quand on a besoin d’eux. Il m’a bien ratiboisé le Grand Direktateur sur ce coup là : « Votre première mission officielle, agent Löki. Un coin tranquille, sans accroc : Probo, un planétoïde paisible qui n’a connu aucune confrontation au cours des sept derniers millénaires. Une mission facile, mais importante. Ralliez cette planète au Consilium. Je compte sur vous. Travaillez vite et bien. Rapportez-nous un accord signé sous trois mois. » Quelle branque je fais ! Ce caillou ne présente aucune valeur ! Il doit bien se marrer à l’heure qu’il est.
— Allez bien vous faire EN...
Là-bas ! Un îlot ! Le radiopulseur : ça va le faire ! Trois cents mètres ma vieille, et tu t’extirpes de ce trou noir. Mais quelle idée m’a prise de vouloir troquer mon cash-misère ? Ce poste à l’université de Moonabé, ça tenait de la croisière interstellaire all inclusive comparé à ce marécage putride ! Là, plus que quelques pas, l’aventurière… C’est ça. Ce perchoir, c’est qu’un glissoir de caillasse : salade d’algue sur son lit de coquillart. Mieux que rien. Un dernier effort. Voilà... en-fin-ca-lée ! La vue s’avère encore plus désolante que désolée... Tu parles d’un tableau : l’horizon me scie les lucarnes ! Au moins, je suis au sec. C’est bien moi, ça : crasher un transbordeur flambant neuf au milieu de nulle part. De toute façon, tout est parti à vau l'eau dès l’instant où j'ai quitté l’Agence à Castel Primo. Pas eu le temps d’atteindre la zone tiède que la propulsion de ce maudit zinc faisait des siennes. Le long-courrier a dû larguer un soutien pour me tracter à bord. Le méca m’a saignée à blanc : mauvaise série, qu’il m’a contée... à d’autres ! Et après ça, t’as prolifoiré comme une bleue, meufton. Faut dire que ces long-courriers, c’est rien que de gros jerrycans d'oxygène remplis de trouducs perdus dans le no-space : ça pue le renfermé et ça grouille de parasites en tout genre ! Et toi, tu cocottais le premier printemps. Ça n’a pas traîné avant que les mouches te gravitent autour ; ce fumier de Konrad a mis moins de trois secondes à te sniffer le filon... Celui-là, si je le recroise, je lui fais cracher les crédits qu’il m’a grugés dès le second saut quantique ! Konrad... Connard ouais ! Quatre semaines à gober du synthétique insipide et tes organiques recyclés, ça met les crocs… Et quand t’as enfin pu filer de ce rafiot, tout ce que tu as trouvé à faire, c'est de te jeter dans cette tempête magnétique ! Les systèmes ont cramé un à un sous les rayonnements ; ont suivi les mayday ; et puis le silence radio ; et puis cet atterrissage catastrophe — cet encastrage ouais ! — sur ce caillou sans vie. Tout ça pour en arriver où ? Là ? Je suis à boute... Allons, chope le radiopulseur au lieu de chial... Merdrier de bagpack détrempé ! Ça va, le technobidule est intact, faut seulement attendre que ça sèche... L’Agence a au moins eu la jugeotte de m’équiper du kit du petit survailleveur ! Plus qu'à guetter la vie comme une chouette... Rien, sinon l’eau stagnante que trois soleils blafards assèchent en silence. Y'a beau baisser la visière de ce foutu casque, même en plissant les yeux, tout ce qu’il y a à capter, ce sont des mirages réverblessants qui surgrillent les rétines. Putain que c’est glauque ! Qu’est-ce qu’ils foutent les locaux ? Ils n’ont pourtant pas pu louper mon entrée, je leur ai tapissé l’éther d’une traînée de flammes en guise de salut. Le sol tremble ? Prie pour que les marées gravitationnelles ne provoquent pas de tsunami, sans quoi c’en est fini de ta gueule d’amour ! Hey là, voilà que je vire parano. Faut que je dorme, j'ai l’@me en peine…
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