[SOCIAL] - Une photo

2 minutes de lecture

Une Photo

Oh putain, il me va vraiment trop bien ce t-shirt!

M’extasiais-je en voyant ces tissus entourer mon corps de leur douceur lissée, et de ses couleurs ravivées

Il faut trop que je fasse une photo maintenant!

Cherchais-je sans relâche cette touche de perfection, assaisonnement de nuances et de textures à ma tenue, faisant de ces draps de pudeur, un mets à cuisiner

Mon téléphone…c’est bon, j’ai tout

Me dépêchais-je vers ce miroir, reflétant jusqu’au sauron électronique entre mes mains, seule échappatoire de cette plaque informatique entre mes doigts

Bon, une photo que je vais poster

Pris-je la pose, et une photo, étirant mon sourire à un point tel qu’on en entendrait presque mon extase de ces carrés colorés et informatisés, d’un moment arrêté

Et, une autre photo en souvenir

Caressais-je à nouveau ce rond d’un rouge si perçant qu’il en était ennemi de la lumière, si brillant qu’il en était concurrent de l’ampoule d’un blanc pur

Faut voir qui a commenté…

M’étonnais-je en voyant ces numéros monter, grimper, voler sur ce hall social des intéractions inarrêtables

On en pense quoi?

Ouvrais-je avec enthousiasme cette prison de notifications, cherchant avec attention ces détenus qui m’ont répondu

Ils disent quoi?

Observais-je ce nombre escalader, au risque de m’étonner, à une vitesse indécidée, si saccadée que je ne puis y compter

Leurs réponses?

Lisais-je avec envie retenue ces mots, ces envies répétées sur ma photo, ces…

Commentaires

Syfuu_47

Je préfèrerais sans ces conneries…

Raky_7: Rep à: Syfuu_47

Nn, elle est éclaté avec ou ss

LBG: Rep à: Raky_7

oe, J’confirme

Le verre, en un revers, fila, vola de ma main pour venir enlacer, dans sa vitesse inégalée, le mur renforcé

Pourquoi…

Les éclats, en un lourd fracas, s’envolèrent plus vite que ces notifications, plus vite même que le son de leur agonie

Pourquoi moi…

Vis-je, avec un sourire déchiré, le cadavre étalé de cette brique informatique, violée de haine et de méchanceté

Pourquoi dire ça?

Passais-je les doigts sur cette dépouille de verre et d’acier, laissant ses gouttes d'électricité enlacer les miennes, d’espoir désespéré

Pourquoi ma tenue? Pourquoi?

La caressais-je pour la peindre de ce bordeau d’envies, la déchirant d’un mouvement crié, agonisant, avant de laisser ces tissus se faire avaler dans un mélange d’un rouge délavé de gouttes mélangées

Pourquoi lire ces foutus commentaires?

Fixais-je une dernière fois le miroir…

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