Par moment, on est tous un peu moins fort que nécessaire.

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Depuis qu’il fréquente les ours polaires, David se trouve trop bien pour les vêtements chauds toutes les fois qu’il redescend vers le sud. Il pense que le fait de travailler en arctique lui confère une sorte de superpouvoir, une imperméabilité au température extrêmes basses. À croire qu’il ignore quels efforts d’ingénierie sont déployés pour l’empêcher de geler quand il étudie les bactéries sur son glaçon. Je le vois qui grelotte dans son polo à manches courtes. Il va et vient autour du carrousel à bagage sous prétexte de trouver nos valises plus vite ; une tentative désespérée de se réchauffer un peu.

— T’es ridicule, lui fais-je savoir quand il repasse près de moi pour la dixième fois.

Il lève le majeur dans ma direction, ce qui me fait sourire. David et moi, on a douze ans depuis bientôt trente ans.

Nos valises se pointent à la queue-leu-leu, trois en tout, dont une exclusivement remplie de cadeaux pour l’humain miniature. David s’en empare avec soin. Il sait que je lui mettrai mon poing dans la figure s’il arrive quoi que ce soit au télescope de son neveu.

Bagages en main, on progresse dans l’aéroport. Comme la température n’en fini pas de baisser, David accepte mon écharpe. Je lui dois bien ça. Il me cédait sa veste tout le temps quand j’étais gamine.

Il s’étrangle dans le cachemire tandis que nous atteignons la sortie du terminal. Une foule d’inconnus y attend. L’humain miniature est là, parmi eux, qui saute place en nous faisant de grands signes de la main tandis que son père tient l’autre.

J’approche et, comme dans une scène de film, mon fils s’élance et se jette dans mes bras. Il est affectueux, un trait qu’il a hérité de son père. Je le suis moins, mais je l’aime, ce qui ne m’empêche pas de le serrer fort contre moi.

— Tu m’as trop manqué, Maman !

Il a une voix d’ange. J’en oublierai presque qu’il m’a condamné à passer les pires fêtes de fin d’années possible tant l’odeur de son shampoing à la pomme préféré me réchauffe le cœur.

— Tu m’as manqué aussi, petit homme.

— Et moi, j’ai manqué à personne ? demande David pour rappeler se présence.

Mon fils se lance vers son oncle pour des retrouvaille plus énergiques. David est encore assez fort pour le lancer dans les airs comme s’il ne pesait rien.

— J’espère que le voyage vous a été agréable.

Reiner s’est approché. Je n’ai jamais douté qu’il soit le père biologique de l’humain miniature, mais leur ressemblance me souffle un peu plus chaque année. Tant mieux pour l’humain miniature. Son physique l’avantagera.

— Moi, j’espère que t’es pas garé loin. J’suis crevée.

— Nous serons à destination en moins d’une heure, à moins que tu veilles visiter le centre avant de rentrer.

— Je passe. Il me faut un vrai lit, tant pis si ça veut dire revoir ta mère plus tôt.

Il se renfrogne, le gentil homme.

— Blake. Je tiens vraiment à ce que ces vacances se passent bien.

— Ah ouais ? Bah c’est le petit qu’il fallait mettre dans un avion, alors, pas moi. Tu sais, un peu comme ce qu’on fait toujours depuis huit ans ?

— Tu n’étais pas obligée d’accepter.

— Joue pas à ça avec moi. Tu m’as quasiment mise devant le fait accompli. J’avais pas le choix entre accepter et refuser, mais entre avoir le mauvais ou le bon rôle. Tu te souviens ce que ça veut dire co-parenter ? T’as payé une saleté de psy de ta poche pour me l’expliquer y a pas longtemps.

Je suis plus en colère que ce que croyais, je m’en tout juste compte. D’un coup d’œil, je m’assure que le petit homme n’écoute pas. Reiner en fait autant.

— T’aurais au moins pu avoir la correction de proposer de le faire chez moi, finis-je. C’est pas parce que j’ai pas de famille nombreuse ou que je vis pas dans un château que mon temps et mes efforts valent moins que les tiens.

— J’en suis conscient. Et je ferais de mon mieux pour te dédommager plus tard.

— Mmh. Méfie-toi, c’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd.

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