Emma: Voyage

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Le bruit sourd m’arrache un cri avant même que la gerbe de sang ne vienne se déposer sur mes pieds. Je hurle et me penche à leurs côtés. Ces gamins sont suicidaires. Le petit gémit est écrasé par le poids d’Oxane. Je pousse son corps brûlé pour permettre à aurèle de se dégager. Les deux enfants halète couché sur le sol. La sortie n’est pas loin. Je dois me dépêcher. Ils ont créé une brèche pour nous. Nous devons saisir cette opportunité. Je fais signe à mon collègue de prendre l’un des deux blessé contre lui. Il se penche avec difficulté et attrape la jeune fille avant de la jeter sur son dos. Le peu d’air encore restant dans les poumons de la fillette et rejeté avec violence. La précipitation me fait oublier les points faibles de mes coéquipiers. Je me baisse et attrape le corps du jeune homme. Il a beau être aussi sec que le sable du Sahara, sa taille m’handicape. Nous nous mettons en route sans tarder. Les lésions causées par les combats et les deux enfants nous ralentissent intensément. Après plusieurs minutes de marche, j'aperçois enfin la grande porte du palladium. Un flux d'adrénaline parcourt mon corps de long en large et mes muscles s’actionnent sans même que j’ai à y réfléchir. Je cours sans même faire attention aux tâches sombres et glissantes parsemant le sol. J'enclenche la poignée de ma main libre. L’air parcourt mes cheveux et caresse mon visage. Je respire une grande goulée d’air frais. J’ai pensé pendant un instant ne plus jamais ressentir ce sentiment si agréable du frisson sillonner ta peau et recouvrir d’un élan de fraîcheur tes pensées embrumées.

Je cherche du regard le vieux van pourris du collège. Je le trouve sans effort. Le parking est aussi vide que la toundra russe. Le poids des enfants commence à peser sur nos épaule. J’ouvre la porte cabossée du vehicule. La peinture bleue s’ecaille sous mes doigts. Je dépose les deux adolescents endormis sur la banquette abaissée du siège arrière. Arold attend contre le chapeau de la voiture. Son parfum acide me monte au narine pendant que je fouille dans mes mallettes en quête de ma couverture de survie. Nous déposons la matière fine sur les deux blessés après leur avoir inséré un sédatif qui devrait les laisser endormis le temps du voyage. Mes yeux se plongent dans ceux de mon collègue. “ Tu fais quoi?” la peau de ses mains gercées par le froid et l’humidité se tendent vers la rue. Il ne parle que quand le nécessaire l’y oblige. Je ne comprends toujours pas la raison de son orientation professionnelle. Je le regarde s’éloigner animé par ses grands pas lents si caractéristiques. Il pleut. Le ciel se teinte de ces mêmes couleurs si répétitives. Je rentre dans la voiture et appuie sur l'embrayage. Le moteur ronfle mais ne daigne pas se mettre en route. Au bout d’une quinzaine d'essais, la berline avance enfin. Je me dépêche de sortir. Je traverse les rues bordées de buildings tous plus semblables les uns que les autres. La route défoncée fait cahoter le van envoyant valser les objet d’un côté à l’autre de la voiture. La respiration haletante de mes deux compagnons de route me presse un peu plus chaque seconde. J’appuie sur la pédale en esperant que le tacot tienne l’acseleration.

La pluie fouette sur le pare-brise et obstrue la vue d’un voile d’eau déferlant sur le verre. L’humidité pénètre à l'intérieur et m’arrache un frisson. Je regarde la carte. Réflexe inutile, je connais la route par cœur. Je regarde autour de moi et cherche le 91 rue bergerac. Petit garage caché. Parfait pour l’utilisation que nous en avons. J’ouvre la porte et sors sous l’averse emmitouflée dans mon anorak jaune. La barrière s'entrebaille dans un long grincement. Je m’avance dans la pièce délabrée. Les pièces détachées gisent, à même le sol, dans un amas de poussière. Voilà bien longtemps que la forclos n’avait pas utilisé le portail. Tant mieux, je n’ai que plus de chance de ne pas me faire repérer. Je fouille sur l’établi cahotant. La vieille table tient sur trois pieds de bois attaqués par les mites, le dernier étant déjà réduit à l’état de poussière depuis bien longtemps déjà. Je cherche dans les deux tiroirs entrouverts. Quelqu'un est passé par là et certainement pas quelqu'un de bienvenu. Autrement il aurait pris soin de tout remettre à sa position initiale comme le protocole l'exige. Trêve de mondanité. Je n’ai pas le temps pour les détails. J’attrape la mallette et l’ouvre avec mon pass. Les lettres de scrabble. Quelle originalité de la part des pasteurs. Je cherche les lettres dont j’ai besoin et les incrustent dans les cavités du couvercle de la boîte. Le son caractéristique de l’ouverture du portail pénètre dans mon esprit. Je me dépêche de rejoindre la voiture et d'avancer dans le hangar. Je regarde tout autour de moi. L'émerveillement me prend comme à la première fois. J’aurais beau recommencer indéfiniment je ne me lasserais jamais de ce spectacle éblouissant. Les ficelles de lumière ne tardent pas à recouvrir la voiture entière. Elle découpe la matière, divise les atomes jusqu’à ce qu'elles soient si fines que puissent s’accrocher au rayon sans grandes difficultés. J’attrape la main des deux blessés et me laisse pénétrer par la douce chaleur du portail.

Mon corps reprend peu à peu son opacité naturelle . Malgré l'excitation naturelle je ne peux m'empêcher d’envisager le pire. Mes membres finissant de s’assembler me démangent. Je récupère enfin mes sens. Mes mains toujours crispées sur leurs paumes les écrase avec une force que je peine à maîtriser. Je n’ai pas encore récupéré le plein contrôle de mes muscles. Je me retourne. Les deux enfants sont revenus. Endormis ainsi, blottis l’un contre l’autre ou pourrait presque croire qu’il aient passer un belle soirée à danser l’un contre l’autre. Ils se connaissent à peine et pourtant. Aucun des deux n’a hésité devant le danger. Leur respiration s’est calmée, le passage ne les a pas réveillés. Le sédatif doit vraiment être puissant. La réalité des choses me frappe de plein fouet. Ces absences de plus en plus fréquentes m'inquiètent. Mes yeux se retournent vers le pare-brise. Le voile noir de la nuit sans lune recouvre le paysage d’une obscurité quasi complète. Mes prunelles peines à s'habituer à la lumière éblouissante causée par le portail. Minute après minute, ma vue se précise. Je perçois enfin les grandes lignes du chemin pavé. J’appuie sur la pédale posant mes main sur le cuir bossu du volant. Je passe cette pancarte qui m’est bien connue “ Institut Saint James.” Tenez bon les enfants, on arrive.” Je m’approche de la masse noir devant moi. Les roues glissent sur les dalles humides. Je me gare proche du bâtiment de pierre. A peine sortie que le froid s’engouffre dans mon être et me glace les os. Je hurle à plein poumons afin de réveiller le personnel. Les pas ne tardent pas à résonner. Un attroupement de visages endormis encore marqués par l’oreiller passe le seuil de la porte. L’atroupement s’approche de la voiture. Les questions silencieuses de leurs regards insistant me font courber le dos. Je leur montre le coffre. Ils s’approchent, regardent par la fenêtre et comprennent enfin. “ Les gas, je crois que ces gamins vont avoir besoin de vous plus que vos lit cette nuit.”

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