II
Face au mutisme de mes compagnons et à la banalité du déjeuner qu'on nous avait servi : sans goût, sans odeur, sans chaleur ; j'avais quitté la salle à manger et me dirigeais vers ma chambre.
On se contentait de les nourrir, sans aucun souci d'une satisfaction gustative quelconque. !
Cela faisait un mois qu'il avait intégré cette maison de repos. La monotonie des jours n'était traversée par aucune créativité : les mêmes repas tournaient en boucle, les mêmes activités infantilisantes.
Un temps et un espace plat, pareils à cette plage qui entourait le centre.
Trottait dans ma tête ce vers de Verlaine :
La vie humble aux travaux ennuyeux et faciles
Est une œuvre de choix qui veut beaucoup d'amour
Rester gai quand le jour, triste, succède aux jours …
Rien ne m'insupporte plus que la routine.
S'attablant à son bureau, il reprit la rédaction de ses « mémoires ». Il aimait cette posture, penché sur le bureau devant la grande étendue blanche, le stylo à la main. Sur le côté un tas de papier vierge, à sa droite une liasse de feuilles annotées et raturées.
Enfant, avant de partir servir la messe, il aimait disposer son espace de travail. Afin de pouvoir s'y plonger dès son retour.
***
Réécrire sa vie. Quelle idée stupide, banale. Tous les êtres humains ont le désir de laisser une trace de leur passage ! En quoi sa vie méritait-elle d'être connue et retenue ?
Mais il savait surtout qu'il écrivait pour percevoir avec plus de clarté le fil de son histoire. Tel un mineur il s'essayait à extraire ce qui gisait au fond de lui.
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