Il faut faire sonner l'horloge !
Et maintenant vous parlez de divisibilité. Je n’y comprends plus rien, j’écris sans réfléchir et je pense sans cesse à d’autres choses. Je tourne la tête face à (n-3)(k-1)=8. Il faut nager dans les mathématiques, mais je ne veux plus me noyer. Je n’attends qu’une chose : « C’est bon Mademoiselle, vous pouvez quitter cette option. » Patienter. Encore patienter. Mais jusque quand ? Je tiendrais d’ici-là ? Et si la réponse est négative ?
Je veux fuir, courir loin mais le départ n’est pas donné. Allez, allez, je veux m’en aller. Continuer de travailler devient trop compliqué, et à plusieurs reprises l’encre qui sert à écrire les calculs se mélangent à des larmes. Elles coulent sans que je comprenne pourquoi. Elles ne veulent plus dire : « Maintenant ça suffit t’arrêtes ces conneries de maths expertes » mais « c’est quand que tu vas pouvoir dire adieu à tout ce bordel ? ».
Avec moi, des idiots dansent avec les calculs. Ça se croit trop doué, avec un soupçon d’intelligence. Je vous prenais pour des dieux lorsque, pour la première fois l’an dernier, j’observais votre manière de faire telle ou telle chose. Et puis, le roi de ces idiots qui, tantôt fait le gentil avec moi, et tantôt joue à l’insolent m’impressionnait avant. C’est honteux de se dire : « Lui je l’aimais » et de voir comment il me parle. Aujourd’hui, je lui réponds froidement et je lève la voix à sa moindre critique déplacée. Lundi, il me tend son portefeuille pour que je m’achète à manger. Mardi, il ricane contre moi. À quoi joue-t-il ? Encore une personne faussement intelligente.
À quoi pensais-je lorsque j’inscrivais sur cette pauvre feuille une implication ? Est-ce que démontrer que n-4 est un diviseur possible à, je ne sais quelle autre expression mathématique m’intéressait ? Tout ce que je faisais, moi, c’était de regarder par la fenêtre. Le jour se couchait, il commençait à faire frais. J’avais des images en tête : les lumières des phares des voitures, de celle des réverbères, de la nuit, des étoiles qui seraient au-dessus de moi lorsque la sonnerie me défera de ces nœuds cruels. Le temps refuse de passer vite. Ma seule envie : partir, m’enfuir. Et une autre vient également : et si je me mettais à écrire. Là, dans cette salle de mathématiques. Avec des personnes qui ont un avenir dans ce domaine. Moi, je ne suis pas faite pour ça. Je voulais continuer d’apprendre, d’être curieuse, d’aller jusqu’au bout des choses.
One more time. C’est tout ce qui résonne. Combien de fois encore ? Mes jeudis vont-ils encore souffrir avec moi ? Et cette heure suspendue à mardi, restera-t-elle ? Ce qui est censé être une toile de fond gâche le tableau, le noircit. Comme si un peintre s’était acharné à donner d’affreux coups de pinceaux violents sur un fond blanc. Comme si de la haine et une grande peine s’offrait à lui et qu’il ne savait pas comment l’exprimer.
Et moi, je ne sais pas quand le temps finira par me donner une réponse positive. Je ne sais pas encore le nombre d’heures nécessaire pour regarder dans les yeux mon bourreau et lui dire : « Voilà, je m’en vais. Vous avez perdu, j’ai gagné. Votre façon de faire, ça ne vaut pas quatre sous. Si j’ai envie, j’apprends tout ça de moi-même et je m’en sortirais encore mieux. Moi j’aime les calculs, vous, vous les rendez cruels. ».
Je souhaiterais qu’elle lise ce que j’écris. Les littéraires, ils font ça finalement : ils dénoncent, ils osent, ils ouvrent leurs gueules comme on dit si bien quand ils sont blessés, quand ils ne sont pas d’accord. C’est une leçon de vie, les maths. Et vos phrases deviennent mon philtre pour rédiger tout ce que j’ai ressenti avec vous.
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