Chapitre 1
Une brise de festivité soufflait joyeusement sur le royaume d’Arendelle. Toutes les maisons, y compris les plus reculées de la ville, s’étaient parées de mille et une couleurs, des fanions flottaient aux fenêtres et entre les toits, au plus haut des rues. Des fleurs dorées et des pétales se joignaient aux confettis sur les pavés et dans le ciel.
Des exclamations de joie résonnaient entre les passants, les marchands avaient installé des étals hors de leurs échoppes pour profiter des premiers rayons du soleil et de l’ambiance électrisante de ce jour si particulier.
Sous un petit chapiteau sur la place de la ville, Anna observait l’effervescence du royaume qui reflétait sa propre impatience. C’était même un défi pour les couturiers qui l’entouraient que de la maintenir en place, le temps d’apporter les dernières retouches à sa robe. Une robe élégante qui n’était pas sans rappeler celle qu’avait porté Elsa à son propre couronnement, deux ans plus tôt. Mais contrairement à sa sœur, la jeune rousse avait décidé de se faire couronner au cœur de la ville, et non dans la salle du trône.
Un frisson d’excitation et d’impatience la faisait piétiner sur place alors que les trompettes retentissaient. Elle lissa nerveusement sa robe vert de bleu, s’assura une dernière fois que sa cape était bien ajustée dans son dos, et prit une grande inspiration. Les ambassadeurs des pays voisins prirent place à l’intérieur, tandis que le reste du peuple attend au-dehors, leurs pas résonnant en une cacophonie impatiente.
Enfin, le moment tant attendu était arrivé. Anna s’avança vers l’autel où l’attendaient un sceptre et un orbe, son cœur battant la chamade sous le poids des responsabilités qui allaient peser sur ses épaules.
« Dans la lumière matinale, un nouveau chapitre commence,
Les murmures de l’aube annoncent une douce renaissance.
Les yeux emplis de promesses, je regarde vers l’horizon,
Un monde de possibilités s’ouvre, une nouvelle saison. »
Sa voix était douce et aucun tremblement ne vint trahir son appréhension alors que les dernières formules traditionnelles étaient prononcées dans son dos. Pendant qu’elle reposait les objets sur l’autel, une mélodie douce et solennelle s’élevèrent, et les applaudissements des gens de la cour firent vibrer son cœur. Et, alors que la couronne fut soigneusement déposée sur ses cheveux parfaitement coiffés, au loin, les cloches tintèrent dans toute la ville.
Anna émergea du chapiteau, accueillie par la douceur du soleil et un tonnerre retentissant d’exclamations et de cris de joie. La nouvelle reine d’Arendelle posa un regard attendri sur chacun des sourires qui était tourné vers elle.
« Les regards de mon peuple, mêlés d’espoir et d’attentes,
Chantent la confiance en l’avenir, une mélodie vibrante.
Dans ce rôle qui m’incombe, je me tiens debout avec fierté,
Prête à guider Arendelle vers un destin exalté. »
Elle saluait de la main tous ceux qui l’appelaient, qui la félicitaient, alors qu’elle traversait la foule en direction de la statue qu’elle devait désormais inaugurer. Sa première action en tant que reine.
« Dans les sourires qui illuminent ce jour radieux,
Je puise la force pour bâtir un futur harmonieux.
Que cette aube marque le début d’une ère sereine,
Où chaque pas nous guide vers une destinée plus certaine. »
Elle aperçut au loin des silhouettes familières : celle d’un jeune homme blond, fort bien vêtu, accompagné d’un renne, et à côté d’eux, une vision bien moins ordinaire : un bonhomme de neige qui sautillait de joie, presque aussi bien vêtu que le jeune homme.
Anna se précipita vers eux, hilare, fendant la foule des citoyens qui chantaient en les regardant :
« Dans la clarté du jour sous ce ciel infini,
Dans nos cœurs un nouveau chapitre s’écrit ici.
La couronne passe entre les mains des sœurs aimées,
Un nouveau règne débute, nos destinées vont se forger.
Nous virevoltons dans le vent du sud avec aisance,
Dans son souffle glacial nous décrivons notre danse.
Que ce jour soit un prélude à notre avenir radieux,
Un nouveau souffle de vie, joyeux. »
— Pas plus d’une heure, déclara Kristoff pour tout préambule. Je te préviens, je ne tiendrais pas plus d’une heure.
Ses cheveux blonds soigneusement coiffés commençaient déjà à s’ébouriffer de nouveau. La jeune reine gloussa et déposa un baiser sur sa joue, avant de passer sa main dans ses cheveux dorés.
— Ça ne fait rien, je te préfère au naturel, répondit-elle dans un sourire.
Elle le laissa balbutier sur place, emportant un petit sourire narquois avec elle, tandis qu’elle rejoignait le Général Mattias pour l’inauguration de la statue. Aux yeux d’Anna, c’était un événement bien plus important que son couronnement : cet ornement qu’allait arborer la place centrale de la ville symbolisait la paix retrouvée entre Arendelle et les Northuldras. Leurs peuples unis par l’amour, celui de ses parents.
Debout sur la plage, Elsa ferma les yeux pour se concentrer sur le son des vagues, dissipant les bruits de l’activité du village Northuldra derrière elle. Gale, l’esprit du vent, faisait onduler paisiblement les feuillages, dont le bruissement enveloppait la jeune femme d’un doux murmure, ses cheveux blonds presque blancs flottant librement autour d’elle. Elle se sentait enfin en paix avec la nature qui l’entourait.
« Enfin en harmonie avec le pouvoir qui m’habite,
Je découvre ma vraie nature, une existence inédite.
Libre et épanouie dans cette forêt enchantée,
Je célèbre chaque instant, une nouvelle destinée. »
Elle rouvrit les yeux, découvrant le soleil levant dont le reflet semblait danser au rythme des vagues. Un sourire s’étira sur ses lèvres, elle tendit la main vers l’astre qui s’élevait paisiblement, comme si elle pouvait saisir sa chaleur. Un frisson parcourut son échine et son sourire se dissipa tandis que sa main retombait le long de son corps.
« Mais au-delà de cette quiétude, un frisson dans l’air,
Un présage subtil me traverse, difficile à défaire.
Une crainte sourde, un avertissement sans nom,
Que quelque chose se trame, un danger à l’horizon. »
Elle se détourna, incapable d’ignorer l’appréhension qui la traversait. Elle savait que quelque chose se tramait, bien qu’elle soit encore incapable de définir quoi. Sa cape presque transparente flottait derrière elle, soulevée par ses pas, tandis qu’elle marchait en direction du village Northuldra. Ces derniers la saluèrent – Elsa passait difficilement inaperçue au milieu de la forêt avec sa robe bleue glacé et ses motifs qui se reflétaient dans l’éclat du soleil.
Elsa leur répondit d’un signe de main poli et un léger sourire tout en se frayant un chemin à travers le village, naviguant entre les tentes dressées au cœur de la clairière où le peuple nomade avait établi son campement temporaire. Perplexe, elle fronça les sourcils tandis qu’elle avançait vers la limite de la clairière, mais l’expérience de ses aventures passées lui murmurait de suivre son instinct.
« Pourtant dans chaque bruissement et murmure du vent,
Je sens une force ancienne, un pouvoir résonnant.
Et là, dans l’ombre, une étincelle nouvelle scintille,
Un pouvoir inconnu, une destinée qui oscille. »
Alors qu’elle progressait entre les arbres, l’agitation du village s’atténua jusqu’à disparaître complètement, laissant place à un silence que même les oiseaux n’osaient perturber. De plus en plus interloquée, la jeune femme continua à avancer, ses yeux bleus profond scrutant le moindre détail qui pourrait échapper de l’ordinaire.
La Forêt était calme, tranquille, et rien ne semblait changer de l’ordinaire. Bien qu’elle ne soit encore pas totalement familiarisée avec les lieux, elle tentait pourtant de déceler ce qui l’alarmait depuis maintenant plusieurs heures.
Après avoir avancé de plusieurs mètres, elle s’arrêta et soupira en hochant la tête. Elle se trouvait ridicule à s’inquiéter ainsi sans raison. Pour la première fois, elle pouvait être sereine : pas de pouvoirs incontrôlables à cacher, pas de voix qu’elle était la seule à entendre. Elle devrait plutôt être heureuse aujourd’hui, car sa sœur Anna héritait de sa couronne et prenait sa place sur le trône d’Arendelle.
Alors qu’Elsa s’apprêtait à faire demi-tour, quelque chose la bouscula, lui arrachant un petit cri de surprise, mais lorsqu’elle reconnut Gale, qui s’amusait à faire tourbillonner des feuilles devant elle, un petit rire franchit ses lèvres.
— Coucou, toi, le salua-t-elle sans se départir de son sourire. Tu m’as l’air déjà bien enthousiaste, ce matin.
Pour toute réponse, l’esprit du vent fit virevolter les feuilles plus haut encore avant de s’éloigner. L’ancienne reine d’Arendelle pencha la tête sur le côté, intriguée.
— Tu veux que je te suive ?
Elle reprit sa marche, suivant l’esprit du vent. De toute évidence, quelque chose le mettait de bonne humeur ; elle le voyait rarement aussi surexcité. Que pouvait-il bien se passer ?
Gale fit soudainement tourbillonner des feuilles tout autour d’un arbre, si bien qu’Elsa dut lever les bras pour se protéger le visage. Les yeux plissés, elle distinguait une forme sombre allongée contre l’arbre, mais elle ne parvenait pas à distinguer correctement de quoi il s’agissait. Elle s’apprêtait à demander à Gale d’arrêter de remuer les feuilles lorsque ce dernier les laissa retomber à plat.
Elsa poussa une exclamation surprise en découvrant un jeune homme allongé, visiblement endormi, le dos contre le tronc de l’arbre. Elle recula instinctivement, submergée par une vague d’étonnement mêlée d’appréhension. Malgré tout, poussée par sa curiosité, elle s’approcha prudemment en inclinant sa tête sur le côté, détaillant l’homme de la tête aux pieds : il avait les cheveux blonds sombres, un visage aux traits fins, un nez aquilin. Ses vêtements étaient déchirés et trempés par endroit. Il avait l’air jeune, environ du même âge qu’elle.
— Qui es-tu ? murmura-t-elle en s’accroupissant près de l’inconnu. Et comment es-tu arrivé là… ?
Elle sentit un élan de compassion pour le jeune homme, atténuant suffisamment sa méfiance pour qu’elle s’approche un peu plus, tentant d’écouter son souffle.
L’homme ouvrit subitement les yeux et releva la tête. Ses pupilles bleu océan détaillèrent la forêt face à lui avant de se poser sur Elsa d’un air paniqué. Étrangement, il eut l’air de la reconnaître, et il sembla se calmer un peu.
— El… sa ? demanda-t-il d’une voix faible.
Ses yeux se refermèrent et son menton retomba contre son torse. Il s’était évanoui, visiblement à bout de forces. Alarmée, Elsa tendit la main vers lui, prête à le secouer pour le réveiller.
Alors, du bout des doigts du jeune homme, des étincelles jaillirent, faibles mais chaleureuses, provoquant un mouvement de recul chez la jeune femme. Prise au dépourvu, elle ressentit des fourmis dans ses propres mains, et des flocons se formèrent dans ses paumes, comme en réponse aux étincelles du jeune inconnu. Ces dernières disparurent dans les airs, aussi soudainement qu’elles étaient apparues.
Elsa fixait le jeune homme, hébétée et fascinée, peinant encore à réaliser ce qui venait de se produire.
— Tu es… comme moi ?
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