Chapitre 2

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« Attends, quoi ? Tu as fait QUOI ? »

La voix d’Anna retentit dans le salon du château, mêlée de surprise et d’indignation. Son regard suivait sa sœur qui avait fait les cent pas dans la pièce en lui expliquant ce qu’elle avait fait. Elsa s’était arrêtée devant elle, les yeux arrondis de surprise devant sa réaction. Derrière elles, Kristoff, les bras croisés, ainsi qu’Olaf et Sven observaient la scène sans oser prononcer le moindre mot.

— Anna…
— Et pourquoi avoir fait tout le trajet jusqu’ici ? l’interrompit la rousse.
— Anna…
— Tu aurais pu le laisser aux Northuldras pour qu’ils s’occupent de lui ! A quoi tu pensais ?
— Anna !

Cette fois, ce fut au tour d’Elsa de hausser la voix. Cela eut le mérite de faire taire la nouvelle reine d’Arendelle, et elle profita de ce calme tout relatif pour poursuivre.

— Écoute, je sais que l’avoir ramené ici est imprudent, mais il était si faible que seule la médecine d’Arendelle pouvait le soigner. Et puis… J’aimerais que nous gardions un œil sur lui.
— Mais pourquoi, Elsa ? demanda Kristoff en se plaçant aux côtés de sa fiancée. Nous ne sommes pas vraiment les mieux placés pour veiller sur lui.

Elsa se tortillait les mains tout en cherchant ses mots, visiblement nerveuse. En toute vérité, elle ne savait pas vraiment pourquoi elle n’avait pas laissé l’inconnu aux Northuldras. Son premier réflexe avait été de le ramener au château, sur le dos de Nokk, l’esprit de l’eau et sa fidèle monture.

Enfin, elle prit une profonde inspiration et tenta d’expliquer :

— Je sais que ça peut avoir l’air irresponsable, mais il n’allait vraiment pas bien quand je l’ai trouvé dans la forêt. Je ne pouvais pas le laisser là-bas, il avait besoin de soins que seul les médecins d’Arendelle pouvaient prodiguer. Alors j’ai fait appel à Nokk pour le transporter jusqu’ici.

Ce fut au tour d’Anna de croiser les bras, l’air dubitatif. Elle ouvrit la bouche pour répliquer, mais fut interrompue par Olaf qui se précipita joyeusement entre elles en s’exclamant :

— Oh, c’est comme la fois où Sven était tombé dans un buisson de baies et qu’il avait fallu le ramener ici ? On avait mangé une délicieuse tarte aux fruits rouges ce soir-là au dessert !

Elsa gloussa, et même sa sœur s’autorisa un sourire malgré le sérieux de la situation. Kristoff riait de bon cœur en regardant affectueusement son renne, qui aurait visiblement préféré que cet incident soit oublié.

— Ce n’est pas vraiment la même chose, Olaf, mais ça s’en rapproche, répondit Elsa, un rire dans la voix.

Elle reprit son sérieux alors que son regard se posa de nouveau sur Anna, qui attendait toujours des explications. Elle se hâta de poursuivre avant d’être de nouveau interrompue :

— Mais ce n’est pas tout. Cet homme, il semblait aussi me connaître. Avant de s’évanouir, il a prononcé mon nom, comme s’il savait qui j’étais. Et surtout… Il possède des pouvoirs, semblables aux miens.

Dans un même mouvement, les bouches d’Anna et Kristoff formèrent un O parfait sous l’effet de la surprise. De nouveau, la jeune blonde tenta de retenir un rire face à leur stupéfaction. Même Olaf s’était interrompu et la regardait d’un air interloqué, la tête penchée sur le côté. Puis son visage s’éclaira soudainement et il recommença à bondir partout.

— Tu veux dire qu’il peut faire de la neige, lui aussi ? s’exclama-t-il. Super ! Ça veut dire qu’on pourrait avoir un nouvel ami pour construire des bonhommes de neige géants et envoyer des avalanches de boules de neige sur tout Arendelle !
— Olaf, Olaf ! s’écria Elsa en tentant de le calmer. Une avalanche de boules de neige sur tout le royaume n’est pas exactement ce que j’appellerais une bonne idée, d’accord ?

Elle reporta son attention sur Anna, qui avait repris contenance et fermé la bouche entre-temps.

— Mais ce n’est pas ce que je veux dire. Il n’a pas des pouvoirs de glace, mais ses mains ont créé des étincelles, alors je suppose qu’il a quelque chose à voir avec le feu…

Elle fut – de nouveau – interrompue lorsque de légers coups retentirent à la porte. La reine Anna invita à entrer, et l’un des docteurs de la cour entra dans la pièce. Le vieil homme arborait une moustache grise impressionnante qui renforçait son aura pleine d’assurance. Il s’inclina respectueusement tout en annonçant d’une voix claire :

— Je me suis occupé de l’homme que vous avez ramené au château. Ses blessures ne présentent plus aucun danger, mais il reste faible. Je lui ai administré un tonique, son réveil ne devrait donc pas tarder.
— Merci, répondit simplement Anna.

Alors que le docteur sortait, elle jeta à Elsa un regard qui lui faisait parfaitement comprendre qu’elle avait encore un tas de choses à dire.

Cependant, elle n’en fit rien, et se contenta d’appeler un domestique afin qu’il ajoute une chaise à la grande table du banquet, dressée sur la place de la ville, qui conclurait la journée du couronnement. Le groupe décida ensuite de rendre visite à l’inconnu qui occupait l’une des chambres d’amis.

Une fois arrivés devant la porte, Elsa hésita un instant avant de frapper doucement. Une voix faible mais assurée les invita à entrer. L’intérieur de la chambre était sobrement décoré, les rideaux flottaient paresseusement au rythme de la brise fraîche qui s’infiltrait par la fenêtre, et les rayons du soleil couchant baignaient la pièce, illuminant chaque recoin, ainsi que le lit face auquel le groupe se trouvait.

Là, adossé contre la tête de lit, l’inconnu regardait la vue du royaume en fête qui s’offrait à lui. Il était entouré d’un halo de lumière orangée réconfortant, son visage de profil se détachait du reste du décor. Alors qu’il se tournait vers eux, un sourire fatigué mais chaleureux s’étira sur ses lèvres, et alors qu’il posait ses yeux bleus profond sur Elsa, elle sentit un frisson de compassion l’envahir. Ils échangèrent un regard pendant quelques secondes, puis l’inconnu porta son attention sur Anna lorsqu’elle s’avança près de lui.

— Bonsoir. Je suis Anna, la reine d’Arendelle. Ma sœur Elsa vous a trouvé inconscient dans la Forêt Enchantée et vous a apporté ici. Comment vous sentez-vous ?

Malgré son ton léger, Elsa pouvait percevoir dans le regard de sa sœur une certaine méfiance envers l’inconnu. Ce dernier, cependant, ne sembla pas le remarquer et inclina respectueusement la tête à son attention, puis à celle de la jeune blonde.

— Je vais bien, je vous en remercie. Je vous suis sincèrement reconnaissant de m’avoir sauvé.
— Je vous en prie, répondit Elsa en s’asseyant au bord du lit, vous n’avez pas à nous remercier. Nous sommes simplement heureuses de vous voir réveillé.

Elle échangea un regard éloquent avec Anna et, après un bref silence, poursuivit d’un ton plus sérieux :

— Nous avons quelques questions, si vous vous sentez suffisamment en forme pour y répondre.
— Bien sûr, je vous écoute, acquiesça l’homme.
— Pourriez-vous nous dire votre nom ? Comment êtes-vous arrivé dans la Forêt Enchantée sans que les Northuldras ne le remarquent ? Et, plus important encore… Vous sembliez me connaître lorsque je vous ai trouvé là-bas.

Les yeux de l’inconnu se perdirent un instant dans le lointain. De toute évidence, il tentait de rassembler ses souvenirs de ce qui était arrivé avant son réveil. Ses cheveux blonds reflétaient la lumière du soleil qui continuait à décliner lentement. Après un léger soupir, il releva la tête vers elle en affichant un sourire désolé.

— Malheureusement, je ne me souviens de rien. Mon dernier souvenir, avant que vous ne me trouviez…, il prit encore quelques secondes pour réfléchir avant de poursuivre. J’étais sur un petit bateau de fortune, en pleine tempête. Je luttais contre les vagues pour ne pas me retourner, et puis… Plus rien.

Son visage s’illumina soudain.

— En revanche, je peux vous dire que mon nom est Aodhan.

Kristoff, qui était jusque-là resté en retrait, s’approcha du lit pour se tenir aux côtés d’Anna.

— Il y a quelque chose que je ne comprends pas, Aodhan. Vous dites que votre dernier souvenir remonte à une tempête en mer, mais d’après Elsa, elle vous a trouvé en plein cœur de la Forêt Enchantée.

Le dénomma Aodhan fixa son regard sur le jeune homme, les sourcils froncés. Une lueur d’incertitude éclaira fugacement ses yeux bleus alors qu’il réfléchissait.

— Vous avez raison, c’est effectivement étrange, concéda-t-il finalement. Mais je crains que mes souvenirs ne soient encore trop flous pour offrir une explication claire.
— Et il y a autre chose, repris Elsa qui brûlait apparemment d’impatience de revenir sur le sujet. Vous n’avez pas expliqué que vous sembliez me connaître.
— Je ne saurais pas vous expliquer cela non plus, j’en suis désolé. Tout ce dont je me souviens, c’est du nom d’Elsa… La reine d’Arendelle… Qui aurait des pouvoirs.

Il réfléchissait tout en parlant et son regard s’illumina de nouveau à la mention des pouvoirs d’Elsa. Il se redressa, apparemment excité de se souvenir.

— Oui ! J’ai pris la mer car j’avais entendu dire que la reine d’Arendelle avait des pouvoirs magiques !

Avant qu’il n’ait pu ajouter quoi que ce soit, une énorme masse blanche bondit sur le lit. Il s’agissait d’Olaf qui se penchait sur le jeune blond en le scrutant en haussant l’un de ses sourcils en bois.

— Vous avez construit votre propre bateau ? s’étonna-t-il. Ça explique sûrement pourquoi vous avez eu des problèmes dans la tempête ! Peut-être que la prochaine fois, vous devriez envisager de voyager sur un vrai navire, avec un équipage, des grandes voiles, et une coque bien robuste ? Mais je ne suis pas vraiment un expert en bateaux…

Aodhan ne répondit pas. Il était bien trop occupé à fixer Olaf, la bouche grande ouverte et les yeux écarquillés, retenant visiblement à grand peine un cri de surprise. Le bonhomme de neige s’en rendit compte et recula, l’air gêné.

— Ah, oui, je suis désolé, mais je trouve les vêtements inconfortables ! J’oublie toujours de le préciser !

Aodhan finit par refermer la bouche et secoua la tête pour reprendre contenance. Il releva les jambes en faisant attention à ne pas faire tomber Olaf, qu’il regardait toujours comme s’il était sûr d’halluciner, puis s’assit au bord du lit.

— Alors, vous avez entendu dire que je possédais des pouvoirs magiques ? reprit Elsa, intriguée.
— Oui, lorsqu’on m’a raconté le jour de votre couronnement, répondit l’intéressé en hochant la tête.J'avais espéré que vous pourriez m’aider à contrôler les miens… Vous voyez, depuis que je suis enfant, j’ai eu du mal à maîtriser ce don étrange, ou cette malédiction devrai-je dire.

Il fixait ses mains comme s’il avait peur que ses pouvoirs se manifestent subitement et fassent exploser toute la pièce.

— Je n’arrive pas à les contrôler. Ils apparaissent de manière inattendue et, parfois, ils me font peur.

Elsa pencha la tête sur le côté et avança une main compatissante pour la poser sur l’épaule d’Aodhan, mais se ravisa. Elle ne comprenait que trop bien la peur du jeune homme.

— Je comprends ce que c’est que de se sentir seul avec ses pouvoirs, murmura-t-elle en échangeant un regard attristé avec sa sœur. Je ne peux rien vous promettre, mais j’essaierai de vous aider.

Alors qu’Anna la regardait avec désapprobation, Aodhan posa sur elle des yeux embués de reconnaissance. Elle lui répondit par un léger sourire avant de poursuivre.

— Mais ce soir, nous devons finir de célébrer le couronnement d’Anna. Nous organisons un grand banquet, et vous êtes le bienvenu si…

Le reste de ses paroles se perdirent alors qu’un grondement retentissant s’était échappé de l’estomac d’Aodhan à la mention du banquet.

— Vous avez prévu des feux d’artifices ? s’exclama joyeusement Olaf en se précipitant à la fenêtre pour vérifier.

Il revint vers eux avec une mine déçue. Tout le monde rit doucement, Aodhan plus par gêne que par amusement. Il accepta cependant l’invitation d’Elsa. Apparemment, cela faisait plusieurs jours qu’il n’avait rien mangé, sur son bateau de fortune.

Alors qu’ils prenaient congé pour lui laisser le temps de se préparer, Anna demanda aux domestiques de lui apporter une tenue. Après avoir fermé la porte de la chambre d’ami, elle échangea un regard de réprimande avec sa sœur aînée tout en poussant un long soupir.

— Nous avons beaucoup à faire demain, commenta Elsa.
— Et surtout beaucoup de choses à nous dire, répondit Anna un peu abruptement. Mais pour ce soir, laissons place à la fête !

Elle avança en effectuant quelques pas de danse avant de se tourner vers le reste du groupe. De toute évidence, rien ne pouvait entacher la joie de cette journée de couronnement. En particulier lorsqu’elle se terminait par un banquet, et avec ses chocolats favoris.

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