Chapitre 4

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La forêt est très verte, dans le coin où nous sommes. Je dirai que ça fait deux mois que je suis dans la forêt, mais en réalité, je n’en ai aucune idée. Mes cheveux sont emmêlés, mes vêtements sales, je meurs de faim et je ne me suis pas lavée depuis belle lurette. Je ressemble à une sauvage, d’après Break.

J’entends soudain un bruit lointain. Un genre de crissement, de vroum et de cailloux. Je cours, me rappelant le bruit. C’est un train. Et là, j’aperçois le train de Pinmard. Il y a aussi le grillage, avec écrit dessus «Préfecture de Pinmard, accès interdit». Je saute aux bras de Break et me dégage, soudain.

- Désolée.

Il ne dit rien et m’indique une porte dans le grillage. Il scanne un badge et la porte s’ouvre.

- Allez viens, Tylia.

On traverse un long champ jaunâtre. Au bout d’un moment, j’entends des rires, des voitures et des voix. J’aperçois une magnifique ville propre. Les rues sont larges, éclairées, animées. Des gens discutent autour d’un verre sur une terrasse d’un café, tandis que d’autres sortent des magasins avec pleins de sacs aux épaules et aux poignets. Les femmes sont maquillées, habillées chiquement. Les hommes sont grands, beaux, fiers. Et puis il y a des immeubles hauts. Tout semble merveilleux. Tout le monde doit être riche, ici.

On descend une rue et entre dans un magasin. Break s’approche du comptoir.

- Code 6,4,5 F.

Le barman semble le comprendre et lui indique une adresse. 5 rue des Pélicans.

Je sens l’odeur de la mer, et aperçoit un port. Break me pousse vers la sortie.

- C’est quoi, ce code ?

- Ca date des années 2100. Quand il y avait beaucoup de fugitifs, et qu’ils revenaient de la forêt, ils disaient ce code et leur nom.

- Ok.

Je me retiens de lui dire que c’était il y a 500 ans. On arrive dans la rue des Pélicans et on cherche le 5. Très jolie maison, avec vue sur l’océan Pacifique, d’après les gens du coin.

On entre et une femme nous fait la bise.

- Ca fait longtemps que je n’ai pas eu à m’occuper de fugitifs. Et en plus, j’ai affaire à mon Clark Ustérus. Tout le monde t’a déjà oublié, et même moi, je te croyais mort. Tu as rencontré une jolie jeune fille, dans la forêt.

La dame me désigne. Je comprends que c’est sa mère. Elle me propose de me laver et j’accepte.

- Voici un bain chaud, tu peux rester autant de temps que tu veux.

Je me plonge dans la baignoire. Qu’est-ce que ça fait du bien. Je nettoie la crasse et me lave avec un savon aux agrumes. Je sors du bain et regarde les vêtements mis à disposition par Madame Ustérus, appelée Mélanie. Une jolie robe en mousseline de dentelle, avec une jupe high low et sans manches, d’un joli violet pastel. Je l’enfile et ajoute avec ça les escarpins gris fournis avec. Je titube et rejoins Mélanie.

- Que tu es belle. Assied-toi là, que je te coiffe.

Elle démêle mes cheveux bruns et les attache en deux petits chignons, dont elle laisse dépasser deux mèches. Après, elle s’attaque au maquillage. Un peu de poudre, du fard à paupières rose pâle, du mascara et du blush.

Je rejoins Break pour aller en ville découvrir le mystère de cette ville.

- Regarde Clark, cette fille est d’autant plus jolie toute propre, non ?

Il se contente de hausser un sourcil puis de repartir.

- Personne ne doit savoir que je suis ici, dit Break. Alors pas un mot sur mon identité, on ne sera jamais en sécurité ici. Je m’appelle Gérard Lottet.

- Gérard ?

- Tais-toi. Tu t’appelleras Jennifer Lottet, tu es ma sœur.

Il claque la porte et commence à avancer dans la rue. Les gens ne font pas attention à nous. Mélanie nous a vraiment mis à la mode.

- Mélanie est forte, dis-je. Les Pinmardiens ne nous reconnaissent pas.

- Elle fait ça depuis des années, ajoute Break. Des gens ici ont une formation pour s’occuper des fugitifs. Le gouvernement n’est pas au courant, généralement, les connaissances sont transmises de génération en génération. Ma famille fait ça depuis les années 2100.

Je l’écoute et me raidis d’un coup. Il y a, sur un gratte-ciel, une image de moi diffusée.

- Tylia Willow, habitante de Afirust est portée disparue depuis 2 mois.

Un homme entre et l’image de moi se rétrécit. Un bandeau affiche le nom du journaliste.

- Tylia Willow habite dans le petit village d’Afirust, et elle a disparu il y a longtemps. Les Médiateurs s’attaquent à la recherche dans la forêt. Si vous la voyez, merci de contacter le 2546.

- Avance. Ne fais pas attention à tout ça, ça va paraître suspect, chuchote Break en me poussant légèrement.

Je suis persuadée que les passants vont me reconnaître. Le maquillage ne m’a pas tant changé que ça, après tout. Je serre la lanière de mon sac à main. J’ai l’impression de voir des images de moi partout. Break remarque mon air anxieux.

- Calme-toi, tu vois bien que personne ne te reconnaît.

- Désolée, Gérard.

Je m’enfuis en courant vers la maison de Mélanie. Je manque de trébucher et je retire mes escarpins, me retrouvant pieds nus sur le goudron. Tout le monde me fixe. J’entends des chuchotements.

- C’est elle, non ?

- La fugitive ?

- Celle qui passe aux infos.

- C’est vrai, elle lui ressemble.

- C’est quoi, le numéro, déjà ?

- 2546.

- J’appelle.

Je finis par m’asseoir sur un banc et me prends la tête entre mes mains. Les passants continuent de me fixer.

- Quoi ?! Dégagez, dis-je en secouant la main.

Et puis, Break arrive en courant.

- Jennifer ! Pourquoi es-tu partie ?

Voyant les passants former un arc de cercle pour suivre la conversation, je décide de jouer la comédie.

- Désolée, Gérard. Mais…

Je me force à prendre un air malheureux.

- J’ai vu ton ex, alors je me suis dit qu’on devrait s’enfuir.

Un «oh» retentit dans l’assemblée.

- Je pensais que ça allait te briser le coeur. Je l’ai vu avec un autre homme.

Nouveau «oh» des passants.

- Oh non.

Break s’assoit en secouant la tête.

- Merci, Jen’.

La foule repart et je pousse un soupir de soulagement.

- Hum, écoute, tu veux rentrer ?

- Non, j’ai un mystère à découvrir.

- Et s’il n’y a rien ? Aucun mystère ?

- Je rentrerai à Afirust. Et affirmerai que j’étais partie à Pinmard pour chercher un logement.

- Ok.

Break se lève et me dit de le suivre.

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