L'aéro de tous les porcs

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 Après s'être débattue sans trop de convictions pendant de nombreuses minutes, Magalie cessa, comprenant que jamais ce Marlowe ne la laisserait partir. De plus, son histoire de bombe dans le crâne s'avérerait peut-être véridique, et la secrétaire n'avait aucune envie de tuer un innocent par inadvertance.

 Marlowe la jeta sur la place passager de sa 4L et lui recommanda d'attacher sa ceinture lorsqu'il alluma le moteur.

 — J'aime conduire vite et sauvagement, avait-il dit.

 Sa voiture arpenta des voies sinueuses avant d'atteindre la rocade, puis l'autoroute.

 — Où allons-nous exactement ? s'informa Magalie.

 — Chercher ce cher Mardo.

 — Oui mais... où ?

 — Au tibet.

 — D'accord... Et vous savez où il est, Mardo ?

 — Au tibet.

 — Ça j'ai compris...

 Framboise détourna son regard vers la droite, vers la vitre qui dévoilait les innombrables voitures que Marlow dépassait au double de la vitesse limite autorisée.

 — Ralentissez un peu, vous voulez ?

 — Pourquoi ça ?

 — On va avoir un accident. Le moinde obstacle imprévu et on sera ramassés à la pelle par des ouvriers dépressifs, puis violés par un croquemort.

 — Je gère.

 — Vous n'êtes qu'un gamin inconscient.

 — Tu ne peux pas comprendre, Magalie. Personne ne le peut. La vie n'a pas d'importance et personne ne s'en rend compte...

 — Génial ! Je roule vers une destination inconnue du Tibet dans la voiture d'un dépressif suicidaire !

 — Oh, crois-moi, je ne suis pas suicidaire. C'est grâce à moi que nous existons encore tous. J'ai découvert l'atroce vérité. Notre vie ne tient qu'à un fil, qu'à une plume. Et je compte bien me battre pour que ce monde subsiste le plus longtemps possible.

 — D'accord, donc un dépressif narcissique qui pense être le centre de l'univers.

 — Pas du tout ! cria Marlowe, faisant un écart. Au contraire. Nous ne sommes rien dans l'univers. Nous n'en faisons même pas parti.

 — D'accord...

 — Arrête de dire ça ! Je vois bien que tu me prends pour un fou. Si seulement tu te rappelais de moi, tu saurais que ce n'est pas le cas !

 — Je ne me souviens pas de vous, désolée...

 — J'étais vraiment inutile à ce point ? Je manquais de charisme à ce point ? J'étais inexistant, voilà. Désormais, je décide de remanier ma vie. Tout le monde se souviendra de moi. Et je me dois de changer. Car je suis celui qui nous maintient tous en vie.

 — D'accord...

 — Putain, arrête avec ça !


 "Argh, ça ne va pas ! Que m'arrive-t-il ? Je dois me ressaisir. Ce n'est pas l'image que je veux donner de moi. Ce n'est pas l'image que je veux donner à ce récit ! Si nous continuons dans ce cercle de paroles désuètes, nous disparaîtrons, et pour de bon cette fois-ci !"


 — Pardon ma belle, je me suis emportée.

 Marlowe affichait un sourire irréel.

 — Pas de soucis.

 — Juste, tu te rends compte que tout ça n'a aucun sens. Comment je pourrais rouler à 250 km/h avec une 4L ?

 — Elle est... tunée ?

 — Voilà, c'est ça...

 — D'accord...


 Marlowe se gara en face de l'aéroport, d'une manoeuvre particulièrement fluide et réussie. Il faut tout de même signaler qu'il ne s'est pas foulée, les places handicapées étant bien plus larges.

 — Pour répondre à ta question de tout à l'heure... Nous, je ne sais pas où est Mardo exactement. Et tu verras que nous le rencontrerons naturellement. Ce sera l'ultime preuve. À ce moment, tu seras obligé d'admettre que notre monde ne fonctionne pas selon des règles normales.

 — D'accord.

 — Tu le fais exprès ou bien t'es vraiment chiante ?

 — Hum... Laisse-moi le temps d'y réfléchir, à celle-là.


 Agacé, Marlowe essaya de contenir sa haine et de se comporter comme le gars confiant et amusant qu'il n'est pas. Il força un large sourire, qui, peu à peu, en devint un vrai. 

 — Deux tickets, s'il vous plaît, demanda-t-il en regardant la concierge droit dans les yeux et en s'accoudant sur le guichet.

 — Pour quel vol ? demanda la femme en mâchant un vieux chewing-gum.

 — Allez ma très chère, jouons à un jeu ! Devinez où je vais ?

 — J'en sais rien et j'ai pas que ça à faire.

 — Au Tibet ! céda Marlowe.

 — Tous les vols vers le Tibet on disparus, vous devriez le savoir.

 — Comment ?

 — Vous suivez pas les infos ?

 — Non, mademoiselle, j'ai pas que ça à faire ! répondit le Lieutenant en masquant sa contrariété.

 — Les indépendantistes tibétains ont lancés une offensive de masse pour en terminer avec l'oppression chinoise.

 — C'est mal barré pour eux, commenta Magalie. La puissance militaire de la Chine est conséquente !

 — En effet, répondit la guichetière. Ils vont se faire écraser vite fait bien fait. Voilà, monsieur. Le pays est en guerre et tous ses aéroports sont hors service. Vous comprenez ?

 — On ne peut pas attendre, signala Marlowe.

 — Bien sûr qu'on peut attendre !

 — Non, Magalie, impossible.

 Il se tourna vers la concierge, fronçant les sourcils pour se donner un regard ténébreux.

 — Les aéroports en Chine sont toujours opérationnels, n'est-ce pas ?

 — J'ai peur de comprendre, mosieur...

 — Répondez à ma question !

 — Oui.

 — Deux tickets pour l'Ouest de la Chine, s'il vous plaît.

 "Ahah, yes ! C'est un bon cliffhanger ça !"

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