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C’est vrai que je me sens bien, rassuré, détendu, à côté de lui. Il se tourne vers moi, toujours en me tenant la main. Je sens quelque chose toucher mon bassin, chaud, dur. Ce ne peut pas être sa main. Mon Dieu, ce doit être son pénis ! En érection. Il me touche avec son pénis ! Cela devrait me révulser, mais je suis touché par cette expression de son attirance pour moi. Mon cœur accélère encore. Je ne sais plus quoi faire. Sa tête se pose contre mon épaule. Cela me tord le bras : je suis obligé de défaire sa main et de passer mon bras au-dessus de ses épaules, sans le toucher. Sa main libre se pose sur mon ventre. Je veux qu’il arrête. Ce n’est pas possible. En même temps, je sens mon boxeur comprimer mon pénis. Que se passe-t-il ? Je ne devrais pas réagir à la présence d’un garçon, si près, si caressant. Ses cheveux sont doux, ils sentent bon. Sa main bouge lentement sur mon ventre. Ce que je suis bien. Non ! Je me défais brutalement. Ce mec est un pédé et il est en train de me contaminer. Je vais attraper son homosexualité.

— Nic, je ne peux pas. Je ne suis pas…

— Tu n’es pas quoi ?

— Je ne suis pas comme toi. Je ne couche pas avec les garçons. Je t’aime bien. Je voudrais qu’on soit ami, mais sans se toucher. Je suis désolé.

— Tu sais, je ne sais pas si je suis gay. C’est vrai, j’ai eu une expérience, j’ai aimé.

— Tu n’es pas obligé de donner des détails !

— Tu es vraiment coincé, toi ! Ça ajoute beaucoup à ton charme. J’ai envie de te débloquer !

— Ça veut dire quoi ?

— Rassure-toi ! Je ne vais pas te violer ! Simplement, je voudrais que tu sois plus libre dans ta tête pour les choses du sexe.

— Mais je suis libre !

— Oui, de penser comme tes parents et de ne pas être toi !

— Mais je suis moi !

— Tobias : réponds-moi franchement. Tout à l’heure, quand nous étions allongés l’un contre l’autre en nous tenant la main, tu ressentais quoi ?

Je ne peux pas lui dire que j’étais bien, simplement bien, contre lui. Ce n’est pas normal. Je ne suis pas normal !

— Allez, dis-le. Moi, je le sais, car je le sentais. Toi, dis-le. Dis-le, à toi. Écoute tes envies, tes pulsions !

Ce n’est pas possible. Je ne peux pas le dire. Je sens mes yeux se mouiller. Nicolas le voit. Il passe un doigt sur ma joue, très doucement, l’effleurant à peine.

— Mon pauvre Tobias, tu es si près, si loin. Comment briser ces barreaux ?

C’est trop difficile. Comme un gamin, je me mets à pleurer. Il me prend dans ses bras. Je me laisse faire, car j’ai besoin d’aide, de consolation. Il ne bouge pas. Je sens son odeur, j’ai presque mon nez sur son aisselle. Mon Dieu ! Qu’il sent bon ! Cela redouble mes larmes. Je suis si bien dans ses bras et je n’ai pas le droit d’y être.

Quand mes sanglots s’espacent, je sens sa main parcourir lentement mon omoplate ; il le fait avec tant de prévenance que mon dos recherche sa main. Involontairement, j’accompagne ses mouvements, je me love contre lui. Je retrouve calme et sérénité. Je lutte pour empêcher mon cerveau de me hurler de partir. J’ai besoin de son réconfort.

Il me bascule sur le côté, met son visage près du mien, me fixe avec tant de gentillesse, de douceur, à nouveau un doigt sur la joue.

— Laisse aller ! Arrête de lutter. Là, maintenant, de quoi as-tu envie ? Fais-le !

Je n’ai qu’une seule envie, terrible. Je remonte mon visage, mes lèvres sentent le souffle de sa bouche, elles touchent les siennes. Un petit baiser. Il ne cherche pas à l’appuyer, se laisse faire. C’est trop frustrant et c’est moi qui vais chercher sa tête pour la faire descendre contre la mienne. Mon premier baiser, mon premier vrai baiser, celui qui électrise votre corps. Que ce soit avec un garçon n’a plus d’importance. Je le dévore, tandis que ses mains explorent mon corps. Moi, je ne bouge pas, entièrement dans ce baiser.

Nous nous défaisons. Il ne dit rien, je ne dis rien. Il s’approche, me pose une bise sur la joue, se retourne pour éteindre la lumière. Je plonge dans un sommeil d’enfant, avec des contes merveilleux qui me bercent.

Le lendemain, nous passons une journée épuisante à arpenter la grève, sous un vent cinglant, dans les embruns, sans pouvoir parler. Nous revenons rouges, éreintés par ce souffle puissant. La journée fut longue et passa en un instant. Chaque fois que mes yeux croisaient ceux de Nicolas, j’y lisais une chaleur incroyable qui me portait au rouge vif. J’évitais ce regard, l’observant à la dérobée, avec le même échauffement de mon être. Je découvrais plein de détails, aussi charmants les uns que les autres. Heureusement, Henri et Louis, indifférent à ce qui se passait, mettaient une ambiance folle. Louis avait un humour incessant, fin, percutant, sans jamais montrer la moindre méchanceté.

Le soir, le diner fut joyeux, arrosé. Vers la fin, je ne pus retenir la question qui m’interpellait :

— Vous vous embrassez souvent, comme vous l’avez fait dans la voiture ?

— Non ! De temps en temps, quand ça nous prend. J’adore Henri et c’est vraiment super !

— Vous êtes gay ? Je croyais que vous aviez chacun une petite amie !

— Oui, mais la mienne est partie dans les cimetières de sa famille, comme celle de Louis. Je ne sais pas si nous sommes gays, mais j’adore embrasser Louis. On se connait depuis plus de dix ans et on l’a toujours fait, devant tout le monde !

— Vous avez embrassé d’autres garçons ?

— Oui, rarement. À part Nicolas, bien sûr !

— Pourquoi « bien sûr » ?

— Parce que Nicolas, je crois que lui, il est gay !

— N’importe quoi !

— Tu as une façon d’embrasser très particulière !

Je rougis à fond ! Nous nous étions embrassés, lui et moi !

— Et toi, Tobias, tu as envie que l’un de nous t’embrasse ?

— Certainement pas !

— Ça, c’est un oui qui n’ose pas sortir !

Avant que j’aie pu réagir, Louis avait posé ses lèvres sur les miennes. Un vrai baiser, avec la langue. Ce n’était pas désagréable du tout. J’aurais bien continué, mais Henri le poussa. Décidément, ils étaient bien entrainés !

— Et toi, Nic, tu ne veux pas embrasser Tob ? Il embrasse comme toi !

— Tob ?

Je ne lui répondis pas, incapable de la moindre articulation. Il posa doucement ses lèvres sur les miennes et nous échangeâmes un long, très long baiser.

— Vous devriez monter et le terminer au lit, celui-là !

Nos deux amis nous regardaient, les yeux brillants.

Henri sortit un peu d’herbe et la soirée continua.

— Pourquoi as-tu dit que Nic était gay ?

— Parce que toutes les filles le demandent et il n’a aucune copine ! Et toi ?

— Moi ? Tu sais, comme on déménage souvent, c’est difficile de créer quelque chose.

— Mais tu as vu les regards de Léa, de Manon, de Chloé ? Laquelle tu préfères ?

— Je viens d’arriver ! Doucement !

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