Je suis retournée voir Martin plusieurs fois cette nuit. Je n'arrivais pas à dormir. Je me suis déplacée en silence dans la maison à la seule lueur d'une bougie. Le parquet des escaliers craquait à chacun de mes pas. Je redoutais qu'il ne réveille tout le monde. Il est tellement bruyant la nuit ! A croire qu'il sommeille le jour alors que nous marchons continuellement dessus !

Après avoir fini de le sauver hier, maman m'a dit de le laisser tranquille. Elle a essayé de me persuader que ses collègues soldats allaient prendre soin de lui. Mais cette nuit, lorsque je suis allée dans la grange, je n'ai vu personne à son chevet. Je ne pouvais m'empêcher de penser que ma présence à ses côtés le soulageait. Du moins, j'espérais m'en persuader. Oserai-je penser que ça le rassure ? J'ai bien vu dans ses yeux qu'il m'implorait de ne pas le laisser mourir.

J'ai vérifié que ses bandages étaient en place et que ses plaies ne s'étaient pas remises à saigner. Son sommeil fut très agité. Sa fièvre ne baissait pas. Je lui épongeais le front et le visage plusieurs fois, mais elle le rongeait. Cependant les traits de son visage se détendaient lorsque je le rafraichissais. Sa respiration se calmait et son souffle s'apaisait. Je l'observais de tout son être.

Je le veillais. Je restais bloquée sur les mouvements de son torse. Il luisait de transpiration, ses muscles étaient bien dessinés. Du torse jusqu'au bas ventre. J'ai déjà vu des hommes torse nu auparavant, mais jamais de ceux que je voulais toucher. Je veux suivre de mes doigts les courbes de ses abdominaux. Je crois que je pourrais me damner pour pouvoir les effleurer. Sentir sa peau, les battements de son sang sous mes phalanges.

Mon esprit divague tellement lorsque je le regarde. Je ne le contrôle plus. Je suis à la merci du diable et de ses tentations. D'autant plus que cet homme est Allemand. L'envahisseur. En plus d'envahir la France, il a envahi mon esprit et mon âme.