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Revenir aux origines
Clark enfila ses baskets, attrapa une veste et ses clefs et s’en alla en directeur de sa voiture, le sac à dos contenant ses maigres affaires pendant à son épaule. La porte claqua : les cris de sa mère se murèrent dans le silence, cependant, les paroles blessantes de cette dernière tourmentaient son esprit. La jeune femme ouvrit la portière du véhicule, balança ses affaires à l’intérieur et s’installa au poste du conducteur. Puis, elle démarra au quart de tour, les épaules tremblantes et les yeux larmoyants.
Le quartier résidentiel disparut rapidement. Clark demeura concentrée sur la route ignorant les appels de ses demi-frères et demi-soeurs, les maudissant d’être aussi incompréhensifs envers elle.
Sa mère s’était remariée dans l’année avec son compagnon actuel, un militaire faisant partie de la marine américaine. Celui-ci avait déjà eu cinq ans avec sa précédente compagne qui avait malheureusement perdu la vie en Irak. Un homme exigeant, strict et perfectionniste qui avait tenté de former une relation avec Clark, toutefois, celle-ci, encore sous le choc par la mort de son père avec qui elle avait vécu pendant de nombreuses années, avait refusé tout contact avec cet inconnu. Clark n’avait jamais eu de relation mère-fille avec sa mère ; elle blâmait cette dernière pour son abandon.
Après de nombreuses disputes au cours de ces derniers mois, Clark partait finalement vivre sa propre vie, même si elle n’avait que dix-huit ans. Sans un mot aux enfants que sa mère avait eu avec le militaire ni aux enfants de ce dernier, la jeune femme s’échappait vers des contrées nouvelles. La destination était claire dans son esprit. Elle retournait en Louisiane, dans une petite ville tranquille, là où son père avait hérité d’une demeure.
Au bout d’une heure, les larmes n’étaient plus.
Clark s’arrêta à une station service pour reprendre de l’essence. Elle vérifia son téléphone afin de regarder les messages laissés par sa famille qui demandait qu’elle revienne. La jeune femme vint saisir la lettre qu’elle avait écrite dans ses notes et l’envoya dans le groupe familial avant de quitter celui-ci. Elle s’acheta un second portable et réduisit son ancien en morceau avant de le jeter dans la phone.
Clark reprit la route. Elle roula pendant de nombreuses heures s’arrêtant toutes les deux ou trois heures pour une pause de dix minutes. Quand le premier panneau indiquant la Louisiane apparut, elle prit la direction de la ville la plus proche, songeant au moelleux d’un bon lit à l’hôtel bien qu’elle savait qu’elle se contenterait d’un vieux motel.
Fleshbow rayonnait de ses lumières artificielles. Des corps à moitié nus se mouvaient en dehors des bars et des restaurants. Une musique tonitruante résonnait. Des individus déambulaient sur les routes bloquant la circulation de temps en temps. Clark stoppa brièvement son véhicule pour demander des directions pour le plus proche hôtel et le moins cher du lot. Une vieille femme coiffé d’un beret, dotée d’un dentier dorée, lui indiqua le chemin à suivre. Puis, quand Clark voulut la remercier, l’autre éclata de rire.
La jeune femme ne prêta nullement attention à l’aliénée la remerciant pour son aide. Clark arriva au abord d’une bâtisse miteuse où un panneau lumineux bancal clignotait. Un vieux parking vide s’esquissait autour du bâtiment. En arrivant au guichet, elle rencontra une femme à la chevelure de feux lui adressant un sourire charmeur.
— Porte 109, lui souffla-t-elle avant de s’en aller.
— Bonsoir, je voudrais une chambre pour cette nuit, dit Clark à l’intention de l’employé.
C’était un homme d’une cinquantaine d'années vêtu d’une salopette orange. Le guichet ressemblait à un bordel oscillant entre dépotoire et cabane de jardin. L’employé avait le crâne rasé, une barbe mal lavée et fumait un gros cigare.
— 15 dollars. Chambre 108.
Il se leva lentement. Il saisit une clef avec ses doigts dégoulinant de sueur et la balança dans l’assiette au niveau de la jeune femme. Celle-ci ne s’en formalisa pas. Elle régla la note et monta à sa chambre.
— Quelle chance, ronronna la rousse, adossée contre sa porte.
— Je… Je ne suis pas intéressée… bafouilla Clark.
Clark passa une main dans ses courts cheveux sablés. Elle se détourna de sa voisine. Elle enfonça la clef dans la serrure, tourna et se glissa à l’intérieur d’une petite pièce seulement composée d’une kitchenette, d’un lit simple et d’une mini salle de bain.
— Tu ferais mieux de déguerpir d’ici à six heures sinon tu finiras en bouillie pour les malheureuses personnes qui foulent les restaurants en bas de Bowstrings.
Avant que Clark ne puisse répondre, sa mystérieuse voisine disparut à l’intérieur de sa chambre, la laissant poireauter quelques secondes. Un frisson parcourut son échine. Une voix intérieure lui disait de faire ce que l’inconnue lui conseillait.
Le lendemain, à six heures, son véhicule disparaissait du parking de l’hôtel sous le regard colérique d’une vieille femme. Une certaine rousse se pourlécha les lèvres.
— Les déclins reviennent toujours à leur nid, murmura celle-ci alors que son corps devint poussière.
Louisiane-sous-Bois n’allait pas être une partie de plaisir pour Clark.
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