Illusion

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Je la cherchais partout mais je ne la trouvais nulle part. Le monde grouillait autour de moi et je n'arrivais plus à la retrouver. Je ne comprenais pas. Comment avais-je pu la perdre de vue en l'espace d'une seconde ? C'est comme si elle s'était volatilisée.

Autour de moi, tous les habitants vaquaient leurs occupations. Cependant, ma course folle en hurlant le prénom de Johanna en avait fait peur à plus d'un et les passants commençaient à me désigner du doigt. Je passais pour un fou et pourtant, j'étais sûr de l'avoir vue. Je ne pouvais pas avoir rêvé. Cette femme vêtue de son long manteau noir, ses longs cheveux rouges couleur du feu au vent... Ce ne pouvait être que Johanna.

Je cherchai pendant des minutes qui me parurent des heures à la recherche d'indices quelconques. Mais c'était comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Je décidai finalement de rentrer chez moi et ne dis pas un mot à Jess en rentrant qui me fit encore plus la tête. Je me couchai directement dans le lit, l'esprit lourd et l'impression d'être encore plus perdu que je ne l'étais déjà. Cette nuit, je fus réveiller par Johanna. Enfin, la Johanna de mes rêves. La Johanna de mes cauchemars. Celle de ma jeunesse.

Toujours vêtue de sa tunique blanche, elle murmura mon prénom. Mais cette fois, je ne sursautai pas. J'étais habitué d'une certaine manière à ces appels impromptus. Je l'accompagnai comme d'habitude dehors comme si cette scène était des plus banales et regardai l'horizon en sa compagnie. Mais cette fois, elle ne pointa pas l'océan du bout de son doigt comme elle le faisait d'habitude. Elle se tourna vers moi et se mit à pleurer. Je ne savais comment réagir, pris au dépourvu. Je voulus la prendre dans mes bras mais lorsque mes mains voulurent serrer son corps contre moi, je ne touchai que du vide. Quel idiot... À un moment, j'avais presque oublié qu'elle était morte.

Elle continuait à pleurer à chaudes larmes tel le courant d'une rivière qui s'écoule à flots continus sans jamais s'interrompre. Et le pire dans tout ça, c'est que j'étais impuissant. Je ne servais à rien, je ne pouvais rien faire pour la réconforter. Elle ne semblait pas pouvoir parler. C'est pourquoi d'une main elle pointa une direction, celle du village. Au début, je ne comprenais pas. Quel était le message derrière ce geste ? Me remémorer les souvenirs de notre enfance au village ? Et c'est là que je le vis. Le village en ruines.

En réalité, ce n'était pas que le village qui avait été rasé. C'est toute l'île qui avait été saccagée. Les arbres arrachés, les plaines inondées, les cadavres d'hommes et d'animaux éparpillés. La vie même avait déserté ce petit coin de terre perdu au milieu de l'océan.

Je n'en croyais pas mes yeux. Cela me rappelait la scène d'il y a 10 ans mais les dégâts étaient incomparables, bien pires que tout ce que j'avais pu redouter à ce moment-là. Il ne restait plus âme qui vive. Je ne comprenais pas ce qui se passait ni comment ça avait pu arriver. Puis, je me souvins que c'était un cauchemar et que je me réveillerais tôt ou tard dans mon lit, aux côtés de ma femme et de mon enfant à naître. Alors, je souris et j'attendais de m'éveiller.

J'attendis mais jamais je n'émergeai. J'étais comme bloqué dans cette réalité apocalyptique. Une réalité qui était bien pire que tous les cauchemars avec le fantôme de Johanna que j'avais pu faire jusqu'ici. Quand j'essayais d'ouvrir les yeux, espérant regagner la réalité, je restais dans cet univers désastreux. Alors je me mis en colère parce que j'étais pris au dépourvu et je me mis à hurler sur elle :

- Mais bordel de merde... Tu peux me dire ce qui se passe ? Tu es morte, tu n'es pas devenue muette en plus à ce que je sache, non !?

Johanna était toujours là et continuait de pleurer. Décidément, elle était lancée et rien ne pouvait l'arrêter. Je me sentais un peu fautif, mais je n'en avais honnêtement plus rien à faire. Je voulais des réponses à mes questions une fois pour toutes.

- Ça ne sert à rien de lui crier dessus, elle ne te répondra pas.

Interloqué, je me retournai et me retrouvai en face d'une femme aux cheveux noir de jais qui devait approcher la trentaine d'années, mesurant à peine plus d'1m60. Je cherchai à me souvenir d'elle, mais je ne me rappelais pas son visage même si certains traits m'étaient familiers pour une raison que j'ignorais.

- Qui êtes-vous ? demandai-je d'un ton interrogateur. Je ne crois pas vous connaître.

- Pourtant si, Mike. Seulement tu l'as oublié, comme tu as oublié tant de choses, mon pauvre enfant.

Qui était cette femme et pour qui se prenait-elle ? Son ton hautain commençait sérieusement à me m'énerver et à mettre ma patience à rude épreuve.

- Vous allez me dire qui vous êtes à la fin ? m'impatientai-je.

La femme soupira et me regarda droit dans les yeux sans sciller :

- Je ne suis rien de plus que ta mère, Mike. Et toi, et moi, et cette pauvre Johanna, nous sommes tous morts il y a bien longtemps.

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