Un battement d'ailes de papillon

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Une longue plage au sable noir infini s'étend au-delà du regard. À droite, des vagues gigantesques qui frappent le sol durement. Des nuages ténébreux dans le ciel s'éclairent par instant, traversés par des éclairs claquants et pétaradants. L'océan est si sombre qu'on ne distingue pas la limite entre ciel et terre. L'eau s'élève à plusieurs mètres de haut et se fracasse sur les rochers, se jetant sur les pierres dans un vacarme assourdissant.

Sur la gauche, de hautes falaises semblent emprisonner quiconque se trouve dans cette zone. Dans la nuit, leurs sommets côtoient les cumulus charbonneux et n'apparaissent que lors de l'illumination des éclairs. Rempart infranchissable qui encercle la plage, les falaises de roche sombres et dures sont vides de vie. Aucune plante ne pousse sur les flancs abrupts et lissés par l'attaque régulière de l'eau salée et du souffle de la brise sifflante. Aucune aspérité n'est visible. Aucun point d'appui pour grimper. Un marbre aussi glacé qu'indestructible enferme les visiteurs qui échouent ici.

Le seul moyen d'arriver ici est la mer déchaînée. La violence des remous et les rochers sous-marins envoient par le fond tout navire, fracassent les corps et les noient sans pitié. Les morceaux d'épaves jonchent le sable, tout comme les squelettes des humains ou animaux victimes de ces eaux. La puanteur des corps en décomposition se mêle aux embruns salés, piquant les narines.

La tempête souffle, projetant eau et sable sur le visage d'une petite fille perdue au milieu de tout cela. Sa peau rose et ses grands yeux bleus sont irrités par les fines particules qui volent dans tous les sens. Le sable si doux à la main se révèle incisif dans les airs. Il s'insinue dans chaque ouverture, griffant et agaçant l'épiderme. Grelottant, l'enfant tente de protéger son visage avec la manche de son pull en laine violet. Elle se dirige vers la falaise de son mieux, tentant de présenter son dos au vent qui tourbillonne pour mieux la cerner de toutes parts.

Elle tousse pour éclaircir sa gorge et crache un peu de salive pour évacuer le sable dans sa bouche. La petite est maigre, tout en os. Elle porte des souliers à boucle marron et de longues chaussettes blanches couvrent ses jambes jusqu'à mi-cuisse. Sa jupe de laine écrue ne la réchauffe guère. Haut et bas du corps, sont trempés des embruns volants. Ses longs cheveux noirs s'agitent sous les assauts de l'air. Courageusement, elle avance un pied après l'autre pour chercher un semblant de refuge en s'éloignant le plus possible des flots agités.

Soudain, elle entend un grand bruit. Un choc de quelque chose de lourd qui tombe. Une silhouette d'homme adulte se dessine. Vêtu simplement de chaussures de ville noires, d'un jean bleu, d'une chemise immaculée et d'une veste bleu marine, il scrute la plage du regard. Les éléments déchaînés ne semblent pas le gêner le moins du monde. Il cherche l'enfant et l'aperçoit enfin.

Il s'approche d'elle doucement. Sa grande taille dévie un peu le vent et l'enfant parvient à voir le visage du nouvel arrivant. Aussitôt, elle est inquiète et recule quand elle le reconnaît à ses cheveux aux reflets cuivrés. Elle grogne et tente de le mordre. Ses minuscules canines claquent dans le vent, sans inquiéter l’adulte. Observant les alentours, elle comprend qu'elle n'a aucune échappatoire et cherche à s’échapper, loin de lui.

Il parvient à elle rapidement, lui caresse la joue, sans crainte des tentatives d'attaques juvéniles et l’observe quelques instants. La petite fille a un visage angélique. Sa peau rose est aussi douce que les pétales de la fleur. Ses immenses yeux bleus aux reflets lavande expriment toute sa colère et sa peur. Ses lèvres parfaitement dessinées sont d'un rouge vif. Ses dents blanches claquent dans le vent, en voulant mordre l'adulte. Elle ressemble à une poupée. Une si jolie poupée, fragile et délicate.

L'homme se baisse lentement et la saisit dans ses bras, coinçant le visage de l'enfant dans son cou, à l'abri du vent sableux. Elle s'agite et il resserre son emprise. Il la couvre avec sa veste pour la réchauffer. De grandes ailes de peau blanche sortent de son dos tel un ange et il s'envole au-delà de la falaise, portant la petite contre lui.

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