Panique au labo

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- Jean-Marc ! Reste où tu es !

Aïe.

Surpris dans le couloir pétant, un trieur plein de projets zinzonnants à la main, le manager se retourne. Une femme, petite, boulotte, l’expression revêche, fonce à sa rencontre, les bras chargés de ferraille.

Double aïe.

La vice-présidente, d’ordinaire si bienveillante à son égard, le charge. Jean-Marc sent sa dernière heure arrivée.

- C’est toi qui a donné l’accord pour l’oiseau ? l’interpelle-t-elle pleine d’humeur.

- Quel oiseau ?

- Ne me prend pas pour une quiche. Le… truc là, à bec long.

- Ah… Le toucan, oui…

- “Aaaaah…” Ah ? Ah ! singe sa supérieure. Oui, oui, je suis ravie de te revoir sur la planète Terre. Suis-moi. Maintenant !

Faute d’alternative ou de fuite socialement acceptée, Jean-Marc obéit. Ils dépassent son bureau arrosé du soleil d’hiver, outrepassent un open-space éternellement exalté, où un rival commercial s’excite de visu sur une ripopée colorée, mix s’il en est, de grenadine industrielle et de liqueur à deux francs ; avant d’enfin passer les portes du cabinet de sécurité.

Gris et terne, l’intérieur blindé de techniciens pressés, est tapissé d’écrans monochromes et d’hologrammes cintrés. À leurs têtes justement, voltige un toucan orange, dessiné au mieux par deux pieds simiens. Il tournoie, gracile, arrosant ses créateurs de déjections criardes, une sorte de sifflet dans le bec.

- Ah… prononce benoitement Jean-Marc, à sa vue.

Évidemment que ça devait louper. Assurément qu’il allait sauter. Sa supérieure le fusille du regard et lui balance la mitraille à la face.

- “Ah” ? C’est tout ce que tu trouves à me dire ? “Ah” ? Tu vois ces écrous ? C’est ceux que ta saloperie de piaf à emporter à coup de serres sitôt transmuté ! Impossible de canaliser ce truc. Il siffle et débagoule un sabir incompréhensible et fait criser les transmuteurs. Dis-moi que t’as une raison valable pour avoir autorisé un tel étron visuel.

- Euh…

- Madame Assédic ! coupe un technicien, penché sur l’écran. Il s’échappe !

C’est bien vrai. Le toucan pétant, pète la forme, au point de faire péter watts, oreilles et porte vitrée à coup d’appeau. Malgré les traits grossiers qui animent son plumage, l’oiseau semble se péter les bretelles ainsi à jouer les ambianceurs casse-burnes.

“À l’image de son créateur”, pense Jean-Marc, moitié-consterné, moitié-horrifié, mais totalement perturbé.

Le capteur holographique le perd de vue, sitôt la porte de la salle de transmutation franchie. Assédic donne un coup de pied sur le mur.

- Eh merde ! jure-t-elle. Vous êtes en train de me faire croire qu’un cormoran chaotique qu’un gros raptor ?!

- En fait…

- Je me fous de vos excuses ! Retrouvez-le ! Il ne doit pas s’échapper ! Allez !

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